Revue de presse septembre 2011
El 1ro octubre 2011 Ver los comentarios (3)
Sous le regard en coin du légendaire mathématicien dont on fête le bicentenaire, retrouvez la piste d’un mathématicien non moins légendaire! Ou encore, laissez aller votre imagination à propos d’une construction extravagante ou de l’exploration de l’univers. De retour sur terre, vous pourrez réfléchir avec quelques autres mathématiciens célèbres aux différentes façons de développer ses aptitudes en mathématiques, avec ou sans machine, en Europe ou en Afrique.
Une science sexy, pas sexiste!
Halte aux préjugés, c’est le message que l’on
peut retenir de l’anecdote relatée par Le Figaro : la mise en vente de
T-shirts avec l’inscription « Allergique à l’algèbre » à destination d’une
clientèle exclusivement féminine a suscité indignation et vives
protestations aux États-Unis.
Mais attention ce débat pourrait bien être dépassé. Aujourd’hui les
mathématiques ne seraient pas une science sexiste mais... sexy !
Preuve en est, aux côtés de
«Joeystarr l’enfant sauvage du cinéma français» et d’un reportage
éloquent intitulé «faut-il brûler les bars lounge ?»,
le magazine GQ, mensuel très tendance, consacre pas moins de six pages à
l’un des mathématiciens les plus punk de l’histoire : Alexander
Grothendieck.
Plus sérieusement, GQ nous invite à travers une enquête approfondie à
découvrir «le génie secret des mathématiques». Bien que méconnu du grand
public, Grothendieck, visionnaire et bâtisseur, est en effet une véritable
légende du monde mathématique.
Si l’article se penche inévitablement sur l’aspect insolite du personnage
(antimiltarisme, écologisme radical, isolement total), il ne néglige en
rien la puissance d’une œuvre visant à «unir la capacité de la géométrie
à montrer et la puissance de l’algèbre à démontrer».
Ayant essayé sans succès de contacter celui que « ses pairs […] placent
aux côtés d’Albert Einstein », l’auteur
a tout de même recueilli le témoignage de certains d’entre eux (Claire
Voisin, Michel Demazure, Michel Raynaud,
David Ruelle…). À découvrir sans plus attendre !
Le monde à travers la logique mathématique
Âmes sensibles s’abstenir: l’enseignement classique des mathématiques aux États-Unis serait devenu totalement obsolète. Foin des groupes de transformations, des équations du second degré ou des nombres complexes, «la plupart des citoyens seraient mieux formés s’ils apprenaient comment les taux des prêts financiers sont calculés, comment l’on peut programmer les ordinateurs, ou comment comprendre les résultats statistiques des tests médicaux». Ces propos mordants recueillis par Le Monde ne manqueront pas de provoquer chez nombre de mathématiciens une légère tachycardie. Toutefois, en apprenant que leur auteur n’est autre que David Mumford, père du Red Book of Varieties and Schemes et récipiendaire de la médaille Fields en 1974 pour des travaux ô combien abstraits en géométrie algébrique, vous trouverez sans doute matière à vous interroger...
Matière à penser également, avec un autre mathématicien médaillé, Alain Connes, selon lequel il faut sortir d’une pédagogie passive car «les mathématiques, c’est d’abord agir, pas apprendre». La jeunesse américaine n’est apparemment pas la seule à peiner dans l’apprentissage des mathématiques et la réussite des chercheurs hexagonaux dans ce domaine ne semble pas se répercuter sur nos écoliers. Le Point attire votre attention sur ce problème lors d’un entretien avec Alain Connes et Stanislas Dehaene, spécialiste de psychologie cognitive expérimentale. Les deux professeurs du Collège de France se retrouvent également sur France Culture pour évoquer la puissance du langage mathématique tout comme leur goût pour cette discipline. Si l’échange prend ici un tour quelque peu philosophique, cela n’empêche pas Alain Connes de conclure, rieur : «ce qui est extraordinaire dans cette matière, c’est qu’un élève peut avoir raison contre le professeur».
Le code a changé. Chez nos voisins britanniques, c’est au tour de Marcus du Sautoy, professeur à l’université d’Oxford et auteur de La symphonie des nombres premiers, de plancher sur l’art de transmettre les mathématiques en vous proposant sa réforme des «maths modernes» (avec le soutien de son ministre, comme on vous en parlait le mois dernier). À travers une série de trois documentaires, intitulée The Code et diffusée sur la chaîne BBC Two, il poursuit le but «d’expliquer le monde à travers la logique mathématique». The Code revisite au passage le genre documentaire et traite les mathématiques de façon résolument nouvelle. Le spectateur, rendu acteur, se voit en effet invité à récolter des indices sur les comptes twitter et facebook de la série afin de résoudre des énigmes mathématiques en tout genre et d’avancer ainsi, selon WebTelevisionObserver.com, dans «l’expérience web immersive».
À propos de code, le site slate.fr le dit «tout simplement boudé»: malgré l’omniprésence de l’ordinateur, «petit à petit, les cours d’informatique ont cessé d’apprendre la programmation pour enseigner la maîtrise de logiciels de base». Et d’évoquer les possibilités pour enrayer cette tendance, notamment les langages tels que Scratch (LifeLong Kindergarten, MIT) destinés à familiariser les enfants à la programmation dès leur plus jeune âge, afin que
«l’ordinateur [soit] de nouveau perçu comme une machine à penser et à faire penser». Ceci aurait sans doute plu à
Alan Turing, précurseur de l’informatique et concepteur de la machine abstraite qui porte aujourd’hui son nom. Il se trouve que son fameux test vient d’être passé avec succès par une machine bien réelle, comme le rapporte
Le Nouvel Observateur, relayant un article de
NewScientist. Rollo Carpenter,
spécialiste de l’Intelligence Artificielle et créateur de la machine Cleverbot,
explique cependant que celle-ci a davantage «prouvé sa capacité à imiter
l’intelligence» que montré qu’elle en était elle-même dotée.
Le malheureux Turing était également à l’honneur dans l’émission Sur les épaules de Darwin sur France Inter en ce mois de septembre, pour ses équations décrivant l’émergence de formes remarquables lors du développement embryonnaire (question
antérieurement considérée par Darwin comme la plus intéressante de
l’histoire naturelle).
Image réelle, image calculée, on a pu retrouver ce thème sur le petit écran,
avec l’intervention d’Yves Meyer sur la chaîne KTO. Le récipiendaire du prix Gauss 2010 [1] nous
explique comment «le calcul», ou encore «l’intelligence», a permis de «débruiter» l’image du jet extragalactique du quasar 3C273 fournie par le téléscope spatial Hubble. La ressemblance avec l’image fournie plus tard par «l’appareil enfin corrigé» est stupéfiante.
- Jet extragalactique du quasar 3C273
- A gauche: image transmise par Hubble `myope’. Au centre: image calculée à partir de méthodes mathématiques. A droite: image transmise par Hubble corrigé.
La chaîne catholique nous a également offert une longue entrevue avec le très cathodique mathématien Cédric Villani. Dans une atmosphère intimiste, il parle tour à tour de ses découvertes mathématiques bien sûr, mais aussi d’humour, de dieu, d’avenir ou encore de son engagement pour le développement de la discipline en Afrique.
Les mathématiques à travers le monde
Un gros zoom sur les maths africaines à l’occasion de l’inauguration de l’Institut africain des sciences mathématiques (AIMS pour l’acronyme anglophone) à Mbour par le ministre Sénégalais de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Amadou Tidiane Bâ. Le projet est pour le moins alléchant et ambitieux. Selon l’Agence de Presse Sénégalaise et Le Soleil, il s’agit de «freiner la fuite des cerveaux» et de parier sur l’excellence: «le centre va bâtir sa marque sur l’intervention des mathématiciens de renom, des Médaillés Fields comme Claude Cohen Tannoudji [2], Cédric Villani, Jean Christophe Yoccoz». Plusieurs universités françaises
(Paris 6, 7 et 11) et canadiennes lui ont déjà apporté leur soutien.
La formation dispensée y sera de niveau Master, avec «la possibilité de poursuivre une thèse en sciences mathématiques ». Le quotidien sénégalais Wal Fadjr nous détaille la première promotion: trente cinq étudiants représentant quatorze nationalités africaines, où le « Sénégal se taille la part du lion avec huit étudiants suivi du Cameroun avec quatre étudiants». Il s’agit en fait du deuxième centre AIMS après celui de Cape Town en Afrique du Sud, et l’ouverture à moyen terme d’une quinzaine de centres serait planifiée, dont AIMS-Ghana en 2012. À suivre donc...
Ce mois-ci nous rappelle par ailleurs l’importance des mathématiques en architecture. Chez nos voisins belges, un article de vulgarisation par le mathématicien Dirk Huylebrouck dans EOS est repris par le site de la RTBF. Il s’avère que l’ascenseur à bateaux permettant de compenser «une différence de niveau de 68 mètres sur le canal de Bruxelles-Charleroi» souffre d’une erreur de conception basique «engendrant une usure excessive». En effet, «les ressorts situés sous le bac ont été placés perpendiculairement à la surface terrestre et non par rapport à l’inclinaison». L’article fait le parallèle avec un skieur sur un remonte pente, qui doit être perpendiculaire à la pente pour rester stable. Le problème connu et signalé en fait depuis 1977 ne sera sans doute pas corrigé car l’ascenseur n’est que peu utilisé.
Ce sont des problèmes de plus grande ampleur que rencontre
la Tour ArcelorMittal à Londres, «projet architectural phare pour les JO de 2012» selon le site
UrbaNews, accusé d’être
«un gouffre financier, du Meccano sous crack» voire une «“pipe à bulles”» comme le rapporte Courrier International. Reprenant
un article de The independent, l’hebdomadaire souligne néanmoins que «ce prodige de géométrie trouve des défenseurs» au sein de «la communauté scientifique». Qualifiée de «merveille des mathématiques» par le magazine New Scientist, la tour métallique qui «“tourne, tourne et tourne tout en restant stable”» selon ses concepteurs, «a nécessité [...] des formules mathématiques complexes afin de calculer l’effet de la gravité et du vent sur l’intégrité de la structure».
Inné ou (mal) acquis?
Le don pour les mathématiques serait antérieur à l’apprentissage, donc
inné! C’est ce que tend à montrer une étude publiée par une équipe de psychologues de l’université John Hopkins à Baltimore auprès d’enfants de quatre ans, et mentionnée dans Les
Échos. Mais si cette enquête
révèle que certains enfants ont une relation privilégiée avec les nombres,
l’évolution de ce lien inné vers une véritable vocation reste à démontrer.
Quant aux différences éventuelles constatées entre hommes et femmes pour
les aptitudes spatiales comme la géométrie, elles résulteraient fortement
de la culture et de l’éducation. C’est en effet la conclusion d’une
enquête relayée par Sciences et Avenir et menée en Inde par trois chercheurs américains auprès de deux
tribus voisines. Il reste que les jeunes filles affichant une vocation pour les
mathématiques ne sont pas si nombreuses. Ouest
France s’intéresse à Sarah, dix-neuf ans, en classes préparatoires à Quimper, qui
exprime son goût pour cette science : « En fait, je suis une étudiante
comme les autres, sauf que pour moi, faire des maths, c’est comme faire du
sport ». Ceci n’est pas sans rappeler les métaphores de Michelle Schatzman sur ce site lorsqu’elle décrivait sa vie de mathématicienne: «transpire[r] à grosses gouttes», «grimper sur une falaise», ...
Feu sur les sondeurs! La statistique ne serait pas une science bien acquise.
Le mathématicien Jean-Louis Bon et le politiste Vincent Tiberj, attaquent dans le Nouvel Observateur les instituts de sondage qui osent établir des pronostics au sujet des prochaines primaires socialistes. Outre les très grandes incertitudes concernant les éventuels votants, c’est surtout la trop faible quantité de sondés qui est en cause : «Prévoir le résultat des primaires socialistes, première expérience du genre, à partir d’effectifs aussi faibles, revient en quelque sorte à lancer un camion de trois tonnes sur un pont dont on a évalué qu’il pouvait supporter entre 1 et 4 tonnes.» Moins allégorique et plus saignant : «cela signifie que le score de François Hollande a 95% de chances de se situer entre 37% et 51%, celui de Martine Aubry entre 23% et 37% et celui de Ségolène Royal entre 6% et 20%. Au sein de ces différentes fourchettes, il n’y a aucune raison de privilégier une valeur plutôt qu’une autre.» Pan !
Parutions
Le bicentenaire de la naissance d’Évariste Galois, né le 25 octobre 1811, sera marqué par de multiples manifestations. Plusieurs articles sont consacrés à l’événement, tant dans les revues mathématiques que dans les médias de grande diffusion.
De Galois aux corps finis : Le numéro d’octobre de Pour la Science, sous-titré «L’héritage de Galois, des équations et des courbes pour la cryptographie», consacre sa une et la rubrique «mathématiques» à l’impact des travaux de ce «génie malheureux» qui a tant marqué les mathématiques modernes. L’auteur, Antoine Chambert-Loir, balaie de larges pans des mathématiques allant «des équations polynomiales aux équations en congruences qui permettent d’introduire les corps finis» pour terminer par l’une des «applications de la théorie des corps finis, le cryptage asymétrique». «Ce que l’on nomme aujourd’hui la théorie de Galois est un édifice complexe qui irrigue une grande partie des mathématiques d’aujourd’hui, de la théorie des nombres à celle des équations différentielles, en passant par la géométrie algébrique et le programme de Langlands, dont la démonstration du théorème de Fermat».
Rappelons qu’Antoine Chambert-Loir donnera un exposé grand public sur le personnage et les travaux de Galois le mardi 11 octobre 2011 à 20h30 à Rennes aux Champs Libres, en salle de conférences Hubert Curien.
La Recherche nous livre ce mois-ci une interview de Caroline Ehrhardt intitulée L’héritage vivant d’Évariste Galois, qui nous rappelle qu’Évariste Galois «est aussi l’un des mathématiciens qui a le plus inspiré ses successeurs».
Caroline Ehrhardt a publié par ailleurs un article (Le bicentenaire d’Evariste Galois (1811-1832)) dans le numéro de juillet de la Gazette de la SMF.
Elle a aussi publié sur ce site : Un concept mathématique, trois notions : Les groupes au XIXe siècle chez Galois, Cayley, Dedekind.
Dans le journal du CNRS de septembre-octobre 2011, Vahé Ter Minassian conclut son article Le bel héritage d’Évariste Galois par une incitation à «(re)découvrir la vie et l’œuvre de ce savant d’exception».
La maîtrise des nombres premiers : la rubrique mensuelle «logique et calcul» de Pour la Science s’intéresse aux nombres premiers et aux polynômes. Existe-t-il une formule polynomiale donnant les nombres premiers ? Jean-Paul Delahaye fait le point sur des recherches qui ont commencé avec Euler. L’article présente, comme d’habitude, des encarts qui précisent les point traités au fil du texte : polynôme de Jones, records de progressions arithmétiques de nombres premiers, polynômes de degré 2 et spirale d’Ulam, cribles géométriques.
Donner à voir les mathématiques. Comment représenter l’abstraction mathématique ? La rubrique «art et science» nous signale l’exposition «Mathématiques, un dépaysement soudain», présentée par la Fondation Cartier du 21 octobre 2011 au 18 mars 2012. Cette création originale, conçue en collaboration avec l’Institut des hautes études scientifiques (l’IHÉS) et placée sous le patronage de l’UNESCO, se propose de concilier l’art avec la pensée des mathématiciens. Six mathématiciens ont apporté leur concours à l’entreprise : sir Michael Atiyah, Alain Connes, Nicole El Karoui, Mikhaïl Gromov, Don Zagier et Cédric Villani.
Histoires de bulles
Le point commun des bulles de savon et de BD? Les mathématiques! Le Monde du 24 septembre titrait « Quand la science fait des bulles » et s’intéressait aux BD en rapport avec les sciences : Vue d’artiste de Francis Masse, Logicomix et ... le concours Bulles2 !
En parallèle, Libération proposait un court article sur Joseph Plateau et son étude du comportement des bulles : «Quand les parois des bulles se rencontrent, elles sont toujours quatre et les angles qu’elles forment sont toujours égaux. »
L’article «Alexander Grothendieck, Le génie secret des mathématiques» nous a été aimablement fourni par son auteur, Philippe Douroux.
Les images de jet extragalactique ont été aimablement fournies par Sylvie Roques.
L’image du projet de Tour ArcelorMittal est reproduite avec l’aimable autorisation de la société ARUP.
L’image de tétraèdre en bulles de savon est reproduite avec l’aimable autorisation de Tom Noddy et Olivier Blaise.
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Para citar este artículo:
L’équipe Actualités — «Revue de presse septembre 2011» — Images des Mathématiques, CNRS, 2011
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