Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

Un tout petit bout de l’œuvre de Misha Gromov

Piste bleue Le 27 avril 2009  - Ecrit par  Étienne Ghys Voir les commentaires (10)

Euclide

Pendant des siècles la géométrie était celle d’Euclide, celle qu’on apprend à l’école, avec ses triangles rectangles, isocèles ou équilatéraux, avec ses théorèmes de Pythagore et de Thalès ; la géométrie du « monde dans lequel nous vivons ».
Euclide en avait posé les fondements au troisième siècle avant notre ère, dans un livre emblématique pour les mathématiciens, intitulé « Les éléments [1] ». Pendant plus de vingt siècles, ce livre a été au cœur des mathématiques tant il paraissait définitif. Pourtant, l’un des axiomes d’Euclide — un énoncé qu’il demandait au lecteur d’accepter au début de son livre sans justification — laissait comme un malaise : « par un point pris hors d’une droite, on peut mener une parallèle à cette droite et une seule ». Des générations de mathématiciens ont essayé de le démontrer à partir des autres axiomes qui leur paraissaient plus « naturels ». Beaucoup ont cru y parvenir, beaucoup se sont trompés.

La géométrie non-euclidienne

Au début du dix-neuvième siècle, au moins trois mathématiciens ont la même idée presque simultanément : il doit exister une géométrie non-euclidienne. Il s’agit de Bolyai, Lobatchevsky et Gauss. Tous les trois brisaient un dogme : ils proposaient une conception de l’espace entièrement nouvelle. Une véritable révolution mathématique, analogue de la révolution copernicienne au quinzième siècle. Il faudrait bien sûr de très longues explications historiques mais ce n’est pas le but de cet article. L’une des questions centrales est celle de l’existence : quelle peut être la signification de l’existence d’une autre géométrie que celle d’Euclide ? Plusieurs géométries ? Je note en passant que mon correcteur d’orthographe refuse de mettre ce mot au pluriel. Nous vivons dans un seul espace et pas dans deux... Le but de la géométrie n’est-il pas de décrire les relations entre les distances des points dans « notre » monde ? C’est en effet l’une des premières fois où il a fallu le courage d’affirmer qu’un mathématicien peut (et doit) travailler dans des espaces qui peuvent tout à fait être imaginaires, sans rapports évidents avec des problèmes concrets. Les liens entre les mathématiques et la physique (qui s’occupe en principe de ce qui se passe dans notre monde) ont toujours été complexes...

Quoi qu’il en soit, au début du dix-neuvième siècle quelques visionnaires étudient une « nouvelle géométrie » dans laquelle l’axiome des parallèles d’Euclide n’est pas satisfait. Ils démontrent des théorèmes qui ne sont pas les mêmes que ceux d’Euclide. Par exemple, il y a encore des triangles rectangles mais le théorème de Pythagore a changé... Qu’on ne s’y trompe pas ; cela ne veut pas dire que le théorème de Pythagore qu’on apprend au collège n’est pas vrai ; cela veut dire qu’il est vrai dans un espace euclidien et que c’est un autre théorème qui est vrai dans un espace non-euclidien : il n’y a aucune contradiction. Cette « nouvelle géométrie » s’appelle parfois « non-euclidienne », parfois « hyperbolique », parfois « de Lobatchevsky »...

Mais tout ceci gardait un caractère « suspect » et son « existence » était mise en doute. Les choses se sont clarifiées tout au long du dix-neuvième siècle. Comme toujours, il a fallu du temps et le travail de beaucoup de mathématiciens, mais on a fini par comprendre que si on acceptait la géométrie d’Euclide, on était bien forcé d’accepter aussi l’autre. Voici l’un des « modèles » utilisés, qu’on appelle souvent le modèle de Cayley. Considérez un disque dans le plan (euclidien) et oubliez tous les points qui ne sont pas dans ce disque. Seuls les points intérieurs au disque nous intéressent. Considérons deux d’entre eux, $A$ et $B$, joignons les par une droite, et considérons les points $X$ et $Y$ où cette droite coupe le cercle. Maintenant, définissons la « distance non euclidienne entre les points $A$ et $B$ » par la formule magique suivante (ne vous inquiétez pas si vous ne savez pas trop ce qu’est un logarithme, ce n’est pas essentiel pour la suite) :

\[ distance_{non eucl}(A,B)= \log \left( \frac{XB.YA}{XA.YB} \right) \]

dans laquelle $XB,YA$ etc. désignent les distance euclidiennes « habituelles » entre les points.

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Eh bien, on peut imaginer des habitants fictifs (des mathématiciens ?) de l’intérieur du disque qui ne connaîtraient rien à l’extérieur du disque, qui ne connaîtraient rien à la géométrie euclidienne, mais qui apprendraient à leurs enfants qu’entre deux points il y a une certaine distance (qu’ils n’appelleraient pas non-euclidienne puisqu’ils ne connaîtraient pas Euclide ;-) Ces habitants auraient un Ministère de l’éducation nationale qui écrirait des programmes scolaires avec des théorèmes en complète contradiction avec ceux de notre monde euclidien [2] ! Il est d’ailleurs « évident » que par un point pris hors d’une droite, on peut mener une infinité de parallèles. Regardez sur cette figure : les quatre droites qu’on voit passer par le point $P$ sont parallèles à la droite $D$ n’est-ce pas ? Si vous pensiez qu’elles coupent $D$, je vous répondrais qu’elles se coupent hors du disque et que l’extérieur du disque n’existe pas dans mon monde. Si on accepte la géométrie d’Euclide, on est bien obligé d’accepter la non-euclidienne du même coup.

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Pour en savoir un peu plus sur cette nouvelle géométrie, vous pouvez lire cet article de Images des Maths.

Les espaces métriques

A partir du début du vingtième siècle, le concept d’espace métrique a fait son apparition. On dit qu’un ensemble $E$ est un espace métrique (notez le « un » qui laisse entendre qu’il y a beaucoup d’espaces  : une évidence aujourd’hui et une hérésie il y a peu) si on peut définir pour chaque paire d’éléments $x,y$ de $E$ (qu’on appelle bien sûr des « points ») un nombre $d_E(x,y)$ qu’on appelle la distance entre $x$ et $y$. On demande que ce nombre soit positif ou nul (la moindre des choses pour une distance) mais aussi qu’il vérifie quelques propriétés (qu’on appelle parfois des axiomes mais le mot perd de son sens au fil du temps... « axiome » ou « définition » ? pas clair...).

  • On a $d_E(x,y)=d_E(y,x)$ pour tout $x,y$. (N’hésitez pas à protester : parfois c’est plus difficile d’aller d’un point à un autre que dans l’autre sens... par exemple s’il s’agit de suivre un chemin en montagne. Mais, nous utiliserons quand même cette hypothèse-axiome-définition).
  • $d_E(x,y)=0$ si et seulement si $x=y$ (eh oui, les matheux ne peuvent s’empêcher de prononcer ce genre d’incantation « si et seulement si » qu’ils aiment abréger en écrivant ssi). Nous sommes d’accord : deux points à distance nulle sont en fait un seul et même point...
  • L’inégalité du triangle est satisfaite. Cela signifie que si $x,y,z$ sont trois points, on a $d(x,z) \leq d(x,y) + d(y,z)$ : pour aller de $x$ à $z$ en passant par $y$, le chemin est plus long que si on n’est pas obligé de passer par $y$.
    Evident ? La plupart des mathématiciens sont époustouflés par l’usage que Misha Gromov a pu faire d’un axiome aussi anodin.

Des exemples ?

Aujourd’hui, c’est presque une évidence pour la plupart des étudiants en maths : il y a beaucoup d’espaces métriques. Il y a à peine deux siècles, on n’en connaissait qu’un seul : le nôtre, ou tout au moins celui qu’Euclide nous avait présenté comme étant le nôtre. Alors, quelques exemples quand même :

  • Le plan non-euclidien. Nous l’avons déjà rencontré : c’est l’intérieur du disque avec une distance donnée par cette formule sortie d’on ne sait où...
  • La sphère. Après tout, nous vivons sur la Terre. De la même manière que nous avons imaginé un peuple qui ignore l’extérieur d’un disque, la majorité d’entre nous (à commencer par moi-même) ignore tout ce qui ne se situe pas sur Terre. La distance entre deux points sur Terre est la longueur du plus court chemin qui les joint, en restant sur Terre bien sûr. Quiconque a observé les routes suivies par un avion qui traverse l’Atlantique comprendra que la géométrie sur Terre n’est pas tout à fait la même que la géométrie euclidienne.
  • La population de la Terre : Pensons à tous les hommes et les femmes qui vivent actuellement ou qui on vécu dans le passé. Voilà notre ensemble $E$. Disons que la distance entre deux personnes est le chemin le plus court qui les joint dans l’arbre généalogique. La distance entre un père ou une mère et son fils ou sa fille est de une unité. Généralement, la distance entre deux personnes est la longueur du plus court chemin qui les lie par des maillons père/mère $\rightarrow$ fils/fille. La distance entre mon neveu et moi est de 3 puisqu’il faut remonter à mon père puis redescendre à ma sœur puis ensuite à son fils. Voilà un espace métrique dont on aimerait comprendre la géométrie.
  • Internet : L’ensemble $E$ est celui des pages internet sur la planète, et la distance est égale à 1 si on passe de l’une à l’autre en un clic, à 2 s’il faut passer par une page intermédiaire etc. Notez ici qu’on n’a pas forcément envie d’une distance symétrique : parfois il est facile de passer d’une page à une autre mais la réciproque n’est pas vraie... Mais on pourrait penser à tant d’autres réseaux de communications : Facebook par exemple : quelle est la chaîne d’amis la plus courte qui joint deux personnes ? etc.
  • La SNCF : L’ensemble $E$ est le territoire français. L’un de ses points s’appelle Paris. On calcule la distance-SNCF entre deux points $A$ et $B$ de la façon suivante. Si la droite $(AB)$ ne passe pas par Paris, la distance-SNCF entre $A$ et $B$ est la somme des distances usuelles de $A$ et $B$ à Paris. Si par contre $(AB)$ passe par Paris, la distance-SNCF est la distance usuelle (euclidienne) entre $A$ et $B$.

Inutile de continuer la liste, tant les exemples pourraient être nombreux. La géométrie des espaces métriques est devenue un thème central en mathématiques, dans la première moitié du vingtième siècle.

Les espaces hyperboliques

Venons-en à Misha Gromov, à l’honneur avec le prix Abel 2009 (voir le dossier qui lui est consacré sur Images des Mathématiques). Comme beaucoup de mathématiciens de sa génération, il est fasciné par la géométrie non-euclidienne. Mais ce qui le frappe avant tout, ce sont les propriétés qualitatives de cette géométrie étonnante. Il constate une espèce de « stabilité » que je vais essayer d’expliquer. Peu à peu, probablement à partir du début des années 70, il engrange un certain nombre de propriétés satisfaites par la géométrie non euclidienne ; il les compare, cherche à comprendre celles qui sont importantes et celles qui sont accessoires, et il finit par dégager un concept fondamental : celui d’espace métrique hyperbolique (fréquemment on ajoute — « au sens de Gromov » — car les mathématiciens ont une fâcheuse tendance à qualifier d’hyperbolique à peu près n’importe quoi). Le processus est long. Le texte de sa conférence [3] au congrès international de Varsovie en 1983 [4] contient déjà les idées majeures, encore un peu confuses. En 1987, son livre sur les groupes hyperboliques [5] paraît. On peut dire près d’un quart de siècle plus tard que ce livre est merveilleux. Et pourtant, il n’était pas facile à lire. On a reproché à la rédaction un certain manque de détails, mais on peut l’excuser dans un livre qui se veut une analyse qualitative de la géométrie. En tous les cas, je peux témoigner que j’ai énormément appris en bataillant avec ce livre, souvent exaspérant.

Une parenthèse : le style

Une parenthèse s’impose. Le style de Gromov est unique, inimitable, bien loin des standards mathématiques... Le texte est toujours difficile, irritant, souvent sans précision, mais va toujours à l’essentiel et il est d’une densité incroyable. Les démonstrations ne sont souvent que des esquisses, elles sont parfois « un peu fausses » mais elles contiennent toujours des idées merveilleuses.

Le mieux est peut-être tout simplement de recopier les premières lignes d’un article "Spaces and questions,
GAFA, Geom. Funct. Anal., Special Volume (2000), 118-161"

§ I. Dawn of Space.

Our Euclidean intuition, probably, inherited from ancient primates, might have
grown out of the first seeds of space in the motor control systems of early animals
who were brought up to sea and then to land by the Cambrian explosion half
a billion years ago. Primates’ brain had been lingering for 30-40 million years.
Suddenly, in a flash of one million years, it exploded into growth under relentless
pressure of the sexual-social competition and sprouted a massive neocortex (70
% neurons in humans) with an inexplicable capability for language, sequential
reasoning and generation of mathematical ideas. Then Man came and laid down
the space on papyrus in a string of axioms, lemmas and theorems around 300
B.C. in Alexandria.
Projected to words, brain’s space began to evolve by dropping, modifying
and generalizing its axioms. First fell the Parallel Postulate : Gauss, Schweikart,
Lobachevski-, Bolyai (who else ?) came to the conclusion that there is a unique
non-trivial one-parameter deformation of the metric on R3 keeping the space
fully homogeneous.—

etc. [6].

Fin de la parenthèse. Pour la suite, voir ici.

Une définition

Il est temps de donner des définitions précises. Gromov part probablement de l’observation étonnante suivante. Dans un triangle en géométrie non-euclidienne, le rayon du cercle inscrit ne peut pas dépasser une certaine valeur maximale. Incroyable car ceci est bien sûr complètement faux chez Euclide : prenez un grand triangle équilatéral et son cercle inscrit sera grand. En géométrie non-euclidienne, même si les côtés d’un triangle sont gigantesques, il y a un point (le centre du cercle inscrit) qui n’est pas bien loin de chacun des trois côtés.

Commençons par une définition qui n’est en fait pas essentielle mais qui nous permettra de parler des côtés d’un triangle. Un espace métrique $E$ est appelé géodésique si chaque fois qu’on se donne deux points $x$ et $y$, on peut les joindre par ce qu’on a envie d’appeler un « segment » $xy$, c’est-à-dire une courbe $x(t)$ qui joint les deux points $x,y$ décrite par un paramètre $t$ variant entre $0$ et la distance $d_E(x,y)$ et qui est telle que la distance entre $x(t)$ et $ x(s)$ est $\vert s-t \vert$. Cela pour dire simplement qu’on a joint $x$ et $y$ par un segment de la bonne longueur. Ainsi, chaque fois qu’on a trois points $x,y,z$, on peut « tracer » les trois côtés $xy$, $yz$ et $zx$.

Définition : Soit $\delta \geq 0$ un nombre réel (la lettre grecque « delta » est devenue traditionnelle). On dit qu’un espace métrique géodésique $E$ est $\delta$-hyperbolique si pour tout triangle $x,y,z$, on peut trouver un point $c$ qui est à une distance moindre que $\delta$ de chacun des trois côtés du triangle $x,y,z$.
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Deux exemples et un (tout petit) théorème de Gromov

Bien sûr, le jeu n’aurait aucun intérêt si le plan non-euclidien de Bolyai-Lobatchevsky-Gauss n’était pas $\delta$-hyperbolique (pour une certaine valeur de $\delta$).

Voici un arbre.

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Ceci est un arbre.

Il contient un certain nombre de sommets dont certains sont reliés par des arêtes. On réserve le qualificatif d’arbre si le réseau ainsi constitué n’a pas de circuit fermé. Par exemple, ceci n’est pas un arbre.

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Ceci n’est pas un arbre.

Pour chaque arête d’un arbre, choisissons une longueur, de notre choix. Alors, on peut considérer l’arbre comme un espace métrique géodésique. La distance entre deux points est simplement la longueur du plus court chemin qui les joint. On parle alors d’un arbre métrique. Comment sont constitués les triangles dans un arbre ? La figure ci-dessous montre que dans un arbre, tous les triangles ont une propriété bien particulière : il existe toujours un point commun aux trois côtés ! D’une certaine façon, on pourrait dire que le cercle inscrit est de rayon nul. En tous cas, il devrait être clair que les arbres sont des espaces métriques $0$-hyperboliques. On parle plutôt de tripode que de triangle.

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Le théorème qui suit n’est pas le plus difficile démontré par Gromov, de loin ! Sa preuve ne prend que quelques lignes dans l’un de ses nombreux livres et je suis sûr qu’il n’y accorde lui-même qu’un intérêt modéré. Je le présente cependant puisqu’il est assez typique de l’approche « qualitative » de la géométrie de Gromov, mais aussi puisque — qui sait — le lecteur pourra peut-être le démontrer tout seul ? Il y a en effet beaucoup de sortes de théorèmes. Certains d’entre eux ont un énoncé plus ou moins « banal » et la difficulté est de les démontrer, ce qui n’est pas toujours facile. D’autres sont au contraire assez faciles à démontrer et la difficulté principale pour leur auteur a été de trouver le bon énoncé, celui qui est le plus pertinent.

Théorème : Soit $(E,d_E)$ un espace métrique géodésique $\delta$-hyperbolique et soit $(x_1, ..., x_n)$ une collection de $n$ points dans $E$. Alors on peut construire un arbre métrique $A$ avec sa distance $d_A$ et $n$ points dans $A$ notés $(y_1, ..., y_n)$ tels que les distances dans $A$ et dans $E$ sont « presque » les mêmes. Plus précisément, cela signifie que les distances $d_E(x_i,x_j)$ et $d_A(y_i,y_j)$ diffèrent par au plus $100 \delta \log(n)$.

Quelques remarques. Ce théorème d’approximation par les arbres n’est pas bien difficile mais il donne une véritable intuition de la géométrie hyperbolique. Si vous voulez comprendre la géométrie non euclidienne, regardez les arbres et vous aurez au moins une compréhension qualitative. Pourquoi qualitatif ? Parce qu’on étudie les distances entre les points en s’autorisant une « incertitude » ou une « erreur » de l’ordre d’une centaine de $\delta$ : le but n’est pas d’avoir des mesures précises mais des « ordres de grandeur ». « Coarse geometry » comme dit Gromov : la géométrie « grossière ».

Notez aussi le $100 \delta$ dans l’énoncé. Le théorème est probablement vrai en remplaçant le $100$ par $99$ mais ce n’est pas le style de Gromov de chercher les meilleures constantes. Dans son livre, on voit de-ci de-là des constantes un peu fantaisistes (mais rarement fausses) du genre $10000 \delta$... Dans d’autres articles, Gromov n’a pas hésité à utiliser des constantes dont les valeurs numériques sont absolument gigantesques.

A quoi bon ?

Ceci n’aurait qu’un intérêt modéré si les deux conditions suivantes n’étaient pas réalisées :

  • D’abord, on dispose d’une excellente compréhension des espaces $\delta$-hyperboliques. Le livre de Gromov, certains de ses articles ultérieurs, et d’autres travaux, ont montré toute la richesse des ces espaces. On peut avoir autant de plaisir « à faire de la géométrie » dans ces espaces qu’on peut en avoir dans le « petit espace euclidien ». Beaucoup de théorèmes généraux.
  • Mais surtout, les espaces $\delta$-hyperboliques abondent, et c’est avant tout ce qui en fait l’intérêt. Nous avons vu les arbres (généalogiques par exemple) mais aussi le plan non-euclidien. Dans un certain sens on peut penser que « presque tous les espaces » sont $\delta$ hyperboliques. On trouve des exemples en provenance de l’arithmétique, mais aussi de la théorie des groupes. Gromov y voit même, dès 1990, une interprétation possible de certains processus de croissance en biologie.
    Une certaine catégorie de groupes, introduite dans les années 60 sous le nom de « groupes à petite simpification » s’est soudainement éclairée grâce à ce point de vue géométrique. La géométrie au secours de l’algèbre en quelque sorte. Misha Gromov a ainsi dégagé un concept fondamental de « groupe hyperbolique » dont la compréhension est avant tout géométrique. Mais bien sûr, allier groupes et géométries n’est certainement pas une nouveauté en mathématiques. Beaucoup plus récemment, Gromov a même introduit des arguments de la théorie des probabilités dans son approche géométrique ; il a montré que si on « tire un groupe au hasard » il y a de fortes chances qu’il soit hyperbolique...

Les phrases précédentes sont trop vagues et sont probablement incompréhensibles, mais j’espère que le lecteur pourra mesurer le chemin parcouru depuis les timides intuitions du début du dix-neuvième siècle. Les géométries non-euclidiennes, après une période pendant laquelle elles étaient suspectées de ne pas exister (début dix-neuvième), ont été tolérées (au début vingtième), puis reconnues comme constituant l’immense majorité des espaces, en bonne partie grâce à Misha Gromov. Il faut bien sûr s’empresser d’ajouter que Gromov serait le premier à clamer qu’il n’est pas le seul à avoir développé ce point de vue et qu’il faudrait citer beaucoup d’autres noms : même les plus grands sont rarement seuls...

Retour sur Gauss

Le 12 juillet 1831, Gauss écrivait une lettre à son ami Schumacher à propos de la géométrie non-euclidienne. En voici une traduction française [7].

Incroyable ! Gauss explique que les triangles dans la géométrie non-euclidienne ont une allure différente des triangles euclidiens. Il explique même « qu’à la limite » ils deviennent des triangles comme dans les arbres. Gauss avait donc également une approche « qualitative » de la géométrie ? Cent cinquante ans avant Gromov ? Bien sûr, Gauss n’a pas développé une véritable théorie « qualitative » de la géométrie comme Gromov a su le faire. Je pense que Gromov n’a jamais vu cette lettre de Gauss mais je suis convaincu qu’il serait fier d’apprendre que son chemin a rencontré celui de Gauss.

Article édité par Étienne Ghys

Notes

[1Euclide, Les éléments : téléchargeable par exemple ici.

[2les ministres de notre monde écrivent plutôt des programmes sans théorèmes... Voir le billet récent de Valerio Vassallo.

[3Infinite groups as geometric objects,
Proc. Int. Congress Math. Warsaw 1983 1 (1984), 385-392.

[4qui aurait dû avoir lieu en 1982 et qui a été retardé pour des raisons politiques et auquel Gromov n’a d’ailleurs pas pu participer

[5Hyperbolic groups,
Essays in Group Theory, S. Gersten ed., MSRI Publications 8 (1987), 75-265
Springer.

[6En voici une traduction :

§ I. L’aube de l’espace.

Notre intuition euclidienne, probablement héritée des anciens primates, pourrait avoir trouvé son origine dans les premiers germes d’espace contenus dans le système moteur cérébral des premiers animaux, qui arrivèrent dans la mer puis sur la terre lors de l’explosion cambrienne, il y a un demi-milliard d’années. Le cerveau des primates avait végété pendant 30-40 millions d’années. Soudain, dans un éclair d’un million d’années, sa croissance s’est emballée sous la pression incessante de la compétition sociale-sexuelle, et un néocortex massif est apparu (70% de neurones) avec une aptitude inexplicable pour le langage, le raisonnement séquentiel et la production d’idées mathématiques. Alors l’Homme arriva et déposa l’espace sur du papyrus, en une suite d’axiomes, de lemmes et de théorèmes, autour de 300 avant J.-C à Alexandrie. Transformé en mots, l’espace du cerveau commença à évoluer en supprimant, modifiant et généralisant les axiomes. Le premier à tomber fut l’axiome des parallèles : Gauss, Schweikart, Lobachevski-, Bolyai (qui d’autre ?) en vinrent à la conclusion qu’il existe une unique déformation non triviale à un paramètre de l’espace qui en préserve la complète homogénéité.

[7En supplément de la traduction française du livre de Lobatchevsky, téléchargeable ici.

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Pour citer cet article :

Étienne Ghys — «Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov» — Images des Mathématiques, CNRS, 2009

Commentaire sur l'article

  • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

    le 4 mai 2009 à 13:42, par Marc JAMBON

    Une correction historique.

    Voici le texte de la 5ème demande ou axiome 10 telqu’il figure dans la référence [1] que vous proposez vous même.

    Si une droite tombant sur deux droites fait les angles intérieurs du même côté plus petits que deux droits, les deux droites prolongées à l’infini se rencontreront du côté où les angles sont plus petits que deux droits.

    Le postulat des parallèles qui traduit l’unicité de la parallèle par un point à une droite auquel vous faites allusion s’est substitué à cette 5ème demande dans des versions ultérieures des Eléments d’Euclide revues et corrigées. Selon certains mathématiciens, Il parait que le postulat des parallèles est équivalent à la 5ème demande mais ce n’est pas aussi évident, cela suppose qu’on s’appuie sur les autres axiomes et postulats et aussi qu’on complète avec des axiomes tacitement utilisés mais qui ne figurent pas, notamment des axiomes d’ordre (les angles utilisent des demi-droites donc l’ordre). De plus en logique constructive (sans tiers exclu ni raisonnement par l’absurde ) [2] la 5ème demande est un énoncé d’existence de point tandis que le postulat des parallèles est un énoncé d’unicité, en fait un énoncé négatif (négation de droites distinctes) qui peut être prouvé sans inconvénient par l’absurde ce qui ne serait pas le cas de la 5ème demande d’où la difficulté de l’implication constructive postulat des parallèles implique cinquième demande.

    [2] GÉOMÉTRIE AVEC OU SANS TIERS EXCLU ? (recherche google)

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    • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

      le 4 mai 2009 à 18:58, par Étienne Ghys

      Cher Monsieur,

      Vous avez raison sur l’énoncé précis de ce postulat. Mais en effet, il n’est pas difficile de montrer que la forme que vous citez et celle que j’ai citée —beaucoup plus habituelle — sont équivalentes si on utilise les autres axiomes (y compris ceux qui sont « implicites », comme vous le signalez à juste titre). Mon texte n’est pas un texte sur l’histoire ancienne de la géométrie mais au contraire sur la géométrie de Gromov, celle d’aujourd’hui... C’est pour cette raison que j’ai choisi cet énoncé, dont la compréhension est bien plus facile : je ne crois pas trahir la pensée d’Euclide et c’était pour la bonne cause ! Il faut bien voir par ailleurs que l’axiomatique d’Euclide est loin d’être parfaite : on est bien loin de l’axiomatique de la géométrie donnée par Hilbert, qui prend en compte les axiomes d’ordre par exemple. Mais tout cela n’était pas le but de l’article.

      Merci pour ce commentaire,

      Bien cordialement,

      Etienne Ghys

      Répondre à ce message
  • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

    le 4 mai 2009 à 14:53, par Marc JAMBON

    Distance non euclidienne dans le paragraphe La géométrie non Euclidienne.

    Correction

    Pour obtenir une distance symétrique par rapport à A et B, il faudrait écrire valeur absolue du logarithme, de plus, sans cette valeur absolue, vous risquez aussi d’avoir une distance négative.

    Inégalité triangulaire

    La preuve de l’inégalité triangulaire est loin d’être évidente. Je pense que votre distance s’interprète comme une intégrale qui se calcule par primitive (peut-être une aire) d’où le logarithme, on aimerait bien avoir cette interprétation qui rendrait plus évidente cette inégalité triangulaire.

    Répondre à ce message
    • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

      le 4 mai 2009 à 18:24, par Vincent Beffara

      Je ne comprends pas bien la première remarque : la distance ainsi définie est symétrique ! (Remarquez que si on échange $A$ et $B$ on échange du même coup $X$ et $Y$ ...)

      Répondre à ce message
      • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

        le 4 mai 2009 à 18:56, par Marc JAMBON

        Dans le texte proposé, il est sous-entendu que les points A et B sont distincts, ce qui permet de définir la droite (AB) qui coupe le cercle en deux points X et Y, il n’est pas précisé dans quel ordre on prend les points, c’est là le problème. Si on échange X et Y, on change le rapport situé dans la parenthèse sous le logarithme en son inverse, par là même la distance est mal définie, on a une définition unique lorsqu’on prend la valeur absolue du logarithme. Il semble qu’on puisse se tirer d’affaire d’une autre façon (votre interprétation) en imposant : X et Y sont dans le même ordre que A et B sur la droite, mais ce n’était pas précisé dans le texte, la parenthèse sous le logarithme peut alors s’interpréter comme un produit de deux rapports strictement supérieurs à 1. Dans ces conditions, l’échange de A et B entraine aussi effectivement l’échange de X et Y.

        La définition se prolonge par continuité pour A et B confondus, le logarithme est alors nul,c’est précisément ce qu’il faut.

        Répondre à ce message
    • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

      le 4 mai 2009 à 19:21, par Étienne Ghys

      Cher Monsieur,

      Le texte laisse en effet entendre implicitement que les points XABY sont dans cet ordre. Vous auriez peut-être raison de regretter l’implicite dans un texte mathématique. Mais je pourrais répondre de deux manières. D’abord, il ne s’agit pas d’un texte de mathématiques ! ce n’est pas le but de Images des Maths. Ce texte parle de mathématiques, tout simplement... Mais plus sérieusement, je voudrais insister ici sur le fait qu’il n’existe aucun texte mathématique, ou presque, qui ne contienne pas d’implicites. Les mathématiques sont écrites dans une langue qui peut être le français par exemple, et cette langue contient nécessairement des implicites. S’il n’y en avait pas, le texte mathématique serait incompréhensible pour un être humain or, c’est bien le but d’un texte que d’être lu, et compris, par des humains. Il me semble me souvenir que, presque par jeu, Whitehead dans ses Principia a voulu démontrer que 2+2= 4 de manière complètement déductive, à partir des axiomes. Il en résulte quelques pages abominables, qui ont l’avantage d’être correctes mais l’inconvénient d’être inaccessibles à la plupart des êtres humains... Le but de Images des maths est d’essayer de montrer une image humaine des maths ! L’art de l’écrivain en maths consiste à bien doser la quantité d’implicites en fonction de son objectif...

      Quant à l’inégalité triangulaire, certes elle n’est pas complètement évidente, mais ce n’est quand même pas bien difficile ! Dommage que je ne puisse pas insérer de figures dans un commentaire. Un petit dessin et c’est gagné... C’est Hilbert qui a compris, en faisant le petit dessin en question, qu’il n’est pas important du tout de travailler dans un disque et que l’inégalité triangulaire marche dans un convexe quelconque. On obtient ainsi un belle catégorie d’espaces métriques, bien connue des géomètres. En tous les cas, l’interprétation intégrale n’apporte pas grand chose, même si elle même naturellement au concept de métrique de Finsler.

      Mais, de la même manière que précédemment, je ne voulais pas m’appesantir sur cette formule, qui mériterait peut-être un article à elle toute seule !

      Bien cordialement,

      Etienne Ghys

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      • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

        le 6 mai 2009 à 08:05, par Marc JAMBON

        Je suis bien convaincu que l’essentiel de l’article est ce qui suit, mais pour comprendre ce qui suit, on aime bien comprendre ce qui précède.

        Le disque de Poincaré

        Je connaissais déjà l’exemple du disque de Poincaré où les géodésiques (lignes de plus courte distance dont vous parlez dans votre paragraphe définition) sont des arcs de cercle orthogonaux au cercle qui délimite le disque. J’ai une bonne compréhension du disque de Poincaré, c’est déjà çà ! La géométrie du disque de Poincaré est à ma connaissance qualifiée d’hyperbolique, je ne sais si vous êtes d’accord. En tout état de cause, il n’y a pas la moindre hyperbole en évidence dans cette géométrie.

        La géométrie non-euclidienne de votre exemple

        Elle ressemble à la géométrie du disque de Poincaré mais ses géodésiques ne sont (semble-t-il) plus des cercles, s’agit-il d’arcs d’hyperboles ? Si oui, comme votre figure (superbe) le suggère, on aurait la justification de la terminologie « géométrie hyperbolique ». Reste à savoir comment se convaincre que ces géodésiques sont bien des arcs d’hyperboles.

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        • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

          le 17 novembre 2009 à 15:30, par jacques lafontaine

          la terminologie mathématique s’est construite petit à petit, avec parfois des incohérences. « elliptique » fait allusion à ellipse, « hyperbolique » à hyperbole, mais pas toujours de façon cohérente. J’avoue ne pas savoir quand a été introduit le nom de « géométrie hyperbolique » pour la géométrie de Lobatchevski.

          Je peux donner deux raisons pour cette appellation.

          a) la trigonométrie hyperbolique (relations entre angles et cotés pour un triangle du plan de Lobatchevski) fait intervenir les fonctions « sinus et cosinus hyperboliques »
          elles mêmes appelées ainsi parce qu’elle servent à paramètrer l’hyperbole.

          b) il existe un autre modèle du plan de L, où il est représenté par une nappe d’un hyperboloïde à deux nappes. Dans ce modèle, les géodésiques sont non pas des hyperboles, mais des demi-hyperboles : ce sont les intersections des plans passant par l’origine avec la nappe de l’hyperboloïde (voir le livre de Géométrie de M. Berger).
          Ce modèle permet des calculs simples, mais on peut le trouver contre-intuitif : techniquement, le plan de L.
          est réalisé comme la sphère unité d’un espace de Minkowski
          (espace vectoriel avec une forme quadratique ++-).

          On est loin d’avoir épuisé les occurences de l’adjectif hyperbolique en mathématiques. Il y a des équations hyperbolique, une dynamique hyperbolique...

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          • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

            le 18 novembre 2009 à 00:09, par Rachid Matta MATTA

            M Étienne Ghys
            La géométrie hyperbolique est mort-née à cause de la définition arbitraire et erronée de sa parallèle hyperbolique. J’ai trouvé plus de quarante méthodes qui détectent des failles dans la géométrie hyperbolique proposée par les trois fondateurs : Lobatchevsky, Bolyai et Gauss. Tous leurs successeurs depuis 1868 et jusqu’à présent travaillent sur une géométrie inconsistante et fictive. Ils contribuent à faire échouer les réformes de l’enseignement scientifique entreprises en France et dans le monde parce que les mathématiques modernes, et surtout les géométries non-euclidiennes, sont, selon le grand savant Pierre Gilles de Gennes, le plus grand fléau de l’humanité, car elles nourrissent la raison avec des paradoxes, des fictions et des erreurs.
            En tout cas l’une de mes 10 démonstrations du cinquième postulat d’Euclide suffit pour démontrer l’unicité de la parallèle à une droite donnée dans la surface plane. Ces démonstrations ont été envoyées en 2007 par l’Ambassade de France au Liban (comme me l’a confirmé S. E. M Bernard ÉMIÉ, Ambassadeur de France en exercice à l’époque) à l’Académie des Sciences dont vous êtes un digne membre.
            La méthode d’IBN AL-HAITHAM peut suffire pour démontrer le cinquième postulat d’Euclide. Je vous invite à l’examiner sur mon site www.mathtruth-rachidmatta.com et à engager le débat scientifique du millénaire. Je suis prêt, aussi, à engager le débat sur votre site personnel si vous le permettez. Nous parlerons du quadrilatère fondamental, attribué injustement à Saccheri. Ce quadrilatère a fait trébucher Saccheri et tous ses successeurs, alors que la détection des failles dans les hypothèses de l’angle aigu ou obtus est très facile, mais à condition de comprendre la nature de la ligne droite que Dieu m’a permis de lui donner la véritable définition.
            Le triangle de Gauss et le disque de Klein et celui de Poincaré n’ont plus aucune raison d’être, et il ne faut pas être un spécialiste en géométrie pour savoir que les modèles proposés par Beltrami, Klein et notre grand savant Henri Poincaré sont illogiques, car les géométries non-euclidiennes contredisent la géométrie d’Euclide, et par conséquent, elles ne peuvent lui emprunter ses lignes. Toutes les lignes de la géométrie euclidienne sont engendrées par l’utilisation du cinquième postulat d’Euclide.
            Mon appel du premier octobre 2009 vous a été adressé ainsi qu’aux grands mathématiciens contemporains et aux membres de l’Académie des Sciences dans le but de rétablir la vérité de la géométrie euclidienne, qui seule permet d’avoir une mathématique exacte.
            Amicalement
            Rachid Matta MATTA
            Le 18 novembre 2009

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  • Les triangles d’Euclide, de Gauss et de Gromov

    le 13 septembre 2014 à 09:11, par Mateo_13

    Bonjour M. Ghys,

    merci pour votre article.

    Pour information, à destination des enseignants, une axiomatique sous le théorème de Pythagore vient d’être publiée en accès libre :

    http://mathemagique-com.blogspot.fr/2014/09/special-profs-une-plongee-sous-le.html

    Cordialement,
    — 
    Mateo.

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Cet article fait partie du dossier «Le théorème de Pythagore» voir le dossier
Cet article fait partie du dossier «Mikhaïl Gromov, géomètre» voir le dossier