La conjecture de Goldbach pour les nombres impairs

Le 20 mai 2013  - Ecrit par  Bruno Duchesne Voir les commentaires (4)
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En 1742, Christian Goldbach conjecturait, dans une lettre à Leonhard Euler, que tout nombre entier est somme d’au plus trois nombres premiers. Harald Helfgott vient de prouver que c’est vrai pour les nombres impairs.

Les mathématiciens Goldbach et Euler entretenaient une correspondance épistolaire et c’est dans la lettre du 7 juin 1742 que Goldbach fit part de sa conjecture à Euler. On trouve sur la page wikipedia de la conjecture une copie manuscrite, en voici une version typographiée plus lisible.

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Lettre du 7 juin 1742 de Goldbach à Euler

On remarquera une fois encore que c’est dans la marge que se trouve la substantifique möelle [1]

Es Scheinet wenigstens, dass eine jede Zahl, die grösser ist als 1, ein aggregatum trium numerorum primerorum sey.

Ce qui donne l’énoncé de la conjecture :

Tout nombre entier strictement plus grand que 1 est la somme d’au plus trois nombres premiers [2].

La conjecture est devenue célèbre grâce à son énoncé très simple et sa très grande difficulté. [3]

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Leonhard Euler

A la lettre de Goldbach, Euler répondit qu’il suffisait de montrer que tout nombre pair plus grand que 4 est la somme de deux nombres premiers. En effet si $n$ est un nombre impair plus grand que 7 alors $n-3$ est pair et s’écrit comme somme de deux nombres premiers $p_1,p_2$. Ainsi, $n=3+p_1+p_2$ et la conjecture est prouvée pour les nombres impairs. C’est l’énoncé pour les nombres pairs, « Tout nombre pair plus grand que 4 est somme de deux nombres premiers » qui est actuellement reconnu sous le terme de Conjecture de Goldbach. L’énoncé pour les nombres impairs « Tout nombre impair plus grand que 7, est la somme de trois nombres premiers » est désormais connu sous le nom de conjecture faible ou conjecture ternaire.

Harald Helfgott vient d’annoncer une démonstration de la conjecture faible, celle pour les nombres impairs. Il a déposé sa preuve, lundi 13 mai au soir, sur le site de prépublication Arxiv.org. Voici son article [4].

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Depuis, les travaux de Vinogradov [5], on sait que tous les nombres impairs plus grand qu’un certain nombre $C$ peuvent s’écrire comme somme de trois nombres premiers. Il suffit donc de vérifier la conjecture pour les nombres plus petits que $C$ ! Malheureusement le nombre $C$ était immense [6] et il était inimaginable de vérifier (même avec les ordinateurs les plus puissants du monde) la conjecture pour tous les entiers plus petits que $C$.

Tout le travail de Helfgott a été d’améliorer et réinventer les techniques développées par Hardy-Littlewood [7], Vinogradov, Ramaré [8], Tao [9] et d’autres reposant sur la méthode du cercle pour rendre la conjecture accessible à des calculs par ordinateur. Ces calculs ont été implémentés par Dave Platt et ont été réalisés, en partie, au mésocentre de calcul MesoPSL de l’observatoire de Paris.

L’ordinateur a été utilisé pour vérifier la conjecture jusqu’à $8.875\cdot 10^{30}$ et vérifier aussi l’hypothèse de Riemann généralisée sur des zones plus grandes que celles connues auparavant. Ce sont ces derniers calculs concernant l’hypothèse de Riemann généralisée qui ont nécessité l’utilisation de supercalculateurs

La conjecture pour les nombres impairs semble désormais prouvée mais celle pour les nombres pairs résistera sûrement longtemps encore.

Post-scriptum :

L’auteur remercie Harald Helfgott d’avoir pris le temps de lire ce billet et d’avoir aimablement fourni une photo de lui ; ainsi que Sylvie Benzoni, Serge Cantat et Etienne Ghys pour leurs commentaires.

Notes

[1Comme pour le grand théorème de Fermat.

[2A l’époque, la convention était de considérer 1 comme un nombre premier, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

[3Lors de la sortie du roman Oncle Petros et la conjecture de Goldbach l’éditeur offrait un prix d’un million de dollars à qui montrerait la conjecture dans l’année.

[4Le papier de Helfgott est long, plus de 130 pages, et la vérification avant acceptation et publication du résultat prendront du temps.

[5En fait, quelques années auparavant, Lev Schnirelmann avait prouvé, qu’il existe un nombre $C$ tel que tout entier peut s’écrire comme somme d’au plus $C$ nombres premiers.

[6Il était même non-explicite dans les travaux de Vinogradov. On connaissait son existence mais pas sa valeur.

[7Hardy et Littlewood avaient montré la conjecture pour les entiers impairs suffisamment grands sous l’hypothèse de Riemann généralisée.

[8Olivier Ramaré a montré en 1995 que tout nombre entier plus grand que 2 est somme d’au plus six nombres premiers.

[9Terence Tao a montré l’année dernière que tout nombre impair plus grand que 1 est somme d’au plus cinq nombres premiers. Le journal Le Monde en parlait le 5 mai 2012.

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Pour citer cet article :

Bruno Duchesne — «La conjecture de Goldbach pour les nombres impairs» — Images des Mathématiques, CNRS, 2013

Crédits image :

Image à la une - Harald Helfgott a gentiment accepté l’utilisation de sa photo.

Commentaire sur l'article

  • La conjecture de Goldbach pour les nombres impairs

    le 29 mai 2013 à 09:42, par gilbert lefeu

    Bonjour
    l’arithmétique modulaire, permet de construire un crible de nombres premiers par la décomposition en somme de deux premiers des multiples de 30, "ie ; on prend la conjecture à l’envers. Ce crible : appelons le, crible de Goldbach c’est un corollaire du crible Eratosthène. On utilise :
    a)les multiples de 30 congrus à r modulo P premier
    b) les entiers P’ premiers > 5 ; congrus à r modulo P et où :
    30k - P’ = c , qui est divisible par P.
    Donc ; si P’, n’est pas congruent à P alors son complémentaire q’ tel que : 30k - P’ = q’ est un nombre premier.
    P < à la racine carrée de 30k
    P’< à 30k/2.
    il en vient un raisonnement par l’absurde ; tout entier 30k est somme de deux premiers ; et de façon générale on peut étendre ce crible, à toutes les classes d’entiers pairs , en progression arithmétique de raison 30.
    d’où la conjecture est vraie...!

    Répondre à ce message
    • La conjecture de Goldbach

      le 6 octobre 2015 à 16:11, par BERKOUK

      Bonjour
      avec mes profond respects des travaux du Dr Harald Helfgott ( et de Vinogradov ... ) , voici ma démonstration de la conjecture de C.Goldbach , aussi bien la faible que la forte sans avoir besoin du concours de l’ordinateur :

      http://vixra.org/pdf/1507.0196v3.pdf

      je vous souhaite bonne lecture

      BERKOUK Mohamed

      bellevue-2011 hotmail.com

      Répondre à ce message
  • La conjecture de Goldbach pour les nombres impairs

    le 7 novembre 2022 à 14:43, par gilbert lefeu

    Bonjour
    Il est impossible à partir d’une limite n >10¹⁸ d’infirmer la conjecture de Goldbach, alors qu’elle a été vérifiée lors des limite n précédentes !
    Dans le cas contraire on aurait une disparition des nombres premiers q∈[n ; 2n] des limites n précédentes qui ont vérifiée et criblée la conjecture.

    Principe de la descente infinie de P de Fermat .

    Document joint : principe_crible_goldbach.pdf
    Répondre à ce message
  • La conjecture de Goldbach pour les nombres impairs

    le 7 novembre 2022 à 14:45, par gilbert lefeu

    Suite du document complet lié à cette conjecture avec les programmes .

    Document joint : crible.algo.g.e_et_eg2.pdf
    Répondre à ce message

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