Issue de la bibliothèque personnelle de Mazarin, c’est la plus ancienne bibliothèque publique de France.
Dans un précédent billet, je mentionnais la très moderne bibliothèque universitaire de Columbus aux États-Unis. Changement de décor, j’évoque aujourd’hui la bibliothèque Mazarine rattachée depuis 1945 à l’Institut de France.
Le cardinal Mazarin (1602-1661), principal ministre de Louis XIV était un grand bibliophile et sa bibliothèque personnelle fut ouverte au public dès 1643. Elle fut considérablement enrichie sous la direction de Gabriel Naudé (1600-1653) ; il en fit la bibliothèque privée la plus importante d’Europe, comptant près de 40 000 volumes dans les années 1652. Pour en assurer la pérennité, Mazarin décida de la joindre au Collège des Quatre-Nations dont il assura la fondation peu de temps avant sa mort. La construction du Collège, à Paris, en bordure du Quartier Latin et face au Louvre, dura une vingtaine d’année (1662-1682). L’aile gauche fut réservée à la bibliothèque.
Les boiseries de l’ancienne bibliothèque de Mazarin dans son hôtel parisien furent installées dans la nouvelle galerie. Rattachée en 1945 à l’Institut de France, qui occupe depuis 1805 les bâtiments de l’ancien Collège des Quatre-Nations, la Mazarine demeure aujourd’hui, plus de trois cent cinquante ans après sa fondation, une bibliothèque d’étude et de recherche, ouverte à tous, et dont la salle de lecture, soigneusement restaurée de 1968 à 1974, perpétue le décor unique d’une grande bibliothèque du XVII° siècle.
Lorsque Mazarin dut fuir Paris pendant la Fronde, sa première bibliothèque fut dispersée. Avec l’aide de François de La Poterie et à partir des « restes » de la première, Mazarin constitua une deuxième bibliothèque qu’il légua par testament au Collège des Quatre-Nations. À la Révolution française, la bibliothèque Mazarine abritait plus de 60 000 volumes (et en compte plus de 600 000 aujourd’hui 3Ça fait bien entendu beaucoup, beaucoup de livres. Mais pour vous donner une idée, sachez que la Bibliothèque Nationale de France, l’une des plus grandes du monde, abrite plus de 14 millions d’ouvrages et accroît son patrimoine de 150 000 nouveaux livres chaque année !). Sous la houlette de l’abbé Leblond, la bibliothèque Mazarine profita largement des confiscations révolutionnaires. Parmi ces plus belles pièces, on trouve un exemplaire de la fameuse bible de Gutenberg, aussi connue sous le nom de bible Mazarine.
La semaine dernière, a eu lieu à l’<lexique|mot=IHÉS> un colloque autour de la reconquête de la dynamique par la géométrie après Lagrange. [2] Le premier soir, les organisateurs ont eu l’excellente idée de proposer une visite de la Mazarine. Mais notre plus grande chance fut que la conservatrice de la bibliothèque nous avait sorti quelques très beaux ouvrages mathématiques au premier rang desquels, l’exemplaire personnel de Richelieu… des Éléments d’Euclide (dont nous parlait encore il y a quelques jours F. Acerbi ici sur ce site) ! Preuve à l’appui, le sceau du Cardinal.
Quel plaisir de tourner avec délicatesse les pages d’un tel ouvrage ! En voici une prise au hasard.
Bien sûr, on a aussi eu droit à des mémoires de Lagrange, d’Euler, de Laplace, etc. De véritables trésors à portée de main. Le tout dans un endroit somptueux. Si vous en avez la possibilité, n’hésitez pas à faire le détour : la bibliothèque Mazarine est véritablement un endroit superbe.4En plus d’être gratuite et ouverte à tous ! Plus d’infos sur ce lien.