Le mot du jour
Le 23 avril 2009 Voir les commentaires (4)
Evitons les « paroles excluantes »...
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Le mot du jour, c’est le titre d’une chronique sur la chaîne de radio publique France Musique. Chaque matin, de 8h50 à 9h, le compositeur Pierre Charvet y explicite un mot de la musique :
Parmi les multiples barrières qui rendent la musique « classique » intimidante aux yeux du grand public, il y a son vocabulaire
dit-il pour présenter son émission. Il est certain que
Ah ! les trilles de Schnabel dans l’arietta de l’opus 111 [1]
est une suite de ce que Pierre Charvet appelle des paroles excluantes, celles
qui
lorsqu’elles ne sont pas comprises, excluent, avant même l’écoute de l’œuvre, toute une partie du public.
Pourquoi parler du mot du jour ici ? Eh bien, remplacez musique « classique » par mathématique, écoute de l’œuvre par lecture de l’article, dans les phrases de Pierre Charvet... et voici un exemple, extrait d’un vrai billet paru sur ce site [2]. Le Beethoven du trille y a été remplacé par le Cauchy des polyèdres :
si deux polyèdres de l’espace euclidien ont même combinatoire et si leurs faces correspondantes sont identiques, alors ils sont superposables [3].
J’ai choisi cet exemple parce que je savais que je pourrais le citer sans blesser l’auteur du billet. Mais nous sommes tous capables de le faire. C’est même comme ça que nous écrivons spontanément.
Évitons. Essayons d’éviter les paroles excluantes.
Notes
[1] Un trille est un ornement musical consistant à alterner très rapidement deux notes. Artur Schnabel était un pianiste de la première moitié du vingtième siècle. Un opus est une œuvre musicale publiée. L’opus 111 est la cent-onzième des œuvres publiées d’un compositeur.
Tous les initiés (et eux seulement) savent que « opus 111 », sans précision, désigne un « opus » de Beethoven, de sa dernière sonate pour piano, dont le deuxième et dernier mouvement --- encore une parole excluante --- la dernière partie porte le joli nom d’arietta, une petite aria, un petit air, une mélodie expressive.
[3] L’espace euclidien est l’espace, celui de la géométrie dans l’espace. Un polyèdre est un volume limité par des faces, comme un cube, une pyramide. Avoir la même combinatoire, c’est avoir le même nombre de faces, des faces de la même forme, qui s’agencent de la même façon (mais pas forcément de la même taille)... les mots les plus compliqués sont les plus difficiles à expliquer ! Deux figures dessinées dans un plan sont superposables, si on peut en découper une et la superposer à l’autre. Pour deux polyèdres dans l’espace, il faut imaginer une notion analogue. C’est un théorème de Cauchy.
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Pour citer cet article :
Michèle Audin — «Le mot du jour» — Images des Mathématiques, CNRS, 2009
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