Droites tropicales

Pista roja El 4 febrero 2011  - Escrito por  Itenberg, Ilia Ver los comentarios (1)

Cette note est consacrée à des objets surprenants qui s’appellent droites tropicales. Le comportement de ces objets ressemble beaucoup à celui des droites habituelles. Toute droite habituelle dans le plan peut être décrite par une équation linéaire \[ ax + by + c = 0. \]
Nous verrons comment cet énoncé se traduit en langage tropical. Nous parlerons aussi des courbes algébriques dans le plan (ce sont les courbes définies par des équations polynomiales), ainsi que de leurs analogues tropicaux.

Vous avez, sans doute, déjà rencontré des droites, des paraboles et des hyperboles. Considérons, par exemple, les courbes suivantes :

  • la droite définie par l’équation $y = - 1 - x$,
  • la parabole définie par l’équation $y = x^2$,
  • l’hyperbole définie par l’équation $x^2 - y^2 = 1$.

<fig5720|center>

Les deux premières courbes sont les graphes des fonctions
$x \mapsto -1 - x$ et $x \mapsto x^2$, respectivement.
La troisième courbe n’est pas le graphe d’une fonction.
Néanmoins, ces trois courbes ont une propriété très importante en commun :
leurs équations peuvent être écrites sous la forme
\[ P(x, y) = 0, \]
où $P$ est un polynôme à deux variables. En effet, les équations
ci-dessus peuvent être réécrites de la façon suivante :

  • $x + y + 1 = 0$,
  • $y - x^2 = 0$,
  • $x^2 - y^2 - 1 = 0$.

Rappelons qu’un point du plan $\mathbb{R}^2$ est un couple $(x, y)$ de
nombres réels $x$ et $y$.
Une courbe algébrique dans le plan
est l’ensemble des couples $(x, y) \in \mathbb{R}^2$
qui sont les solutions
de l’équation $P(x, y) = 0$, où
$P$ est un polynôme à deux variables
et à coefficients réels.

La courbe algébrique définie par un polynôme
de degré élevé peut être très compliquée.
Dans cette note, on essayera de se familiariser avec des courbes
algébriques en étudiant leurs analogues qui portent le nom de
courbes tropicales. Ces analogues
sont faits de segments et de demi-droites.

Une droite très étrange

Considérons la réunion de trois demi-droites dans
le plan
qui ont la même extrémité :

  1. une demi-droite de direction ouest,
  2. une demi-droite de direction sud,
  3. une demi-droite de direction nord-est
    (dont la pente
    est à $45$ degrés) ; voir le dessin ci-dessous.

<fig5708|width=60%>

Un tel tripode s’appelle droite tropicale.
Les directions des trois demi-droites
étant prédéfinies, une droite tropicale
est déterminée de façon unique par la position
de son point central (l’extrémité commune des trois
demi-droites).
Pourquoi le nom de l’objet considéré contient-il le mot «droite» ?
Il est vrai que la forme d’une droite tropicale
ne ressemble pas à celle d’une droite habituelle :
une droite tropicale
a trois «pieds».
Néanmoins, les droites tropicales ont beaucoup de choses en commun
avec les droites habituelles.
Examinons quelques propriétés standards des droites habituelles
dans le plan.

(A) Par deux points quelconques
du plan,
on peut toujours tracer une droite.

Vous pouvez vérifier que cette propriété reste vraie
si on remplace «droite» par «droite tropicale» :

(A’) par deux points quelconques du plan,
on peut toujours tracer une droite tropicale.

<fig5709|center|width=60%>

De plus, si deux points choisis ne sont pas sur une droite habituelle
horizontale (est — ouest), une droite habituelle verticale (nord — sud)
ou une droite habituelle de pente à $45$ degrés
(sud-ouest — nord-est), alors
il existe une et une seule droite tropicale qui passe
par ces points. Essayez de démontrer cette affirmation !
On va dire que deux points vérifiant la propriété ci-dessus
sont indépendants.

Voici encore une propriété des droites habituelles
dans le plan :

(B) deux droites non parallèles
se coupent toujours en un point.

Cette propriété reste vraie si on remplace «droites»
par «droites tropicales» et «non parallèles»
par «dont les points centraux sont indépendants» :

(B’) deux droites tropicales dont les points centraux
sont indépendants
se coupent toujours en un point.

<fig5712|width=60%>

Une propriété très importante des droites habituelles est le fait
qu’elles peuvent être décrites par des équations linéaires :

(C) une droite quelconque dans le plan
est l’ensemble des solutions de l’équation
\[ax + by + c = 0,\]
où au moins un des coefficients $a$ et $b$ est non nul ;
inversement,
toute
équation $ax + by + c = 0$,
où au moins un des coefficients $a$ et $b$ est non nul,
définit une droite dans le plan.

L’expression $ax + by + c$ est un polynôme de degré $1$
à deux variables. La propriété (C) nous dit que les droites
habituelles dans le plan sont les courbes algébriques
de degré $1$, c’est-à-dire, les courbes algébriques
définies chacune par un polynôme de degré $1$.

Pour traduire la propriété (C) en langage tropical, nous allons
introduire les opérations arithmétiques tropicales.

Polynômes tropicaux

Remplaçons l’addition
et la multiplication habituelles
dans $\mathbb{R}$
par deux autres opérations
$\oplus$ et $\odot$ : pour tout $a \in {\mathbb R}$
et tout $b \in {\mathbb R}$, on pose
\[ a\oplus b=\max\{a,b\}\qquad {\rm et}\qquad a\odot b=a+b. \]
Pour avoir un «zéro» de la nouvelle opération d’addition $\oplus$,
on ajoute $-\infty$ à l’ensemble $\mathbb{R}$
et on considère les opérations $\oplus$ et $\odot$
sur l’ensemble ${\mathbb R} \cup \{-\infty\}$.
On va noter $\mathbb{T}$
cet ensemble,
et
on va appeler nombres tropicaux les éléments de
$\mathbb{T}$.
Les opérations introduites sur les nombres tropicaux
s’appellent addition tropicale
et multiplication tropicale, respectivement.
Le qualificatif «tropicale» leur a
été donné
en l’honneur
de l’informaticien brésilien Imre Simon.

Bien sûr,
\[a \oplus (-\infty) = (-\infty) \oplus a = a\]
pour tout
$a \in \mathbb{R} \cup \{-\infty\}$.
De plus,
\[a \odot (-\infty) = (-\infty) \odot a = -\infty\]
pour tout
$a \in \mathbb{R} \cup \{-\infty\}$.
Donc, $-\infty$ joue effectivement le rôle
de «zéro tropical» (c’est-à-dire,
de l’élément neutre de l’addition tropicale).

Considérons un polynôme
$P_1(x, y) = ax + by + c$ de degré $1$ et à coefficients tropicaux.
Supposons que chacun des trois coefficients de ce polynôme
est différent de $-\infty$.
Si on interprète les opérations de l’expression
\[ ax + by + c \]
comme opérations tropicales, on obtient
\[ \max\{a + x, b + y, c\}. \]
Étudions la fonction $p_1: {\mathbb R}^2 \to {\mathbb R}$ définie par
\[ (x, y) \mapsto \max\{a + x, b + y, c\}. \]

  • Si $(x, y)$ appartient à la région rouge du dessin ci-dessous,
    on a
    \[p_1(x, y) = a + x.\]
  • Si $(x, y)$ appartient à la région verte du dessin ci-dessous,
    on a
    \[p_1(x, y) = b + y.\]
  • Si $(x, y)$ appartient à la région bleue du dessin ci-dessous,
    on a
    \[p_1(x, y) = c.\]

<fig5716|center>

Les lignes qui séparent les régions
forment une droite tropicale !
On dit que la réunion des lignes de séparation
est le lieu des coins
de la fonction $p_1$ ; il est constitué des points
$(x, y)$ tels que
le maximum $\max\{a + x, b + y, c\}$ soit atteint au moins deux fois.

De façon plus générale, un polynôme à deux variables
est une expression de la forme
\[ \sum_{i,j}a_{i,j}x^iy^j. \]
Les termes $a_{i,j}x^iy^j$ sont les monômes
de notre polynôme, et les nombres $a_{i, j}$
sont les coefficients.
Considérons un polynôme
\[ P(x, y) = \sum_{i,j}a_{i,j}x^iy^j \]
à coefficients tropicaux,
et interprétons les opérations de cette expression
comme opérations tropicales.
Pour tout monôme $a_{i,j}x^iy^j$ du polynôme,
les puissances $x^i$ et $y^j$ nous donneront
les produits habituels $ix$ et $jy$, respectivement,
et le monôme $a_{i,j}x^iy^j$ nous
donnera $a_{i,j} + ix + jy$.
Donc, en interprétant les opérations
de $\sum_{i,j}a_{i,j}x^iy^j$ comme opérations tropicales,
on obtient
\[ \max_{i,j}\{a_{i,j} + ix + jy\}. \]
Supposons à nouveau que chaque coefficient
$a_{i,j}$ de ce polynôme est différent du «zéro tropical»,
c’est-à-dire, différent de $-\infty$.
Chacune des fonctions
\[ (x, y) \mapsto a_{i,j} + ix + jy \]
est affine. Donc, la fonction $p: {\mathbb R}^2 \to {\mathbb R}$
définie par
\[ (x, y) \mapsto \max_{i,j}\{a_{i,j} + ix + jy\} \]
est
affine par morceaux.
Le lieu des coins de la fonction $p$ est la courbe tropicale
définie par le polynôme de départ.
Par exemple, la courbe tropicale
définie par le polynôme tropical
\[ 1 \oplus (-1) \odot x \oplus 0 \odot y \oplus (-5) \odot x^2, \]
est représentée sur le dessin ci-dessous
(dans chaque région du complémentaire de la courbe,
on a mis le «monôme tropical dominant» dans cette région).

Une courbe tropicale
La courbe tropicale définie par le polynôme tropical
\[1 \oplus (-1) \odot x \oplus 0 \odot y \oplus (-5) \odot x^2\]

Pouvez-vous reconstruire le polynôme habituel
(à coefficients tropicaux) qui, après l’interprétation
de ses opérations comme opérations tropicales,
donne le polynôme tropical
\[ 1 \oplus (-1) \odot x \oplus 0 \odot y \oplus (-5) \odot x^2 \; ? \]
Il s’agit du polynôme
\[ 1 + (-1) \cdot x + 0 \cdot y + (-5) \cdot x^2. \]
Ne soyez pas étonnés que, parmi les coefficients de ce polynôme,
il y a le nombre $0$ : le nombre tropical $0$ n’est pas
l’élément neutre de l’addition tropicale !

Une courbe tropicale dans ${\mathbb R}^2$ est
une réunion finie de segments et de demi-droites.
Voici encore un exemple d’une courbe tropicale.
Essayez de trouver un polynôme tropical qui
définit une telle courbe.

<fig5721|center>

Il est naturel de considérer
les courbes tropicales dans ${\mathbb T}^2$
au lieu de ${\mathbb R}^2$ en ajoutant aux courbes les points
appropriés sur les deux droites «à l’infini»
$\{-\infty\} \times {\mathbb T}$ et ${\mathbb T} \times \{-\infty\}$
(ces deux droites peuvent être vues comme axes de coordonnées).

En fait, chaque segment et chaque demi-droite d’une courbe tropicale
dans $\mathbb{R}^2$ ou $\mathbb{T}^2$
est équipé d’un poids qui est
un nombre entier strictement positif, mais nous n’allons pas parler
de ces poids ici.

Quelle est la relation entre les courbes algébriques habituelles
et les courbes tropicales ? Pour essayer de répondre
à cette question, étudions d’abord
la relation entre les opérations tropicales, d’une part,
et les opérations d’addition et de multiplication habituelles
dans l’ensemble
\[ \mathbb{R}_+ = \{x \in \mathbb{R} \ | \ x \geq 0\} \]
des nombres réels positifs ou nuls, d’autre part.

Opérations tropicales vues comme opérations «limites»

Pour tout nombre réel $t > 1$,
l’application
\[ \log_t : \quad{\mathbb R}_+ \to ({\mathbb R} \cup \{-\infty\}) \]
\[ x \mapsto \log_t x, \]
(on pose $\log_t 0 = -\infty$)
met en correspondance les ensembles
$\mathbb{R}_+$ et $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$.

<fig5807|width=80%>

En utilisant,
pour un nombre réel $t > 1$ donné, la correspondance
\[ \log_t: {\mathbb R}_+ \to (\mathbb{R} \cup \{-\infty\}), \]
on peut «transporter»
les opérations d’addition et de multiplication
habituelles définies dans $\mathbb{R}_+$
pour les mettre dans $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$ :
pour deux éléments quelconques $a$ et $b$ de $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$,

  • on considère leurs images réciproques
    par l’application $\log_t$ : on trouve $t^a$ et $t^b$
    (ici $t^{-\infty} = 0$),
  • on calcule la somme habituelle $t^a + t^b$
    et le produit habituel $t^a t^b$ de $t^a$ et $t^b$,
  • et on envoie dans $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$,
    à l’aide de l’application $\log_t$,
    les deux résultats obtenus $t^a + t^b$
    et $t^a t^b$.

Ceci donne
des nouvelles opérations $\oplus_t$ et $\odot_t$
dans $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$ :
pour deux éléments quelconques $a$ et $b$
de $\mathbb{R} \cup \{-\infty\}$,
on pose
\[ a \oplus_t b = \; \log_t(t^a + t^b), \]
\[ a \odot_t b = \; a + b. \]
Remarquons que l’opération $\odot_t$ ne dépend pas de $t$
et coïncide avec la multiplication tropicale.
De plus, vous pouvez vérifier
que, quand $t$ tend vers $+\infty$, la limite
de $\log_t(t^a + t^b)$ est $\max\{a, b\}$.
Donc, l’addition tropicale
est l’opération «limite» de $\oplus_t$
quand $t$ tend vers $+\infty$.

Amibes de courbes algébriques complexes

On peut maintenant revenir à la question
concernant la relation entre les courbes algébriques habituelles
et les courbes tropicales.

Considérons les courbes algébriques complexes
dans le plan complexe $\mathbb{C}^2$.
(En mathématiques, traditionnellement, les nombres complexes
sont le choix le plus naturel de coefficients !)
De manière complètement similaire au cas réel,
une courbe algébrique dans le plan complexe $\mathbb{C}^2$
est l’ensemble des couples $(x, y) \in \mathbb{C}^2$
qui sont les solutions
de l’équation $P(x, y) = 0$, où $P$ est un polynôme à deux variables
et à coefficients complexes.

Il est, peut-être,
difficile d’imaginer une courbe algébrique complexe
(qui est un objet de dimension $2$) dans le plan
complexe $\mathbb{C}^2$ (qui est un objet de dimension $4$).
Pour mieux visualiser ces courbes, on peut utiliser
l’application
\[ \text{Log} : \quad{\mathbb C}^2 \to ({\mathbb R} \cup \{-\infty\})^2 \]
\[ (z,w) \mapsto (\ln \vert z\vert,\ln\vert w\vert). \]
Soit $C \subset {\mathbb C}^2$ une courbe algébrique.
L’ amibe ${\mathcal A}(C)$ de $C$ est l’image de $C$ par
l’application $\text{Log}$.
Voici à quoi ressemble
l’amibe d’une droite complexe dans $\mathbb{C}^2$ :

<fig5718|width=80%>

De façon similaire, pour tout nombre réel $t > 1$,
on peut considérer
l’application
\[ \text{Log}_t : \quad{\mathbb C}^2 \to ({\mathbb R} \cup \{-\infty\})^2 \]
\[ (z,w) \mapsto (\log_t \vert z\vert, \log_t\vert w\vert), \]
et, pour toute courbe algébrique $C \subset {\mathbb C}^2$,
on peut définir
la $t$-amibe ${\mathcal A}_t(C)$ de $C$ comme image de $C$ par
l’application $\text{Log}_t$.

Remarquons qu’une droite tropicale ressemble à une amibe
«rétrécie» d’une droite complexe. En effet,
pour toute droite tropicale,
il existe une famille $\{C_t\}_{t \in ]1, +\infty[}$
de droites complexes dans $\mathbb{C}^2$ telle que
les amibes ${\mathcal A}_t(C_t)$ convergent vers cette droite tropicale
quand $t$ tend vers $+\infty$.

De façon plus générale,
pour toute courbe tropicale dans $\mathbb{T}^2$,
il existe une famille $\{C_t\}_{t \in ]1, + \infty[}$
de courbes complexes dans $\mathbb{C}^2$ telle que
les amibes ${\mathcal A}_t(C_t)$ convergent vers cette courbe tropicale
quand $t$ tend vers $+\infty$.

Cette relation entre le monde algébrique complexe et le monde tropical
est à la base de théorèmes de correspondance
qui ont beaucoup d’applications, par exemple, en géométrie
énumérative
(comme le montre une série de travaux initiée
par le travail de Grigory Mikhalkin [M] sur
la géométrie tropicale énumérative
dans ${\mathbb R}^2$).
Les problèmes de la géométrie énumérative
concernent le dénombrement
d’objets géométriques ( e.g., de courbes algébriques)
vérifiant certaines conditions.
Des introductions élémentaires à la géométrie tropicale
et à ses applications en géométrie énumérative
peuvent être trouvées dans [B] et [HPS].

Références

[B]
E. Brugallé,
Un peu de géométrie tropicale,
Quadrature, n° 74 (2009), 10-22.

[HPS]
P. Harinck, A. Plagne et C. Sabbah (éditeurs),
Géométrie tropicale,
Journées mathématiques X-UPS 2008,
Editions de l’Ecole Polytechnique, 2008.

[M]
G. Mikhalkin, Enumerative tropical algebraic
geometry in $\mathbb{R}^2$
, J. Amer. Math. Soc. 18 (2005),
313—377.

Post-scriptum :

Un grand merci à Michèle Audin, Simon Billouet, Maxime Bourrigan, Erwan Brugallé, Serge Cantat, Gilles Damamme, Damien Gaboriau, Etienne Ghys et Nicolas Schabanel. Leurs remarques et suggestions m’ont beaucoup aidé à améliorer la première version de l’article.

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Para citar este artículo:

Itenberg, Ilia — «Droites tropicales» — Images des Mathématiques, CNRS, 2011

Comentario sobre el artículo

  • Droites tropicales

    le 11 de febrero de 2016 à 14:23, par projetmbc

    Joli article très clair même si la fin nous laisse un peu sur notre faim.

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