Rediffusion d’un article publié en 2013
Quelques rayons de soleil
Piste verte Le 21 avril 2020 Voir les commentaires (8)Lire l'article en


Le soleil émet des rayons lumineux qui parcourent l’espace en ligne droite, certains venant frapper la Terre pour l’illuminer. Comment cette famille de rayons lumineux nous parvient-elle ?
« Dessinez-moi un paysage » demande la maîtresse. Voici un résultat possible en logo de cet article. Ce qui nous intéresse ici, c’est le soleil, ses rayons, et comment ces derniers arrivent sur Terre.
Des rayons presque parallèles
Heureusement, les enfants vont à l’école un peu au-delà du primaire et, ce faisant, découvrent le monde tel qu’il est. Ils apprennent en particulier que les rayons du soleil arrivent sur Terre presque parallèles entre eux, car le diamètre de la Terre et celui du soleil sont beaucoup plus petits que la distance Terre-soleil. Ils sont même un jour capables de le démontrer.
La distance de notre astre à notre planète est égale à 149 600 000 kilomètres environ.
Le diamètre du soleil vaut à peu près 1 391 000 kilomètres [1].
En mettant bout à bout 107 « soleils », on peut donc joindre notre étoile à la Terre. La Terre, elle, est toute petite : 12742 kilomètres de diamètre. Il faut donc accoler 109 « Terres » pour obtenir le diamètre solaire. Pour remettre tout cela à notre échelle, considérons une Terre d’un millimètre ; le soleil mesure 109 fois plus, soit presque 11 centimètres et doit être représenté à 11 mètres et 74 centimètres de la Terre. On peut placer Terre et soleil dans notre jardin : une boule d’un millimètre à un bout et une autre de 11 centimètres à environ 12 mètres de là. Chacun des rayons du soleil illuminant la Terre peut maintenant être représenté par une corde fine tendue entre ces deux sphères. Les cordes ne sont pas toutes parallèles entre elles, mais elles s’éloignent peu les unes des autres ; au plus 11 centimètres d’écart après un parcours de 11,74 mètres, soit une erreur de moins de un pour cent.
Les rayons solaires arrivant directement sur Terre sont presque parallèles, le défaut de parallélisme étant inférieur à un pour cent. [2]
Et la réalité crue
Mais, un jour, on lève les yeux par inadvertance et l’on comprend pourquoi il nous était interdit de regarder vers le soleil. C’était pour nous cacher ceci :

Pas très parallèles ces rayons. À la poubelle la démonstration, les ordres de grandeur, les angles et les pourcentages. À moins qu’une illusion d’optique nous trompe ? Que penser ? Qui croire ?
Explications
A priori, on ne remet pas en cause un énoncé bien démontré. Au risque, parfois, de ne plus en croire ses yeux. L’énoncé obtenu ci-dessus nous apprend que, lorsque des rayons lumineux arrivent directement du soleil, ils sont (presque) parallèles. Notre expérience visuelle, qui semble en contradiction avec ce théorème, nous laisse deux options :
- Option 1.--- Les rayons de l’image ci-dessus ne sont pas parallèles, mais c’est parce qu’ils ne viennent pas directement du soleil.
Un phénomène explicatif pourrait être le suivant. Les rayons lumineux sont émis par le soleil et arrivent, parallèles entre eux, jusqu’au nuage. En son sein, les rayons sont réfléchis par les gouttelettes microscopiques qui forment le nuage : celles-ci jouent le rôle de petits miroirs orientés dans toutes les directions possibles ; après plusieurs rebonds, la lumière ressort du nuage dans toutes les directions. Ainsi, les rayons ne nous proviennent pas directement du soleil. C’est comme si la source lumineuse était maintenant interne au nuage, donc très proche de nous, si bien que l’énoncé démontré ci-dessus ne s’applique pas.
Convaincant ? En fait, pas du tout, et c’est la seconde option qui fournit la bonne explication :
- Option 2.--- Les rayons de la photographie précédente sont issus directement du soleil et sont donc presque parallèles. C’est notre oeil qui nous trompe, ou plutôt notre cerveau.
Les rayons, en effet, sont tout aussi parallèles que les sillons du champ suivant :


Il s’agit tout simplement d’un effet de perspective. Les rayons ne semblent pas parallèles car ils viennent vers nous, ce qui est évident pour tout le monde, au moins depuis le 15e siècle :

La cité idéale, peinture de Piero della Francesca, maître de la perspective et de la géométrie euclidienne (quinzième siècle).
Des objets de même taille sont perçus comme plus petits lorsqu’ils sont plus
éloignés. Par exemple, les arêtes verticales des immeubles de la cité idéale
paraissent plus petites lorsqu’elles sont plus éloignées. Dans la photographie suivante,
c’est la largeur des étages qui semble rétrécir.

The Dime building (Detroit)
Les rayons de soleil que nous percevons sont des colonnes d’air fortement éclairées par le soleil qui contrastent avec les colonnes d’air voisines à l’ombre des nuages. Ces colonnes ont des bords parallèles. Leur largeur réelle est donc constante, tandis que la largeur perçue rétrécit avec la distance ; les rayons semblent donc s’approcher lorsqu’ils
atteignent les nuages. Le point de fuite de ces rayons est au soleil. Plus précisément, les prolongements des rayons que nous voyons convergent sur le disque solaire, caché par les nuages.
Pour des compléments sur la perspective vous pouvez vous rendre ici, là ou encore
ici. Bonne lecture.
Remerciements.--- Merci à Jérôme Crassous, du laboratoire de physique de Rennes, pour nous avoir signalé le site atoptics. Nous en avons tiré l’explication précédente, ainsi que quelques jolies images.
La rédaction d’Images des maths et les auteurs remercient pour leur relecture attentive,
les relecteurs dont le pseudonyme est le suivant : Flandrin, Bruno LANGLOIS, Gregoire Dubost, jmancellon et Claire Burrin.
Notes
[1] En fait, le diamètre du soleil n’est pas parfaitement bien défini, car l’essentiel du volume qu’il occupe est gazeux, si bien qu’il est difficile d’en fixer précisément les limites. De même, la distance de la Terre au soleil varie au cours de l’année, de 147 à 152 millions de kilomètres environ ; la Terre décrit en effet une ellipse proche d’un cercle (l’excentricité est faible).
[2] Pour préciser légèrement cet énoncé, on peut tracer la figure explicative suivante (qui n’est pas à l’échelle !). L’angle $\alpha$ mesure le défaut de parallélisme maximal parmi tous les rayons solaire venant frapper la Terre. Il est égal à 0,54 degrés, soit 32 minutes d’arc.

A gauche le soleil, à droite la terre. La figure n’est pas du tout à l’échelle ! Le plus grand angle formé par deux rayons atteignant la Terre est indiqué au centre de la figure (et vaudrait 0,54 degrés si le dessin était juste).
Sur cette figure, on voit la forme de l’ombre derrière la Terre. La lune est située à environ 384400 kilomètres de la Terre, et son diamètre est à peu près égal à 3475 kilomètres. À cette distance, le lecteur pourra vérifier que l’ombre de la Terre a un diamètre qui est 2 fois et demi plus grand que celui de la lune.
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Pour citer cet article :
Serge Cantat, Isabelle Cantat — «Quelques rayons de soleil» — Images des Mathématiques, CNRS, 2020
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