Des maths partout !

La nature regorge d’objets mathématiques ! N’est-ce pas ?

Le 18 juin 2014  - Ecrit par  Aziz El Kacimi, François Recher, Valerio Vassallo Voir les commentaires (17)
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Les nombreux problèmes qui se posent dans l’enseignement des mathématiques ne laissent personne indifférent. Beaucoup de gens en parlent, mais peu les posent de façon concrète. C’est que le débat est déjà difficile à porter auprès de la communauté mathématique, et il l’est encore plus au niveau du public. C’est à cet effet que le site Images des Mathématiques souhaite offrir un espace de discussions ouvert à tous ceux qui se sentent touchés par ces questions. Ils pourront y échanger leurs idées, leurs points de vue et éventuellement apporter des éléments de réponse. Le débat sera « provoqué » chaque mois par la publication d’un billet portant sur un point précis, écrit par l’un des responsables de la rubrique ou par toute autre personne qui le souhaiterait.

A. El Kacimi, F. Recher, V. Vassallo

Voici un sujet à débattre avant la pause estivale. Nous nous retrouverons le 18
septembre 2014 pour de nouveaux débats ! Dans l’attente, nous vous souhaitons
d’excellentes vacances, en remerciant chaleureusement tous ceux d’entre vous qui
ont bien voulu apporter leur contribution aux débats antérieurs.

Avec un peu de chance, l’été qui va bientôt pointer son nez nous réservera de très
belles journées ensoleillées. Il y aura des jours où nous aurons l’impression que le
grand « projecteur » autour duquel cette belle planète Terre tourne incessamment,
éclairera chaque objet d’une façon tellement intense qu’il en dévoilera le moindre
détail. Nous pourrons alors avoir l’agréable impression d’y voir plus clair, mieux,
plus finement.

Lorsque nous, mathématiciens, enseignants, chercheurs, enseignants-chercheurs,
discutons avec nos amis, nos voisins, nos étudiants, nos élèves ou notre
entourage le plus proche, nous nous efforçons de leur expliquer que notre regard et
nos connaissances nous dévoilent plein de relations mathématiques sur le monde
qui nous entoure. Souvent, dans l’autre sens, les objets de notre vie quotidienne,
oeuvres de l’homme ou présents dans la nature, nous parlent presque de ce monde
des idées mathématiques bâti par des milliers de savants des siècles durant.
Notre regard de mathématiciens éclaire donc d’une façon particulière nos
vies ; nous cherchons, parfois en vain, à le partager avec les autres et
sommes souvent frustrés de nous retrouver à ressentir une solitude effrayante.

Or, si les mathématiques sont vraiment partout, pourquoi ne les voit-on pas si
facilement ? Pourquoi nos amis, nos voisins, nos étudiants, nos élèves ou
notre entourage le plus proche ont-ils tant de mal à voir ce que nous,
mathématiciens, voyons ? Pourquoi les gens sont-ils naturellement sensibles à la musique alors qu’une formule mathématique, une courbe, une surface, un carrelage
plein de symétries, bref... un bel objet mathématique met plus de temps à atteindre
le siège de nos émotions ?

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Pour citer cet article :

Aziz El Kacimi, Valerio Vassallo, François Recher — «Des maths partout !» — Images des Mathématiques, CNRS, 2014

Commentaire sur l'article

  • Des maths partout !

    le 18 juin 2014 à 16:36, par Karen Brandin

    Je suis convaincue que ce n’était pas ton intention Aziz de présenter la communauté mathématique (au sens large, des artisans aux orfèvres) comme un peuple d’élus mais cette idée émerge si souvent dans les conversations, quel que soit le support de l’échange, que c’est un petit peu troublant et cela dessert durablement la discipline, déjà fortement malmenée, qui apparaît de ce fait d’autant plus hermétique, voire élitiste.

    C’est gênant du point de vue de l’enseignement justement puisque c’est l’origine, par la suite un peu détournée, du courrier du 18. Certains élèves vont être convaincus qu’il est impossible de progresser, de s’imposer dans une discipline où tout est joué d’avance (on a été touché par la Grâce ou pas) ; avant de les aider dans l’apprentissage proprement dit des notions, il y aura donc tout un travail d’approche que l’on a pas toujours le temps de mettre en place.

    Plus nombreux sans doute, sont les élèves dans le même temps, qui vont se cacher derrière cette fatalité selon laquelle pour « vous c’est facile », alors que pour eux, c’est juste incompréhensible. Le dialogue est de ce fait rompu parce qu’il est déséquilibré. Ils ne sont pas fait pour ça comme ils (voire les parents) disent et il n’y a rien à ajouter.

    Je me rallierais plus volontiers au point de vue de Von Neumann qui disait :

    « En mathématiques, on ne comprend pas les choses, on s’y habitue » ; ensuite, on s’y habitue tellement bien parfois qu’on se les approprie et qu’on a, qu’on finit, par donner l’illusion d’en être à l’origine.
    Ce transfert, dans le cadre de l’enseignement, s’opère pour la bonne cause d’ailleurs mais il faut le garder à l’esprit.
    La plupart d’entre nous ne sommes que des passeurs ; ce n’est déjà pas si mal. ;-)

    Si je pense au nombre d’or lorsque je vois un tournesol, ce n’est pas spontané (je vais casser quelques mythes auprès de mes élèves sans doute à quelques heures de l’épreuve du bac mais il faut ce qu’il faut ...) ; c’est un résultat de mon éducation, de ce que j’ai pu m’imposer comme discipline, la vigilance que j’ai choisie de maintenir aux niveaux des objets, des idées mathématiques pour qu’elles ne me quittent pas.
    À choisir, je préférerais penser à la fleur et seulement à elle mais je n’y arrive plus.

    Les maths sont une discipline sensible au même titre que tout le reste ; les percevoir résulte d’une éducation de l’oeil, de l’esprit comme on éduque une oreille, une main.

    Ce qui est certain, c’est que les prémisses de cette éducation font partie d’un socle de connaissances que l’on peut par la suite, par goût ou dégoût, intérêt ou désintérêt, creuser ou enterrer.

    Les mathématiques sont difficiles pour presque tout le monde (j’étais vraiment ravie, touchée aussi d’entendre Cédric Villani dire à un collégien que pour lui aussi c’était compliqué, c’était un effort et pas une seconde nature bref une langue étrangère à pratiquer, à enrichir quotidiennement. C’était très important qu’il réponde ça).

    Si elles ne seront QUE difficiles pour une majorité de gens (au sens où ils n’iront pas au-delà de cette difficulté), c’est peut-être tout simplement qu’ils n’en ressentent pas le besoin, l’envie. Ce goût de l’effort, de l’effort abstrait qui plus est, n’est pas vraiment dans l’air du temps.

    J’insiste aussi sur le fait que sous un regard aimant, tout Être, toute structure inanimée peut prendre la vie qu’on veut bien lui prêter.

    Pour être très contemporaine et concrète, j’ai regardé une émission autour des futurs grands pâtissiers et le cadet de la compétition a cette remarque magnifique à un moment-clé et décisif pour lui : « J’attends pour déposer mon granité parce qu’un dessert à l’assiette, c’est vivant ». Ce jeune de 23 ans souffre réellement en voyant sa quenelle de glace de déliter dans l’assiette.
    Ce n’est pas disproportionné, ce n’est pas ridicule non plus, c’est un ressenti possible qui n’est pas le plus fréquent.
    On comprend très bien ce qu’il veut dire, on est inquiet pour lui mais est-ce que pour autant on partage son désarroi ?, pas vraiment. *

    Il n’y a pas qu’en maths donc qu’on laisse les gens, les autres parfois à l’extérieur d’une idée ; c’est le cas dans presque toutes les situations où les émotions sont exacerbées.

    On repense ce que l’on voit, ce que l’on entend sous l’éclairage de ce qui nous sécurise, ce que l’on connaît le mieux aussi puisque l’on est sans cesse à la recherche de repères, de ponts, mathématiques par exemple. Le filtre mathématique met en évidence certaines caractéristiques très riches mais il en masque d’autres ; il n’est donc pas supérieur, il est complémentaire. Choisir, c’est encore et toujours renoncer.

    À part, par exemple Alexandre Grothendieck dont la perception du monde semblait d’instinct mathématique, on est tous soumis à un mode de traduction ; il est juste, suivant l’expérience et les aptitudes bien sûr, plus ou moins efficace, rapide, douloureux etc ... Dans son cas, G. n’échappait d’ailleurs pas au mécanisme de traduction sauf qu’il avait lieu dans l’autre sens et était plutôt destiné à présenter au Monde, à déposer, à intégrer les objets dans le cadre de la réalité plutôt que de les extraire.
    Au point que même les gens qui l’ont approché de près doivent avoir eu le sentiment de ne pouvoir, au plus, que le croiser au cours d’un transfert d’idées, une apparition furtive dans le monde sensible.

    Non pas « LE » mais « Un » ton donné ... Bonnes Vacances !

    PS : * Pour la petite histoire, un des futurs desserts de ce passionné s’appellera : « Singularité » ; le pâtissier-créateur a pensé à quelque chose en donnant ce nom à son gâteau qui m’est inconnu, toi géomètre ou moi qui ait un passé en géométrie, à complètement autre chose du fait de nos sensibilités respectives et tant mieux ; la richesse culturelle vient de là.

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    • Des maths partout !

      le 19 juin 2014 à 09:55, par Aziz El Kacimi

      Bonjour Karen,

      Première chose : nous sommes trois auteurs de ce billet du débat du 18 juin. Je le précise, non pas pour partager la « culpabilité »,
      mais simplement parce que nous travaillons ensemble, et comme je dois répondre pour dissoudre certains malentendus, c’est qu’il
      faut que je le fasse pour nous tous. Mes amis François et Valerio réagiront certainement, et ils le feront chacun
      à sa façon.

      L’idée que les mathématiciens forment une « élite » ou un « peuple d’élus » n’a jamais traversé nos esprits ni au cours de la discussion
      du contenu ni sur sa rédaction. Écrire un billet pour lancer un débat sur Des maths partout ! c’était pour nous naturel mais aussi inspiré par pas mal d’expériences à des
      niveaux divers : nous sommes universitaires, nous dispensons donc des cours à des étudiants de la L1 au M2 mais nous avons
      aussi animé pléthore d’ateliers dans des établissements secondaires, des centres de formation, donné des conférences de vulgarisation
      (devant un auditoire souvent non matheux)... Le constat a toujours été le même : la manière dont un mathématicien perçoit un objet
      est différente de celle d’un non mathématicien ! Nous n’avons jamais dit que celle du premier était la meilleure !

      1. J’ai commencé à étudier (mathématiquement) les pavages en 1998 ; et c’est seulement à partir de cette date que ma façon
      de regarder les carrelages a changé : je suis devenu plus curieux, plus attentif à leur périodicité, leurs symétries... J’ai visité
      le Palais de l’Alhambra bien des années avant ; je n’ai admiré que les motifs, ce que mes yeux ont trouvé beau (en tant que citoyen $lambda $), rien d’autre. A ce moment-là,
      j’étais un « non mathématicien » : je n’y ai pas vu les 17 groupes paveurs (on raconte qu’ils y sont). Je ne faisais donc pas partie du « peuple d’élus » auquel tu as fait allusion !

      2. Il y a deux ans, j’étais à Dubaï et j’avais eu entre les mains la pièce de 50 centimes de cet Émirat. J’avais trouvé sa forme assez belle et j’ai demandé
      à un ami mathématicien s’il y voyait quelque chose ; il m’a répondu non. Qu’a-t-elle de spécial cette pièce ? Rien ! c’était juste un heptagone régulier (ça désigne les sept Émirats Arabes Unis, traités à égalité). Mais en
      la regardant, je n’ai pas pu m’empêcher de penser que celui qui l’a fabriquée, ne l’a certainement pas fait à la règle et au compas.
      Cela nous a amenés à discuter de la constructibilité des polygones réguliers, du théorème de Gauss-Wantzel et tout le tralala ! Ce mathématicien
      est-il ou n’est-il pas dans l’élite en question ? Même au sein de la communauté, on peut voir les choses différemment, mais jamais mieux que
      l’autre !

      (On peut multiplier les exemples mais je pense ces deux-là parlent suffisamment. Il y a un troisième que je réserve à la réponse au commentaire
      de Monsieur Le Chevelu.)

      Je ne suis pas d’accord avec toi quand tu dis que certains élèves vont se ranger derrière une certaine fatalité. Je ne le pense nullement. S’ils
      ont des faiblesses, c’est certainement ailleurs qu’ils les ont acquises, tu es bien placée Karen pour le savoir ! Beaucoup d’expériences que nous
      avons vécues dernièrement auprès de collégiens démontrent tout à fait le contraire.

      La phrase de Von Neuman a certainement une part de vérité mais elle est loin d’en posséder la totalité. Ni même ce qu’aurait pu dire tel ou tel autre savant, ayant existé ou existant encore ! Il faut nuancer et bien mettre en apparence les mathématiques
      dont on parle. Mais il est vrai que nous ne sommes que des passeurs, très limités d’ailleurs. Et c’est tant mieux !

      « J’insiste aussi sur le fait que sous un regard aimant, tout Être, toute structure inanimée peut prendre la vie qu’on veut bien lui prêter. »
      Tout à fait d’accord mais sans nullement renier tout ce que je viens de dire !

      Amicalement,

      Aziz

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  • Des maths partout !

    le 18 juin 2014 à 19:40, par le_cheveulu

    Madame Brandin, vous dites simplement ce que j’aurais dit plus cruement. Cette fois-ci je vais faire un effort pour retenir ma langue de vipère et ne pas provoquer les mêmes remous que sur l’article du brazuca.

    En effet monsieur El Kamici, vous faites une erreur en parlant de perception naturelle. Rien parmi nos perceptions ne sont naturelles, tout est affaire d’apprentissage. Prenons l’exemple de la musique à laquelle vous faites référence. Il faut savoir que la perception de la musique n’est pas la même pour une oreille orientale et une oreille européenne. Pour les uns certains accords paraîtrons disgracieux alors que pour les autres harmonieux. La musique nous paraît naturelle car nous baignons dans la musicalité depuis la petite enfance (on peut considérer d’ailleurs que le langage est une forme de musique), mais ses variations quant à sa perception prouvent qu’il y a un apprentissage. D’ailleurs il en va de même du langage, la preuve la plus classique étant la difficulté pour certains à reconnaître et prononcer certains sons d’une autre langue (par exemple le « r » est infernal à prononcer par un asiatique. Bref, ce qui nous paraît naturel n’est qu’une illusion liée à notre immersion dans une culture.

    Maintenant vous allez me dire, mais si les mathématiques sont partout, pourquoi ne nous paraissent-elles pas naturelles ? Pour répondre à cette question, il faut comprendre de quelles mathématiques on parle. Je pense, peut-être me contredirez vous, que les mathématiques dont vous faites référence sont les mathématiques conceptuelles car elles ne sont pas directement accessible au regard. Par exemple, un triangle n’a aucun intérêt pour qui que se soit, hormis le fait de savoir dénommer trois traits recollé les uns aux autres. Ce qui est vraiment intéressant, ce sont les théorèmes afférents aux triangles (relations entre les angles, relations entre les longueurs, etc...). Mais ces résultats pour être accessible demande une sensibilisation en avant à plusieurs choses : la logique, la manipulation d’objets, la formalisation abstraite ; tout cela demande un apprentissage.

    Maintenant lorsque vous posez la question : « pourquoi les autres ne voient-ils pas que c’est beau ? » démontrent par là même l’inconscience des mécanismes qui façonne un mathématicien. Il me semble que la bonne question à poser serait plutôt : comment éduquer à la sensibilité mathématique ?

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    • Des maths partout !

      le 19 juin 2014 à 10:38, par Aziz El Kacimi

      Bonjour,

      Si vous ne voyez pas ce qu’on entend par « perception naturelle », je n’y peux rien ! Comme vous dites, merci d’avoir retenu votre « langue de vipère » ; vous n’avez pas
      manqué de la déverser sur l’article le Brazuca. L’auteur y a tenté simplement d’expliquer à un large public un nouveau procédé permettant de confectionner le ballon de foot, et
      vous n’avez pas hésité à l’accuser de faire de la publicité aux ramasseurs de fric. (Moi, personnellement, j’y ai appris des maths et j’y ai trouvé de quoi apprendre aux autres :
      après la leçon sur les solides de Platon à mes étudiants de Master, je traitais toujours
      le passage de l’icosaèdre au ballon de foot ; si j’ai encore l’occasion de faire cela,
      je vais pouvoir leur montrer que maintenant on y arrive d’une autre façon !) Vous n’avez donc pas compris qu’il ne voyait que
      le côté scientifique de cet objet et qu’il voulait partager cela avec le plus de monde possible ? C’est la preuve que le mathématicien
      ne voit pas les choses de la même manière que certaines autres personnes. A cet effet, demandez simplement aux footballeurs s’ils savent comment
      est fait ce ballon sur lequel ils assènent les coups de pied qui leur rapportent des millions !

      Les maths, il y en a partout. Donnez-vous juste une petite peine de regarder autour de vous. Vous faites erreur en parlant ainsi
      du triangle : c’est un objet central de la géométrie plane (qu’elle soit affine, euclidienne ou autre). Les trois sommets d’un vrai
      triangle (quel qu’il soit) est un repère affine ; et si l’étude de la géométrie peut se faire par des méthodes algébriques ou
      calculatoires, c’est grâce à l’utilisation d’un tel objet. Maintenant, un triangle est vu sous des angles divers, y compris par les
      mathématiciens :

      — Celui qui ne fait que de la géométrie affine se fout complètement de sa forme : tous les triangles non dégénérés sont affinement
      les mêmes.

      — Celui qui fait de la géométrie euclidienne s’intéresse aux longueurs des côtés, aux angles, à toutes les relations qui les lient...

      — Le géomètre différentiel est embêté par une telle courbe, très gentille sur les côtés ouverts mais qui n’a pas de tangente aux sommets !

      — Le topologue se fout complètement de tout : un triangle, un cercle, une ellipse, un polygone et, de façon générale, une courbe topologique
      fermée simple...tout ce monde-là, a la même gueule pour lui !

      — Pour l’« homotpiste-algébriste » (si j’ose utiliser cette teminologie, peut-être pas standard), un triangle est aussi un cercle, toute courbe fermée simple, un plan moins un point, l’espace moins une
      droite et pire encore, ce n’est que l’espace classifiant du groupe ${\Bbb Z}$ qu’il note $B{\Bbb Z}$ (Boom !!!)

      Alors, vous comprenez, même les mathématiciens ne voient pas un triangle de la même façon ! Comment donc ne peut-on pas imaginer qu’ils ne voient pas
      les choses différemment des non mathématiciens ?

      Un proverbe anglais dit Heureusement que nous n’avons pas les mêmes goûts et les mêmes dégoûts. Si ça n’était pas le cas, nous ne pourrions jamais vivre ensemble !

      Cordialement,

      Aziz El Kacimi

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      • Des maths partout !

        le 19 juin 2014 à 14:51, par le_cheveulu

        Bonjour Monsieur El Kacimi,

        J’entend très bien la notion de perception naturelle, je récuse tout simplement son existence. Ce n’est pas la même chose.

        J’ai très bien compris que monsieur Ghis ne voyait que le côté scientifique de la chose et c’est exactement ce que je lui reproche : faire fi du monde qui l’entoure. C’est une grande spécialité des mathématiciens d’ailleurs, qui à force de vivre dans les idéalités, finissent par s’étourdir. Le mythe du mathématicien lunaire n’est pas qu’une légende.

        Visiblement vous n’avez pas saisi mon propos puisque vous parlez de la pluralité des points de vues en mathématiques. Moi ce dont je vous parle c’est l’accès à ces points de vues. Revenons sur le foot si vous voulez bien. Un enfant qui aura grandi dans une famille de footeux développera un goût pour le jeux (sauf s’il l’associe à des événements désagréables de sa vie) et éprouvera de grandes sensations à visionner un match. A l’inverse une personne qui a grandi en dehors de ce milieu là, a du mal à s’intéresser au jeu et bien souvent ne comprend pas l’engouement que cela provoque. Il faudra alors au non initié faire un effort pour aller vers ce sport, et c’est seulement à partir du moment que cet effort sera fait que peut-être naîtra l’émotion. La perception du beau en mathématiques suit les mêmes ressorts. Et donc j’en reviens à mon idée initiale : il n’y a rien de naturel dans tout cela.

        Cordialement.

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  • Des maths partout !

    le 19 juin 2014 à 02:00, par Sophie

    J’ai préparé ce que je souhaitais écrire avant de lire les deux commentaires précédents et je me rends compte que ça va devenir redondant car je vais aller, en partie, dans le même sens ; tant pis. « En partie » dans la mesure où, de mon côté, je n’ai pas ressenti, dans le billet initial, cette idée selon laquelle la « communauté mathématique » serait « un peuple d’élus » ; j’ai donc été plutôt surprise à la lecture des commentaires. Et j’ai beau relire, je ne vois pas où cela serait sous-entendu... ? (Le « naturellement sensible à la musique », je le comprends comme « rapidement sensibles à la musique. »)

    * * *

    Un regard, porté sur n’importe quel objet, que celui-ci ait un lien ou non avec les mathématiques, est comme une plongée dans la mer. Une apnée de quelques secondes, éventuellement un tuba et un masque, peuvent suffire pour voir de beaux poissons, de beaux crustacés, une belle flore sous-marine. Mais avec des bouteilles d’oxygène, on découvre d’autres espèces toutes aussi magnifiques et, surtout, on peut prendre le temps d’observer. Les millions (bon je n’en sais rien, je n’ai pas d’idée précise de l’ordre de grandeur) de personnes qui visitent chaque année l’Alhambra de Grenade (c’est l’exemple le plus flagrant au monde, non ?) se rendent bien sûr compte que ce sont les motifs géométriques et symétriques qui font la beauté des bâtiments. Seulement, il s’agit là d’un cas très particulier où cette beauté des mathématiques apparaît quasiment à la surface. Le plus souvent, elle se trouve en profondeur, cachée, et c’est ici que je rejoins les deux commentaires précédents : pour plonger avec des bouteilles d’oxygène, il faut disposer du matériel et savoir l’utiliser. Ici, les équations différentielles (qui ne sont plus enseignées ni maths ni en physique en lycée – je le rappelle tellement c’est honteux) modélisant des phénomènes physiques sont alors comparables aux perles des huîtres, n’est-ce pas ?

    * * *

    Maintenant, je me pose des questions. Pourquoi attendre des autres qu’ils plongent dans la mer des Caraïbes plutôt que dans la mer Rouge ? (J’aurais bien aimé citer la mer du Nord, mais je n’ose pas. ..) Pourquoi chercher à convaincre des personnes (je parle d’adultes, pas d’enfants ou d’ados dont la personnalité est encore en construction) non sensibles aux mathématiques de s’y intéresser ? Tout ce qui compte, c’est la beauté, non ? Est-il nécessaire qu’elle soit liée aux mathématiques ? Chacun ne peut-il pas la rechercher là où il en a envie ? Il y a pire que les goûts non partagés : il y a l’uniformisation des goûts. De toutes façons, tout spécialiste d’un domaine a sa vie éclairée d’une façon particulière selon sa spécialité. (Ce midi, à la cantine, un collègue a dit : « Alors, le Brésil est sorti hier ». Quasiment tout le monde à table a pensé à la Coupe du Monde, sans trop comprendre pourquoi puisque le Brésil n’a pas été éliminé. Sauf les profs d’histoire-géo qui ont compris qu’il s’agissait du sujet du Bac !)

    « Il faut être toujours ivre, tout est là ; c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
    Mais de quoi ? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous !
    Et si quelquefois, sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge ; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau, l’horloge, vous répondront, il est l’heure de s’enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise. »

    Il n’y a donc pas que l’ivresse des mathématiques. Mais c’est quand même dommage qu’il ne la cite pas, n’est-ce pas ?

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    • Des maths partout !

      le 19 juin 2014 à 16:48, par Aziz El Kacimi

      Bonjour,

      Au bout de ce troisième commentaire, je commence à croire que le débat du 18 va dans le bon sens ! Dans le descriptif
      nous avons bien précisé qu’il "...sera « provoqué » chaque mois par la publication d’un billet portant sur un point précis,
      écrit par l’un des responsables de la rubrique ou par toute autre personne qui le souhaiterait
      ." Nous n’avons jamais
      dit que nous répondrions aux questions qui y seraient posées. C’est aux participants d’alimenter ce débat, de donner leurs
      propres réponses, d’en poser d’autres... aux autres de les examiner, les accepter, les réfuter... Un des buts semble donc atteint
      et j’en suis ravi !

      Ceci étant, il n’apparaît nulle part dans notre billet qu’il est nécessaire que la beauté soit liée aux mathématiques ! En tous cas, moi je la
      vois plus ailleurs. Certains auteurs des citations qui suivent ne sont pas des mathématiciens et parlent de la beauté
      autrement :

      1. Les heures pendant lesquelles nous sommes absorbés par la beauté sont les seules où nous sommes vivants... Là
      est la vie réelle et tout le reste n’est qu’illusion ou simple résignation.
      (R. Jefferies, écrivain anglais du
      XIXème siècle).

      2. Le mathématicien n’étudie pas les mathématiques pures parce qu’elles sont utiles ; il les étudie parce qu’il y
      prend plaisir, et il y prend plaisir parce qu’elles sont belles.
      (H. Poincaré, mathématicien français).

      3. Nul mathématicien ne peut être un mathématicien accompli s’il n’est aussi poète. (K. Weierstrass, mathématicien
      allemand).

      4. Aucun peuple ne peut vivre en dehors de la beauté ! (A. Camus, écrivain français).

      Et puisque vous citez un passage du Spleen de Paris de C. Baudelaire, sachez que notre cher poète n’a pas été insensible
      à la beauté des
      mathématiques comme on peut le voir en s’immergeant dans le poème qui suit :

      Pourquoi le spectacle de la mer est-il si infiniment et si éternellement agréable ?

      Parce que la mer offre à la fois l’idée de l’immensité et du mouvement.

      Six ou sept lieues représentent pour l’homme le rayon de l’infini.

      Voilà un infini diminutif. Qu’importe, s’il suffit à suggérer l’idée

      de l’infini total ? Douze ou quatorze lieues de liquide

      en mouvement suffisent pour donner la

      plus haute idée de beauté qui

      soit offerte à l’homme sur

      son habitacle transitoire.

      (C. Baudelaire, Mon cœur mis à nu : journal intime)

      Pour finir, permettez-moi de faire une digression en vous donnant ma petite vision personnelle !
      Quelle que soit sa nature, la beauté est toujours
      la combinaison parfaite entre quelque chose
      de profond et la forme qu’elle peut prendre !
      Mais je m’incline et préfère laisser le mot de la fin à l’un
      des grands maîtres de l’esthétique littéraire :

      Où la Forme manque l’Idée n’est plus.
      Chercher l’un, c’est chercher l’autre.

      (Gustave Flaubert, Correspondance)

      C’est que la beauté littéraire est au-dessus de toutes les autres car elle est créée sans contraintes et en toute liberté (c’est ma conviction, nul n’est obligé de la partager !)

      Cordialement,

      Aziz El Kacimi

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  • Des maths partout !

    le 21 juin 2014 à 17:43, par projetmbc

    Bonjour.

    Le plus intéressant dans ce billet est sûrement son titre : « Des maths partout ! — La nature regorge d’objets mathématiques ! N’est-ce pas ? ».

    A-t-on vraiment des maths partout, ou peut-on en fait mettre des maths partout ? Vaste question mais par exemple, une figure fractal n’a pas besoin des maths pour exister. Ce qui devient beau c’est que l’on peut en faire une étude mathématique.

    Au-delà de cette question philosophique, on peut s’en poser une autre bien plus pragmatique, et là c’est l’enseignant de Lycée qui parle : « Les maths doivent-elles prouver leur utilité ? ». L’histoire des maths est faite de bizarreries à un instant t qui se sont trouvées être bien utiles plus tard. Deux petits exemples.

    1) En géométrie, les réflexions autour du cinquième postulat d’Euclide ont conduit les mathématiciens vers des géométries non-euclidiennes, dont une a été bien utile à Einstein pour sa théorie de la relativité, laquelle théorie a actuellement des applications dans nos GPS.

    2) Les nombres complexes nés des idées folles d’un certain Argand qui utilise des nombres imaginaires et les garde car ils lui donnent une solution réelle à ses équations polynomiales. Des nombres complexes qui ont abouti à l’analyse complexe dont personne ne peut douter de l’utilité dans différentes branches mathématiques très appliquées.

    Si les mathématiciens ont tant besoin de devoir « vendre » leur matière, n’est-ce pas là l’échec d’une école qui retire toute mathématique des programmes du Lycée ? Regardez un peu ce qui est fait en Physiques en Terminale S, c’est très instructif. Dans mes rêves les plus fous, l’école proposerait en Sciences Physique, en SVT, en Histoire-Géographie des énoncés basés sur des outils mathématiques abordés dans le niveau précédent. là, chacun comprendrait l’utilité des maths.

    Sinon voici quelques réponses à des points abordés par d’autres avant moi ici.

    Plus nombreux sans doute, sont les élèves dans le même temps, qui vont se cacher derrière cette fatalité selon laquelle pour « vous c’est facile », alors que pour eux, c’est juste incompréhensible.

    N’est-ce pas là une posture justifiant leur flemme. Une année, un élève de 2nde m’avait sorti ce genre d’argumentations hyper formatées. Je lui avais répondu d’arrêter de me faire le numéro de la victime, la classe et lui-même avaient ri, et l’incident était clos, puis il s’était remis au travail. Arrêté de prendre les élèves pour plus imbécile qu’ils ne le sont. Ils ont vu que demander à un prof de maths à quoi servent les maths, ou bien lui dire que c’est trop difficile mettaient bien en danger les profs. Ils utilisent aussi donc ceci avec habileté au final, mais pas toujours avec une réelle sincérité.

    Au-delà de cela, les maths ne sont pas faites pour tout le mondre. Je suis et resterait nul en langues, c’est comme cela malgré ma curiosité, malgré les livres que je lis en anglais. Mon corps fait pour l’endurance, heureusement j’aime cela, ne me permet pas de courir vite par exemple. Tant pis, c’est ainsi. Les maths n’ont pas a être accessibles à tout le monde même si on doit avoir cette utopie en tête afin d’éviter un élitisme pédant.

    Si je pense au nombre d’or lorsque je vois un tournesol, ce n’est pas spontané

    Bizar, moi je pense plus à la suite de Fibonacci mais c’est une autre histoire...

    J’insiste aussi sur le fait que sous un regard aimant, tout Être, toute structure inanimée peut prendre la vie qu’on veut bien lui prêter.

    Si simple que cela ? Je ne crois pas, la psychologie d’un individu est très complexe. J’aurais bien plus de modestie que cela. Je viens d’être papa. Je sais que je donnerais tout l’amour que j’ai pour mon petit, mais pourtant je ne peux affirmer à ce jour si mon bout de chou sera un homme bien. C’est flippant mais c’est aussi là notre lot de simple humain.

    J’ai visité le Palais de l’Alhambra bien des années avant ; je n’ai admiré que les motifs, ce que mes yeux ont trouvé beau (en tant que citoyen $lambda $), rien d’autre. A ce moment-là, j’étais un « non mathématicien » : je n’y ai pas vu les 17 groupes paveurs (on raconte qu’ils y sont).

    Ce qui est beau ici, c’est que la pratique du pavage de façon non formalisée a rejoint le résultat théorique mathématique. Preuve aussi que les maths ne sont pas toujours indispensables finalement, si ce n’est pour révéler un résultat.

    Les maths, il y en a partout.

    Non, les maths on peut en mettre partout ou presque. C’est ma philosophie.

    Revenons sur le foot si vous voulez bien. Un enfant qui aura grandi dans une famille de footeux développera un goût pour le jeux (sauf s’il l’associe à des événements désagréables de sa vie) et éprouvera de grandes sensations à visionner un match. A l’inverse une personne qui a grandi en dehors de ce milieu là, a du mal à s’intéresser au jeu et bien souvent ne comprend pas l’engouement que cela provoque. Il faudra alors au non initié faire un effort pour aller vers ce sport, et c’est seulement à partir du moment que cet effort sera fait que peut-être naîtra l’émotion.

    Du grand n’importe quoi. Ma mère a un CAP de comptabilité, mon père un CAP de cuisine. Ni mon père, ni ma mère n’ont un goût pour les sciences et pourtant j’adore depuis toujours les maths, les raisonnements logiques. Et si je fais un peu de psychanalyse, dans mon cas, cette matière a été pour moins un refuge car je n’avais pas à communiquer avec autrui d’une certaine façon, j’tais un grand timide. Un écrit de français demande de parler, de raconter quelque chose à autrui, un problème mathématique n’a pas la même finalité, car il y a moi et le problème et personne d’autre.

    Je pense que l’attrait pour quelque chose dépend vraiment de chacun. Ne faisons pas de généralité hâtive, de grâce...

    Les millions (bon je n’en sais rien, je n’ai pas d’idée précise de l’ordre de grandeur) de personnes qui visitent chaque année l’Alhambra de Grenade (c’est l’exemple le plus flagrant au monde, non ?) se rendent bien sûr compte que ce sont les motifs géométriques et symétriques qui font la beauté des bâtiments. Seulement, il s’agit là d’un cas très particulier où cette beauté des mathématiques apparaît quasiment à la surface.

    Ne confond-on pas tout ! Il y a des résultats que les matheux vont trouver jolis. Et là pas sûr que cette sensation soit accessible à tout le monde. On peut même imaginer deux théoriciens dans des domaines divers ne pas avoir les même sensations de beautés mathématiques. D’un autre côté, nous avons de belles choses qui peuvent être vues sous l’angle mathématique.

    C’est que la beauté littéraire est au-dessus de toutes les autres car elle est créée sans contraintes et en toute liberté (c’est ma conviction, nul n’est obligé de la partager !)

    Et la musique ? Et la danse ?

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    • Des maths partout !

      le 22 juin 2014 à 17:56, par Aziz El Kacimi

      Bonjour,

      Le plus intéressant dans ce billet est sûrement son titre : « Des maths partout ! - La nature regorge d’objets mathématiques ! N’est-ce pas ? ».

      C’est déjà ça !

      Merci pour votre commentaire dans lequel vous vous adressez à tout le monde.
      Le débat n’est donc pas juste entre les auteurs et les lecteurs qui y interviennent, et ça, c’est bien !
      Je ne vais réagir que sur des points qui me concernent (ceux que j’ai mis dans certaines de mes réponses).

      Les mathématiques sont-elles partout ? Les voit-on partout ? Les met-on partout ?... Personne ne peut apporter de réponse
      tranchée à l’une quelconque de ces questions tellement les opinions sont nombreuses et les regards variés ! Mais c’est toujours utile d’en recenser le
      maximum.

      Les mathématiques doivent-elles prouver leur utilité ? Oui, quand c’est possible, et on doit montrer en quoi. Faut-il pour autant
      s’interdire d’en faire quand on n’y arrive pas tout de suite, ou même si on pense ne jamais y arriver ? Non, même s’il y a des directions qui laissent sceptique :
      quand aura-t-on besoin de la nullité du premier groupe de cohomologie d’un espace topologique bizarre à valeurs dans un gros faisceau ?
      Y a-t-il quelqu’un sur terre capable de répondre à cette question ? Je n’en suis pas certain ! Et pourtant, je peux vous assurer qu’il y
      a des gens qui se cassent les dents sur de tels problèmes. Moi-même j’ai passé quelques années de ma vie (les meilleures) à
      chercher à annuler (de façon gratuite) certains groupes de cohomologie de ce genre !

      Vous êtes un patron et moi votre employé. Le jour de la paye, nous devons tous les deux admettre la relation :

      \[1\hbox{ euro} + 1 \hbox{ euro} = 2 \hbox{ euros}.\]

      C’est une vérité pour tout le monde ! Vous organisez un jour une petite fête pour votre personnel. Autour d’un verre, vous et moi discutons de la
      beauté. Je vous dis : « La beauté littéraire est au-dessus de tout. » Vous me répondez : « Non, moi je pense plutôt à la musique ou à la danse. »
      Sûrement, après discussion, nous concluons : « Il est vrai que chacun a son point de vue là-dessus ». Il y a donc
      des questions pour lesquelles plusieurs réponses sont vraies ! (C’est trivial ce que je vous raconte, n’est-ce pas ?) Je n’ai pourtant pas
      manqué de préciser que mon assertion n’engage que moi !

      Félicitations pour la naissance de votre enfant !

      Aziz El Kacimi

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    • Des maths partout !

      le 23 juin 2014 à 08:46, par ROUX

      « Si je pense au nombre d’or lorsque je vois un tournesol, ce n’est pas spontané

      Bizar, moi je pense plus à la suite de Fibonacci mais c’est une autre histoire... »

      On commence la première étape de l’itération d’une mise en abyme qui n’est qu’on objet asymptotiquement fractal (?) par ce splendide trait d’humour puisque l’autre histoire, que vous n’écrivez pas mais que vous connaissez, est que la limite du rapport de deux termes successifs de la suite de Fibonacci est le nombre d’or, trait d’humour que seul(e)s les lecteur(rice)s cultivié(e)s en mathématiques verront...

      Très belle illustration de ce débat !

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  • Des maths partout !

    le 23 juin 2014 à 09:48, par Karen Brandin

    En fait, ma phrase est complètement détournée de son contexte, le nombre d’or n’était qu’un prétexte ; le monsieur qui la cite n’a pas compris mon intention et encore moins l’objet de mon intervention que je finis par amèrement regretter.

    Je suis décidément en cette fin d’année navrée et profondément lassée mais finalement, grâce à IDM, je mourrai moins bête (ce dont je ne doutais pas au demeurant) puisque j’aurai pu « rencontrer » en projetmbc la personne qui manifestement détient la vérité.

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    • Des maths partout !

      le 25 juin 2014 à 17:09, par projetmbc

      Comme quoi, les malentendus sont de partout. Je ne voulais froisser personne. J’ai juste un autre point de vue.

      Je ne détiens aucune vérité. Ceci étant, mettre le nombre d’or partout sous couvert de pseudos raisonnements me parait pour le coup gênant et surtout malhonnête. Après tout, on peut mettre pi partout, pour peu que l’on démontre un jour que ce nombre est un nombre universel, c’est à dire un réel dont le « développement décimal infini » contient à un endroit au moins n’importe quel naturel.

      Pour en revenir à nos tournesols, je n’ai malheureusement pas la référence sous les yeux, mais il existe sur le net un document qui fait le lien entre la suite de Fibonacci et les problèmes de meilleures approximations rationnelles, et qui ensuite fait le lien de tout ceci avec une occupation optimum des graines de tournesol. Dans ce contexte, les suites de Fibonacci apparaissent naturellement, sans mauvais jeu de mots.

      De même, le nombre d’or est aussi souvent cité via la spirale d’or comme modélisation des coquilles des nautilus. Or une petite modélisation pencherait plus pour une spirale logarithmique, l’hypothèse de modélisation étant que le développement tangentielle de la coquille est proportionnel au développement radial. N’étant pas dans le monde de la recherche, je ne peux mettre à l’épreuve cette hypothèse même si elle me séduit beaucoup.

      Pour finir, donner un avis différent n’est qu’un moyen de discuter. Maintenant, si tout avis est bon, et si on ne doit pas contredire autrui, fait-on encore de la science ?

      PS : je dis souvent des bêtises et être contredit avec argumentation ne me froissera pas.

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  • Des maths partout !

    le 23 juin 2014 à 11:48, par ROUX

    « C’est une vérité pour tout le monde ! (...) Il y a donc des questions pour lesquelles plusieurs réponses sont vraies ! »

    « la personne qui manifestement détient la vérité »

    La notion de vérité me fascine, avec son âme damnée, la réalité.

    Chaque fois que je vois le mot « vérité », je salive et je lis avidement mais je n’interviens pas, même si l’envie peut momentanément exister. Là, je ne veux pas laisser Karen dans cet état…

    Une vérité vraie est un discours reconnu comme étant asymptotiquement proche de la Réalité. La Réalité, unique, est le résultat du calcul par le cerveau de la perception à partir de nos cinq sensations.

    La Réalité n’est pas liée à la Matière ou, il ne faut pas lier la Réalité à son caractère tangible dans l’espace physique des ondes, des particules et de la dualité onde-particule : les mathématiques ont elles aussi leurs Réalités.

    Une Réalité non-tangible est par exemple la couleur marron. Cette couleur n’existe physiquement pas puisqu’elle n’a pas de longueur d’onde ; cette couleur n’est que le résultat d’un calcul du cerveau à partir des intensités électriques dans les nerfs associés aux trois cônes spécialisés respectivement dans la perception du rouge, du vert et du bleu et aux bâtonnets, spécialisés dans la luminosité. Mais le marron est une Réalité incontournable chez les enfants qui en font un usage intensif...

    Nous savons parfaitement ce qu’est la Réalité (unique, encore une fois) tant que nous ne la disons pas, ne la chantons pas, ne la dessinons pas, ne la sculptons pas, etc.

    Quand nous disons la Réalité, nous produisons une vérité : une vérité est un discours à l’aide duquel nous cherchons à dire la Réalité.

    Ce discours est la tentative de faire coïncider nos perceptions avec les perceptions que nous allons faire imaginer à notre interlocuteur(trice) : c’est une chaîne pleine de sources d’erreurs possibles... Sensations, calcul de la perception, choix des mots pour exprimer la perception, prononciation de ces mots (émission par moi), traduction de ces mots en une perception (réception par mon interlocuteur(trice)), imagination des sensations qui auraient donné cette perception...

    Une vérité peut être fausse !!!

    Une vérité vraie n’est qu’un discours particulièrement bien réussi puisqu’il a clairement suscité chez l’autre la perception que j’avais moi-même vécue... En d’autres termes, la Réalité captée par mes sens est très proche de la Réalité que mon interlocuteur(trice) est en train d’imaginer.

    Une vérité est vraie si son asymptote est clairement la Réalité, qui ne sera jamais qu’une asymptote et, par essence, indicible... On ne dit jamais la Réalité ; on ne dit que des vérités. Et il peut y avoir plein de vérités vraies autour d’une même Réalité !

    « Autour d’un verre, vous et moi discutons de la beauté. Je vous dis : « La beauté littéraire est au-dessus de tout. » Vous me répondez : « Non, moi je pense plutôt à la musique ou à la danse. » Sûrement, après discussion, nous concluons : « Il est vrai que chacun a son point de vue là-dessus ». Il y a donc des questions pour lesquelles plusieurs réponses sont vraies ! »

    Et moi je crois qu’il y a des domaines de la pensée dans lesquels il n’y a pas de vérité puisqu’il n’y a pas de Réalité.

    J’ai toujours pensé que les cours de sciences devaient nous entrainer à convaincre l’autre et que les cours de français devaient nous entrainer à chercher à comprendre l’enthousiasme de l’autre...

    Karen, projetmbc qui ne tient pas un discours si dur que cela ne détient aucune vérité puisqu’il ne peut pas s’agir d’un discours sur la Réalité puisqu’au fond, ce que nos trois compères ont voulu nous faire partager, c’est que les mathématiques, comme la beauté et l’amour, sont partout...

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  • Des maths partout !

    le 24 juin 2014 à 14:37, par Guillaume R

    Bonjour à tous,
    je vais tenter de résumer mon point de vue de manière claire :

    - les êtres humains sont issus génétiquement de la sélection naturelle. L’organisme humain, et notamment son système nerveux, sont issus d’interactions de plusieurs milliards d’années entre des êtres vivants et leur environnement ;

    - de plus, la croissance et la formation du système nerveux d’un individu sont fortement déterminés par le milieu, notamment culturel et sociétal ;

    - les sociétés humaines et leurs cultures sont également le fruit d’une évolution plusieurs fois millénaires ;

    - le langage est un outil fondamental dans l’évolution des sociétés, permettant d’accéder à un nouveau stade dans la croissance individuelle de chaque être humain ;

    - le langage mathématique, en comparaison des autres langages, a la spécificité d’avoir une structure identique à certaines structures perçues par les êtres humains dans leur milieu (naturel ou culturel).

    Un peu plus sur le dernier point : le langage mathématique a pour objet les structures (ou ensembles de relations) pour lesquelles les êtres humains ont trouvé un formalisme reproduisant ces structures.

    Exemple : Si je mets un caillou derrière un paravent puis un autre caillou, et si j’enlève le paravent, j’aurai alors deux caillous, car les conditions physiques auxquelles je suis habitué font que les caillous ne vont pas s’évaporer, un trou ne va pas apparaître dans le sol, et un troisième caillou ne va pas se condenser à partir de l’air ambiant. Pour toutes les situations du même type, l’algèbre élémentaire sur les nombres entiers me fournit un outil formel qui vérifie les mêmes propriétés que ce que je peux observer (1+1=2).

    Contre-exemple : Marie aime Antoine, mais ses sentiments à son égard sont troublés par ce qu’il lui a dit à leur dernière rencontre. Les sentiments de Marie et d’Antoine sont des phénomènes très complexes, et je n’ai pas de formalisation concernant ces sentiments qui permette d’accéder à la structure de ces sentiments. Donc ces phénomènes ne sont pas couverts par le langage mathématique que je connais.

    L’irraisonnable efficacité des mathématiques est la conséquence du processus de construction des mathématiques, qui est la mise au point d’un formalisme dont la structure est la même que certaines structures abstraites par le système nerveux humain, produit de la sélection naturelle et du milieu culturel (lui-même issu d’une évolution).

    Comme dans tout phénomène évolutif qui se respecte, il y a bien sûr des phénomènes constants de boucle, le formalisme mathématique permettant aux personnes qui le maîtrisent d’appréhender de nouvelles structures qui vont pouvoir enrichir le formalisme.

    Bref, pour répondre à la question « Les mathématiques sont-elles dans la nature ? », ma réponse est oui, en ce que les êtres humains font partie de la nature, et non, en ce que les objets mathématiques ne sont pas « dans » les objets ou phénomènes observés, mais seulement des possibilités de représentation.

    Pour ce qui est des questions d’enseignement, il me semble fondamental de dégager ces phénomènes d’évolution, que les élèves comprennent que les mathématiques sont une construction humaine, et que cette construction est d’une importance capitale car elle permet comme nulle autre d’appréhender ce que nous sommes et ce qui nous entoure.

    A l’inverse, il me semble important d’arrêter de dire aux élèves qu’il y a par exemple un nombre d’or ou des fractales « dans la nature ». Le nombre d’or et les fractales sont des structures pour lesquelles on a pu élaborer un formalisme de même structure, et l’on peut « reconnaître » ces structures dans des phénomènes naturels. Les côtes de Bretagne ne forment pas une fractale, mais on peut étudier la structure de fractale et relever qu’il y a des similarités (et des différences !) avec les côtes de Bretagne.

    A mon sens, dire que le nombre d’or est « dans » la nature s’apparente davantage à de la numérologie qu’à de la science.

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  • Des maths partout !

    le 18 juillet 2014 à 16:29, par bayéma

    bonjour à toutes et tous.

    ce débat est crucial « mine de rien » ! les auteurs — trois hommes — (je sens que de le dire, je vais me faire engueuler) ont bien choisi leur titre car il recèle deux mots magiques : « des-maths » et « partout ». je m’explique. dire « des-maths partout » ce n’est pas dire « les maths sont partout » (à l’instar du titre d’une misérable feuille pétainiste). donc nous évitons la tentation « totalitaire » (je mets des «  » car il n’y a rien de si réducteur et mutilant que ce « totalitarisme » et toutes ses déclinaisons « intégristes »). la poésie maintenant : « la nature regorge d’objets mathématiques... » même les mathématiciens (ici je n’emploie que le masculin pour cet article, sinon j’aurais écrit : mathématicien.ne.s) ont droit au lyrisme. et c’est pour ça que ce débat est crucial : arts et sciences sont deux faces (j’ai envie d’écrire : qui n’en font qu’une, moebienne) d’une même réalité, celle du désir de maîtriser ce dans quoi nous sommes plongé.e.s ou immergé.e.s et qui nous échappe et qui nous met en danger. ce désir de maîtriser ce qui nous échappe entraîne le besoin de comprendre et tutti quanti... qu’ensuite, nos productions psychiques nous réapparaissent comme des productions « célestes » (comme le disait marx), génère ce monde des idées qui demande la plus belle qualité qui soit : la curiosité. j’ai envie de dire : sans curiosité point de salut. après viennent le travail, la patience, la transmission et « toutes leurs cohortes ».
    la difficulté d’enseigner sciences, arts, ou tout simplement le langage et son infinité potentielle (qui fait que rien ne s’arrêtera, jamais) tient à ce que la curiosité, comme la marée, se retire de notre société. le reflux, quasi généralisé, confirme l’universalité du spectacle : à côté d’une misère atroce (et s’appuyant politiquement et économiquement sur elle) une abondance de fournitures futiles avec lesquelles tout est donné d’avance. il n’y a qu’à apprendre à se servir d’un clavier. on n’est pas curieux de savoir, on est avide de montrer. l’exhibitionnisme (et donc son fondement le narcissisme) devient de plus en plus le comportement adéquat à la (pseudo-)relation sociale. les enfant.e.s (mis à part celles et ceux qui sont déjà détruit.e.s par leurs parents) sont naturellement curieu.se.s (voyez comme « lalangue » ne permet pas toutes les libertés) et c’est, je crois, le rôle de l’éducation que de capter, préserver, maintenir et enrichir selon la personnalité de chaque, cette curiosité, source et ressource fondamentale de tout ce qui suivra. c’est pourquoi notre école ne va pas bien. mais là n’est pas le sujet.
    dire que la nature regorge d’objets mathématiques n’est faux que parce que lapidaire. bon, un titre c’est un titre... plus profondément, la perception des structures, et parce que ce sont des structures justement, formalisables, a été acquise par l’humanité. bon on y est. seulement le hic de l’extension tous azimut est corolaire d’un délire : qu’une seule dimension de l’être connaisse toutes les autres et, à distance, les régit. je ne suggère rien de la sorte pour cet article qui se situe plutôt, je pense, dans l’émerveillement (merveilleux compagnon de la curiosité !). relisez « 1984 ». la mathématisation du monde humain ce n’est pas une pratique comme une autre et heureusement que des gens comme freud nous l’ont montré quand les héritiers de marx et de bismarck (notamment !) ont fait ce qu’ils ont fait. on peut mathématiser une fourmillère parce que cela ne permet pas nécessairement (à voir !) d’amplifier le pouvoir des « maîtres du monde » et nous laisse une marge. mais tout de même, des maths partout ?, les guerres et les violences sont-elles à ce point si loin à l’horizon quotidien que nous demeurions assez niais.e.s pour considérer qu’elles ne sont pas « mathématiques » ? cela dit pour que la tension inhérente au questionnement proposé par l’article ne soit pas évacuée. art science langage et convivialité ne participent pas encore au même banquet.
    josef bayéma, plasticien, guadeloupe.

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