Revue de presse avril 2022
Le 1er mai 2022 Voir les commentaires
La recherche et l’éducation n’auront pas été un sujet majeur dans la campagne présidentielle, même si le président candidat a voulu, surtout entre les deux tours, en faire un axe important du nouveau quinquennat qu’il briguait. Il faut dire que la politique menée dans ces domaines depuis cinq ans, orchestrée par Frédérique Vidal et, surtout, par Jean-Michel Blanquer, n’était pas vraiment de nature à galvaniser enseignants et chercheurs et à les mobiliser en faveur d’Emmanuel Macron. Quant à l’opinion française en général, une enquête du CEVIFOP indique que le système scolaire ne vient qu’au dixième rang dans ses préoccupations.
Mais il y a un sujet qui n’a pas cessé d’alimenter les sites d’information : le sort réservé aux mathématiques dans la formation des lycéens. Les diverses associations et sociétés savantes de mathématiques et de sciences ont continué à parler d’une seule voix. Le collectif qu’elles ont constitué a adressé avant le premier tour une lettre ouverte aux candidats, parue comme tribune dans Le Figaro, pour les alerter sur l’urgence « d’améliorer le niveau des élèves en mathématiques ». Puis, au lendemain du second tour, ce collectif a publié un communiqué : 1h30 de maths pour « sauver les maths » ? Remède illusoire. C’est que, parallèlement, les alertes sur ce sujet, provenant des secteurs les plus divers de la société civile, se sont multipliées. Ainsi, 30 patrons de très grandes entreprises (comme Orange, LVMH, BNP Paribas ou Publicis) ont demandé, dans une tribune du magazine Challenges que les maths soient rétablies dans le tronc commun du programme au lycée. L’information a été relayée dans Le Figaro, qui a interrogé à ce sujet l’un des signataires, Patrice Caine, PDG de Thales, dont le diagnostic est clair est net : « Il n’y a pas suffisamment d’ingénieurs et de scientifiques en France ». Dans un article de Science et Avenir sur l’enseignement des mathématiques, Charlotte Mauger (qui vient de rejoindre la rédaction de notre revue de presse : bienvenue à elle !) explique « pourquoi les scientifiques sont inquiets pour l’avenir de la discipline ». D’un autre côté, le site gouvernemental Vie publique, sous le titre « Mathématiques : comment revaloriser la place de cette matière au lycée ? », présente l’état des lieux, avec des chiffres qui montrent la dégradation de la situation depuis la mise en œuvre de la réforme Blanquer, puis les solutions proposées, dont l’insuffisance saute aux yeux. Enfin, une tribune sévère mais lucide du Figaro tente de répondre à la question « Pourquoi le niveau des élèves en mathématiques est-il si mauvais en France ? ». L’auteur prend appui sur l’étonnement exprimé par cette collégienne tout juste arrivée d’Ukraine devant la facilité des cours de maths en France (nous en parlions dans la revue de presse de mars). Il poursuit en pointant la contradiction qu’il y a entre la défense d’une politique désastreuse menée avec obstination cinq ans durant et les promesses d’un virage complet à l’aube du deuxième quinquennat : « ici on vante la réforme scolaire passée et en même temps la réforme de la réforme à venir ». On préférera cependant ne pas suivre le polémiste jusqu’au bout de son propos, où la dénonciation du « pédagogisme » et l’invocation incantatoire du « retour des savoirs fondamentaux » sont un peu trop marquées idéologiquement.
Vous trouverez d’autres échos de ces débats sur l’éducation dans la rubrique Enseignement, où il sera aussi beaucoup question de parité, sujet de plus en plus sensible, dans l’éducation en général, en sciences en particulier et encore plus en mathématiques.
Toutes les autres rubriques habituelles vous attendent également, bien sûr. Vous y rencontrerez au fil de l’eau : des poissons arithméticiens (est-ce grâce à leurs arêtes qu’ils peuvent atteindre des sommets mathématiques, sans jamais perdre la face ?) ; tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le new management sans oser le demander ; une explication à l’échec de François Bayrou à la présidentielle de 2007 ; un hommage à Marion Créhange, qui a soutenu la première thèse d’informatique en France il y a soixante et un ans, et qui vient de nous quitter ; un congrès Math en Jeans ; des demi-finales de championnats de jeux mathématiques (Math en Short ?) ; une BD produite par des espions ; ou encore Antoni Gaudi et sa Sacrée Famille.
Que nos brins de convallaria majalis vous accompagnent agréablement dans votre périple !
Recherche
Origami et équation d’Euler
Deux informaticiens et experts en origami ont récemment publié un article sur l’aplatissement des polyèdres quelconques en un nombre dénombrable de plis. QuantaMagazine développe l’historique et les enjeux de cette publication.
Le même magazine détaille en profondeur des études récentes concernant la recherche sur l’équation d’Euler, et plus précisément la recherche numérique d’éventuels blow-up (éclatements) de solutions. Ces dernières recherches se basent sur des solutions autosimilaires et l’introduction de réseaux de neurones dits physiquement informés (PINN) pour l’étude de tels profils.
Poissons et vérité scientifique
« Les poissons, maîtres du calcul » (Le Monde, accès restreint), « Oui, ces poissons savent aussi faire des maths » (HuffPost), « Les poissons savent compter ! » (L’Obs)... Derrière ces titres intrigants, de nombreux journaux relaient une étude parue dans Nature sur les capacités arithmétiques de certains poissons. Des chercheurs de l’université de Bonn ont en effet montré que deux espèces différentes sont capables d’effectuer avec une grande précision des additions et soustractions sur de petits nombres. Ils rejoignent donc le club restreint des espèces capables d’effectuer de telles tâches.
Enfin, dans le mensuel Ça M’intéresse, une climatologue, un mathématicien et une chercheuse en enseignement des sciences tentent de répondre à la question : « La démarche scientifique permet-elle d’atteindre la vérité ? ».
Vie de la recherche
On commence avec une note positive à la lecture de cette interview de Christophe Besse, directeur de l’Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions (Insmi), pour le site d’info du CNRS. Il y évoque « une année riche pour les mathématiques françaises et mondiales » avec le Congrès international des mathématiciens (et des mathématiciennes…) et les Assises françaises des mathématiques. Celles-ci se déroulent en trois phases. La première débouchera bientôt sur une actualisation du fameux rapport de 2015 qui avait « révélé que 15 % du PIB français était alors impacté par les mathématiques ». La seconde vient de commencer et consiste en « sept groupes de travail » qui « aborderont par exemple l’impact des mathématiques sur la société, notamment sur le développement économique de la compétitivité et de l’innovation, mais aussi les carrières, académiques et dans les entreprises de toute taille ». La troisième phase aura lieu du 14 au 16 novembre à Paris, et le rapport ainsi que les propositions des groupes de travail seront discutés par les différents acteurs et actrices de la communauté autour de tables rondes.
Plusieurs sujets graves concernant la communauté mathématique mais plus généralement la communauté scientifique sont à la une ce mois-ci. La politiste Stéphanie Balme et le physicien Pierre Lemonde cosignent une tribune dans Le Monde (abonné·e·s) pour réclamer « une réflexion d’ensemble » au sujet des sanctions imposées à la Russie et aux chercheurs et chercheuses russes. Alors que « seule la Chine, parmi les dix principaux pays scientifiques collaborateurs de la Fédération de Russie, a choisi de maintenir ses collaborations », ils notent que « ces réactions […] ne sauraient cacher la complexité des réponses à apporter à la situation ». Ils relèvent un certain nombre d’ « effets en cascade dévastateurs » pour la Russie, dont il a aussi été question ce mois-ci sur France Culture et dans L’Obs. Ils plaident pour la création d’une entité responsable de « coordonner une diplomatie scientifique globale » et alertent, avec la Chine en ligne de mire : « Car la guerre en Ukraine pourrait préfigurer d’autres tragédies impliquant des acteurs scientifiquement plus puissants et dont nous sommes autrement plus dépendants. […] Il conviendrait de s’y préparer. »
Second enjeu pour la communauté scientifique mondiale dont il a été question ce mois, la gestion de la crise climatique et la sortie du nouveau rapport du groupe de travail III (qui étudie l’atténuation du changement climatique) du GIEC. France Inter revient sur le mouvement Scientist Rebellion, avec « certains scientifiques [qui], voyant que les rapports ne suffisent pas pour inverser la tendance, vont encore plus loin, en s’engageant dans la désobéissance civile »… Et ce ne sont pas que des jeunes !
Enfin, revenons en France avec cette émission d’Entendez-vous l’éco ? sur France Culture. Il y est question de New Public Management : « il s’agit, après avoir dévalorisé, dénigré la fonction publique, les valeurs du service public, les règles du service public, voire même du droit administratif, de les coloniser par la gestion privée » d’après l’un des intervenants. Et une autre intervenante d’ajouter, au cas où vous en doutiez : « Et c’est pareil à l’université. Les universités sont incitées à aller chercher des ressources auprès des étudiants, auprès des familles et des entreprises des collectivités territoriales. Et pourquoi ? Parce que l’Etat ne leur fournit plus assez pour qu’elles assurent la mission de service public ». En parlant de manque de moyens à l’université, nous avons assisté à une panne révélatrice des dysfonctionnements dans la recherche et l’enseignement supérieur français ce mois-ci, et c’est relayé dans Le Monde (abonné·e·s). La plateforme Galaxie, « dont l’architecture technique et fonctionnelle remonte à près de vingt ans », et qui centralise les dossiers pour les candidatures aux postes de maîtresses de conférences et de professeures, affichait simplement un message « Attention, Galaxie inaccessible ». En pleine affaire McKinsey, la CGT FERC Sup a alors titré son communiqué « Plantage de Galaxie et Parcoursup : Tous ces cabinets privés pour ça ? ». Le SNESUP FSU, SUD Education, tous ces syndicats ont pointé « la précarité et les inégalités entre les établissements », « la maltraitance des candidat·e·s »…
Deux articles sur la science ouverte pour clore cette rubrique. Le site d’info du CNRS propose une interview d’Alain Schuhl, physicien et directeur général délégué à la science (dont la mission est de « [coordonner] l’action des dix instituts du CNRS, [veiller] à promouvoir l’interdisciplinarité et [organiser] les partenariats avec les divers acteurs de la recherche, à l’échelle régionale, nationale, européenne ou internationale »), qui proclame : « 100 % des articles du CNRS en accès ouvert sans frais supplémentaire pour les scientifiques, c’est possible ! ». Le magazine Wired autour de la tech relaie, lui, une étude intitulée Biosecurity in an age of open science. La science ouverte « signifie également que les vérifications nécessaires pour s’assurer que des informations risquées ne sont pas mises en ligne sont moins méticuleuses ». Et selon ses auteurs, le problème concerne les biologistes, mais aussi les matheux et les matheuses travaillant dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Applications
Les mathématiques se sont invitées à plusieurs titres dans la campagne présidentielle. Sans parler ici des intenses débats sur leur place dans la nouvelle organisation du lycée (voir pour cela notre rubrique Enseignement), elles étaient présentes sur au moins deux terrains. D’abord, celui des réseaux sociaux. Les algorithmes peuvent-ils orienter le vote en favorisant certains candidats ?
Depuis l’élection controversée de Donald Trump aux États-Unis en 2016, la question resurgit à chaque rendez-vous électoral important dans les pays démocratiques. Le mathématicien David Chavalarias y répond affirmativement dans son livre Toxic Data paru au mois de mars. Il considère que les algorithmes des réseaux sociaux contribuent à une plus large diffusion de la parole conservatrice et qu’il y a là un danger pour la démocratie. France Info consacre un article à ce sujet et nous avons parlé de Toxic Data dans les Parutions de notre précédente revue de presse.
Mais les maths interviennent aussi dans les discussions sur les modes de scrutin. Celui que nous appliquons pour nos présidentielles est loin d’être le plus équitable. C’est en tout cas l’avis de deux mathématiciens, Antoine Houlou Garcia et Rémi Peyre, qui s’en expliquent dans Ouest-France, en présentant le « scrutin de Condorcet » (ou système du vote préférentiel), qui, s’il avait été appliqué lors de l’élection de 2007, aurait porté au pouvoir François Bayrou, que les électeurs préféraient en fait à tous les autres candidats. Rappelons que le deuxième tour de cette élection avait opposé Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy et que ce dernier l’avait emporté. On attend avec intérêt une simulation analogue pour l’élection qui vient de s’achever. La système de vote en vigueur pour les élections législatives est encore différent, même s’il s’agit aussi d’un scrutin « uninominal à deux tours ». Nice-Matin en résume le mode d’emploi et TF1 Info explique pourquoi il est également très contesté.
- Ordinateur quantique à Espoo en Finlande
Pour le cryptanalyste Ludovic Perret, qui s’exprime dans une tribune du Monde (accès restreint), l’Europe doit mettre à jour d’urgence les nouveaux protocoles de sécurité en ligne avec l’avènement des ordinateurs quantiques. Si la recherche de pointe européenne n’est pas spécialement à la traîne, la normalisation postquantique est en retard sur celle qui a lieu aux États-Unis. Le Figaro documente malgré tout la forte croissance récente des investissement des entreprises française dans le quantique.
Ces deux articles ne répondent cependant pas à une question d’importance :
qu’en sera-t-il de la suprématie des chats de Schrödinger sur l’internet postquantique ?
Une équipe du Centre de mathématiques appliquées de l’École polytechnique a mis au point un dispositif permettant d’orienter les sportifs non-voyants à l’aide du son. Le journal Le Monde y consacre une infographie.
- La forme des oeufs est optimale à de nombreux égards
Une collaboration anglo-ukrainienne est parvenue à trouver une équation décrivant très bien la forme des oeufs. Ce problème, qui s’est avéré très ardu, a été résolu grâce à des approximations successives à partir d’ovoïdes et d’ellpisoïdes. Il y a des applications potentielles, notamment la conception de récipients plus solides que les récipients sphériques. Les résultats sont publiés dans les Annales de l’académie des sciences de New York. On en parle sur le site de l’université du Kent.
Un astrophysicien de l’université de Berne a réussi à donner de nouvelles solutions à l’équation des phases, qui décrit la lumière réfléchie par des corps célestes au cours du temps. Cette contribution est d’autant plus remarquable que le problème est ancien, et qu’elle ne fait appel qu’au papier et crayon, pour reprendre les termes de son auteur.
IA
La méthode scientifique, sur France Culture, est revenue fin mars sur les questions d’éthique dans l’Intelligence Artificielle.
L’École normale supérieure de Paris Saclay lance en ce moment un appel à candidatures pour un nouveau diplôme en Intelligence Artificielle.
Enseignement
L’éducation et la recherche dans les campagnes présidentielle et législative
Avant le premier tour, les programmes des 12 candidats avaient été passés en revue dans les médias (par exemple Le Parisien, France 24, L’Humanité, 20 minutes, Challenges ou Superprof, ainsi que par des syndicats d’enseignants (comme le SNUipp, le SNPTES) ou le SNES. Et sur le chapitre spécifique de la recherche, Le Monde (accès restreint) a analysé les propositions des candidats, tout en constatant qu’elles avaient été « peu débattues depuis le début de la campagne électorale ».
L’exercice a été repris entre les deux tours, où l’attention s’est d’abord portée sur le débat Le Pen – Macron. Le Figaro a analysé le volet éducation de cet échange entre les deux finalistes, mais force est de constater qu’il n’a constitué qu’une partie très marginale de l’émission, qui n’aura pas marqué les téléspectateurs. Ni la candidate du RN ni le président sortant n’ont été convaincants, ce dernier devant assumer un changement de discours et des atermoiements, notamment sur la question des salaires des enseignants. Le site vousnousils a recueilli sur les réseaux sociaux des réactions peu enthousiastes… Et le compte rendu qu’a fait L’Obs du débat était particulièrement sévère.
Parmi les nombreux appels parus dans l’entre-deux tours, qui alertaient contre le danger d’une arrivée au pouvoir de Marine Le Pen, notons celui d’un « collectif rassemblant plus de soixante-dix acteurs de la recherche et de l’enseignement » qui, dans une tribune du Monde (accès restreint), estimaient « qu’une victoire de l’extrême droite – qui a toujours montré sa vraie identité faite d’intolérance, de stigmatisation, de censure, de menace et de défiance vis-à-vis de la science – se traduirait par un changement de civilisation, en rupture avec les Lumières. ». L’appel aura probablement été entendu, car une étude publiée par le site vousnousils prévoyait que « près de la moitié des enseignants [étaient] prêts à voter Macron au second tour ». Notons au passage un incident survenu le 7 avril sur la chaîne CNews , au cours de l’émission Face à l’info, où a été diffusé un tableau censé montrer la répartition des intentions de vote au premier tour parmi les enseignants, et provenant, nous disait-on, du très sérieux CEVIFOP. Cinq catégories avaient été choisies : extrême gauche, gauche, centre, droite et (admirez l’euphémisme) droite nationale.
Les pourcentages affichés étaient respectivement de 31 %, 47 %, 28 %, 15 % et 17 %. Soit un total respectable de 138 %, dont aucune république bananière n’aurait jamais osé rêver, et qui a tout de même fait légèrement douter l’animateur de service. Mais il a tout de même fallu attendre le lendemain pour que la chaîne de Monsieur Bolloré diffuse un bref démenti, accompagné d’un tableau rectifié.
Relevée par… Yahoo !Sport, cette histoire, qui paraîtra peut-être burlesque à bien des gens, n’a pas du tout fait rire Claire Lommé, qui lui a consacré un billet sur son excellent blog, si souvent cité ici. Elle y relève bien d’autres absurdités de ce tableau qu’elle reproduit.
L’équipe de campagne du président sortant a-t-elle utilisé des moyens illicites pour tenter de capter le vote des enseignants ? C’est en tout cas ce que dénoncent des syndicalistes, notamment en Auvergne, où, selon France 3 Auvergne Rhône-Alpes, plusieurs professeurs ont reçu des courriels appelant à voter Macron sur leur messagerie professionnelle. En l’occurrence, c’est un annuaire de l’Éducation nationale qui aurait été utilisé pour cette diffusion massive de courriels.
Curieusement, alors que l’article est intitulé « Présidentielle 2022 : la drôle de campagne de LREM envers les profs » et ne met en cause que les soutiens de Macron, le sous-titre indique : « Des professeurs d’Auvergne ont reçu des mails ou des appels téléphoniques venant de candidats à l’élection présidentielle », laissant ainsi entendre que le même procédé aurait été utilisé par d’autres.
Étonnamment, les questions éducatives ont été bien plus présentes dans les médias après la réélection d’Emmanuel Macron. Probablement parce que celui-ci avait décidé d’en faire une priorité de son action, ou tout au moins de sa campagne pour les législatives, déjà bien engagée ! On a donc assisté à un défilé de représentants du monde de l’éducation dans les médias, qui ont fait des supputations sur ce que serait la nouvelle politique dans ce domaine et ont posé à leurs invités des questions particulièrement judicieuses, comme « qu’attendez-vous du prochain ministre de l’Éducation nationale ? » ou « Souhaitez-vous que M. Blanquer soit remplacé ? », on consultera à ce sujet, entre bien d’autres sites, La Gazette des communes (accès restreint), France Info, Les Échos, Public Sénat ou encore Marianne.
Une des questions les plus délicates concerne les augmentations de salaire promises aux enseignants. Le discours à ce sujet a beaucoup fluctué. Jean-Michel Blanquer avait très clairement annoncé que celles-ci supposeraient une contre-partie, l’acceptation de tâches supplémentaires (pas du tout définies, d’ailleurs), ouvrant la voie à des rémunérations « à la tête du client ». Le président candidat avait repris le même discours, expliquant qu’il était juste que les bonnes volontés soient récompensées, avant de faire machine arrière devant le tollé provoqué par ces propos chez les intéressés.
Mais les affirmations, martelées depuis le débat de l’entre-deux tours, de sa promesse de donner à tous une augmentation de 10 % sans condition n’ont pas pour autant déchaîné l’enthousiasme, et ont d’ailleurs été nuancées par l’entourage d’Emmanuel Macron. Ce qui laisse planer un doute sérieux sur ses véritables intentions. Public Sénat parle du « rétropédalage » de Macron et explique que, s’il s’engage effectivement à une augmentation inconditionnelle de 10 % pour tous, il persiste dans son intention d’accorder davantage à celles et ceux qui accepteront de nouvelles tâches. Sur cette question des salaires des profs, voir aussi France Inter, France Info, Boursorama ou TF1.
Notons que Macron a également reconnu que son gouvernement avait commis une erreur à propos des mathématiques au lycée et promis de revenir là aussi en arrière (mais les réactions des associations et sociétés savantes soulignent bien que le recul annoncé est totalement insuffisant vu l’ampleur du problème).
En revanche, le président persiste et signe sur ses projets de donner beaucoup plus d’autonomie aux chefs d’établissement, ce qui provoque évidemment l’ire des syndicats et la méfiance d’une bonne partie de la communauté éducative (voir Les Échos, Mediapart (accès restreint) ou le blog Demain l’École.
Le site Street Press attire notre attention sur le refus de la France de garder sur son sol des étudiants maghrébins et ouest-africains qui ont fui la guerre en Ukraine : le gouvernement entend renvoyer la plupart d’entre eux dans leur pays d’origine.
Au lycée Lesage de Vannes (Morbihan), deux professeurs (l’un en second cycle, l’autre en classes préparatoires) veulent redynamiser l’enseignement, dévalorisé auprès des lycéens par la réforme du baccalauréat. Ils ont créé à cet effet « un laboratoire pour redorer l’image des mathématiques », nous dit Ouest-France. Un de leurs objectifs est de « susciter des vocations chez les filles ».
Parité
On le sait, l’accès des filles aux formations scientifiques est un problème très aigu, particulièrement en mathématiques. Sous le titre « Filles et mathématiques : aux racines du problème », Madame Figaro lui consacre un long article, donnant notamment la parole à une lycéenne contrainte, contre son gré, à abandonner la spécialité mathématique en Terminale et à la sociologue Clémence Péronnet, dont le livre La bosse des maths n’existe pas a été cité récemment dans notre revue de presse.
Depuis 2020, l’association les DesCodeuses aide des habitantes des quartiers prioritaires à se reconvertir dans le développement Web. Le programme les encourage à s’imposer dans un secteur où les femmes restent rares. Le Monde (accès restreint) nous en dit plus.
Pour tendre vers plus de parité, des mathématicien.ne.s marseillais.es ont créé au CIRM, à Luminy, une école de mathématiques pour les filles : Les Cigales. Des stages leur sont proposés pendant les vacances scolaires pour les convaincre qu’elles ont toutes les capacités pour briller dans ces filières et les inciter à oser. Reportages sur le site Marcelle, sur celui du CIRM et dans La Provence.
Dans une tribune du Monde (accès restreint), un collectif d’anciennes polytechniciennes proclame : « Nous, polytechniciennes, nous nous unissons pour promouvoir les mathématiques auprès des jeunes filles ».
Mais le même journal explique, dans un article en accès restreint, que, cinquante ans après l’admission d’Anne Chopinet, sa première élève féminine, l’École polytechnique « reste un bastion masculin ».
Certains y verront peut-être un lien de cause à effet : on apprenait, toujours dans Le Monde, qu’une enquête interne avait révélé que des violences sexuelles avaient été commises dans l’établissement, avec 11 viols ou tentatives de viol. Trois jours plus tard, le même journal précisait qu’une enquête pour viols et agressions sexuelles avait été ouverte. Les deux articles sont réservés aux abonné.e.s.
Le site Welcome to the jungle publie une recension du livre The Authority Gap, dans lequel Mary Ann Sieghart, une journaliste politique britannique « qui a fait une carrière brillante dans un monde très masculin », explique pourquoi les femmes sont moins prises au sérieux que les hommes dans leur exercice de l’autorité. « Chaque femme a des anecdotes à raconter sur le fait d’avoir été sous-estimée, ignorée, traitée avec condescendance et généralement pas prise au sérieux comme un homme. »
Ceci explique-t-il cela ? Un article du Monde (accès restreint) explique que, dans les écoles et les entreprises, les politiques d’incitation visant à attirer plus de femmes vers les métiers du numérique ont échoué : elles plafonnent toujours à 17 % des effectifs.
À l’honneur
Marion Créhange, une pionnière de l’informatique, s’est éteinte le 28 mars 2022. En 1961, elle est la première personne en France à avoir soutenu une thèse en informatique. Intitulée « Structure du langage de programmation », elle pose les fondements de l’informatique, avant même que ce terme ne soit usité en France (sa première occurrence remontant à 1962). Au cours de sa brillante carrière, elle a travaillé au Centre de Recherche en Informatique de Nancy (CRIN, actuellement LORIA), où elle était professeure émérite jusqu’à son décès. Depuis les langages de programmation, elle s’est dirigée vers les informations complexes et l’interaction humain-machine.
Elle a notamment été faite Chevalier de l’Ordre des Palmes Académiques. Le journal Numerama dresse une biographie de Marion Créhange, agrémentée des témoignages de deux de ses anciennes étudiantes et de Natacha Portier, professeure d’informatique à l’ENS Lyon, rappelant ainsi que les femmes étaient présentes dès les prémices de la discipline.
On apprend aussi ce mois-ci la mort de Maurice Lévy, le créateur de la Cité des sciences et de l’industrie. Ce physicien accordait la même importance aux muséographies artistiques et scientifiques. Il est décédé le 13 avril à l’âge de 99 ans.
En solidarité avec Azat Miftakhov, une seconde édition du Azat Miftakhov Day prendra place les 5 et 6 juin 2022. Pour rappel, ce mathématicien est détenu par les autorités russes depuis février 2019. Ces deux journées sont consacrées à des conférences sur les droits de l’homme en Russie et aux scientifiques qui s’engagent pour leur respect. Nous avions parlé de la mobilisation pour Azat Miftakhov dans notre revue de presse du mois de février, et avant cela dans celles de mars et de juin 2021.
Le site IsraelValley annonce que Oded Goldreich va enfin pouvoir recevoir le Prix Israël de mathématiques. Comme nous le relations dans la rubrique Recherche de notre revue de presse de décembre 2021, ce prix prestigieux avait été attribué au professeur d’informatique israélien en 2021, mais le ministre de l’Éducation s’y était opposé, arguant du soutien du chercheur à des appels au boycott de son pays. Le tribunal israélien vient heureusement de mettre un point final à cette affaire, en ordonnant au ministre de rendre son prix à Oded Goldreich.
Les récompenses commencent à pleuvoir au CNRS. Les lauréat.es des médailles de bronze et d’argent sont connu.es et les mathématiques ne sont pas oubliées. Parmi les décorés de la médaille de bronze, deux mathématiciennes : Sepideh Mirrahimi de l’Institut Montpelliérain Alexander Grothendieck, qui travaille sur des modèles mathématiques pour la biologie et l’écologie ; et Penka Georgieva, de l’Institut de Mathématiques de Jussieu - Paris Rive Gauche, qui s’intéresse à la géométrie algébrique et la topologie. Bertrand Maury quant à lui a reçu la médaille d’argent décernée par le centre de recherche. Membre du laboratoire de mathématiques d’Orsay, ses travaux portent sur les interactions des mathématiques : flux de particules ou modélisation du système respiratoire.
Diffusion
Scolaire
Le mois d’avril a vu des élèves de la France entière, du primaire au lycée, s’affronter sur la résolution d’énigmes à l’occasion de la demi-finale du célèbre championnat de la Fédération Française des Jeux Mathématiques, comme le notent Centre-Presse à Poitiers (86) et Ouest-France à Bellevigny (85).
Encore en Vendée, Ouest-France salue la visite dans un collège à Pouzauges de Manu Houdart, un mathématicien « showman » qui apparaît bien souvent dans ces lignes, et Le Parisien (abonné·e·s) relate l’événement Math’gic à Gennevilliers (92), durant lequel des élèves de toute la ville ont eu la joie de participer à des ateliers ludiques, les aidant à porter un regard différent sur les mathématiques.
On ne présente plus MATh.en.Jeans ! La 33e édition de ses congrès annuels se déroule au cours de ce printemps 2022. Neuf villes françaises (Avignon, Bordeaux, Dijon, La Rochelle, Lille, Lyon, Nantes, Perpignan et Saclay), ainsi que Berlin et Bruxelles, ont rassemblé ou rassembleront un grand nombre d’élèves, encadrés par leurs professeurs de mathématiques et les chercheurs partenaires. Il faut ajouter à cela un congrès en ligne qui a eu lieu le 1er avril pour la zone Amérique du Nord. Par exemple, le congrès de Lyon, qui s’est tenu les 14 et 15 avril, a réuni environ 160 élèves de la région Auvergne Rhône Alpes et a connu un grand succès.
Grand public
La Cité des Sciences et de l’Industrie a accueilli à la fin du mois la semaine « Science Infuse », donnant la parole à une farandole de jeunes scientifiques (ingénieur·e·s, chercheur·euse·s, doctorant·e·s) de tous bords pour une série de conférences grand public.
Les Récoltes et Semailles d’Alexandre Grothendieck ont occupé une bonne place dans chaque édition de notre revue de presse depuis leur parution il y a quelques mois. Ce mois-ci, le Collège de France accueillait la doctorante en littérature Odile Chatirichvili pour un webinaire fournissant des clés d’étude sur cette œuvre monumentale, dans le contexte des nombreuses autres autobiographies de mathématicien·ne·s du XXe siècle.
Parcours de mathématiciennes
« Sous la blouse », c’est le nom d’une série de podcasts produite par Science & Vie qui interroge des scientifiques sur leur parcours et le quotidien de leur métier. Un titre passablement inadapté quand on parle de recherche en mathématiques, rappelle avec humour au début de l’épisode l’invitée Sylvie Benzoni-Gavage, qui ne porte une blouse que lorsqu’elle fait de la peinture ! Quoi qu’il en soit, la passionnante interview de cette professeure et directrice de l’Institut Henri Poincaré revient sur son parcours de chercheuse, et en particulier sur son expérience en tant que femme dans la communauté trop masculine des mathématiques académiques ; elle prodigue d’ailleurs d’inspirants conseils aux jeunes mathématiciennes en herbe. Notons au passage que la même Sylvie Benzoni-Gavage publie dans Sciences et Avenir une courte chronique expliquant comment la modélisation mathématique vient en appui à la recherche en biologie.
Quanta Magazine interviewe (en anglais) la mathématicienne Lillian Pierce sur son parcours brillant qui l’a menée d’un petit village de Californie à un poste de professeure à la prestigieuse université de Duke, sa passion innée pour les nombres et son rapport à la musique.
Enfin, pour promouvoir l’attrait des formations en informatique et mathématiques auprès des filles, l’Université de Bordeaux a organisé ce mois-ci l’événement MIMM (Moi Informaticienne — Moi Mathématicienne) avec au programme des conférences et présentations de métiers et d’études.
À voir, à écouter
- Michèle Sebag et Yann Le Cun
La Méthode Scientifique de France Culture a consacré une nouvelle émission à l’intelligence artificielle. Le focus est mis cette fois-ci sur le concept d’apprentissage : comment donner à une machine la capacité d’apprendre par elle-même, à la manière d’un jeune enfant qui découvre le monde ? La réponse se trouve-t-elle dans les fameux « réseaux de neurones » ? Les invité·e·s, Michèle Sebag et Yann Le Cun, tâchent d’y répondre.
Justement, France 4 vient de lancer une série ludique et pédagogique pour faire aborder les mathématiques aux enfants (6-9 ans), s’enthousiasme le Figaro. L’émission, baptisée Organisation Super Insolite, met en scène deux jeunes agent·e·s au service d’un gouvernement d’enfants, chargés d’enquêter sur des phénomènes mystérieux qui les mèneront à des questionnements mathématiques simples. À essayer !
Parutions
Lutte anti-terroriste, contre prolifération, géopolitique, contre espionnage, cyberdéfense : voilà ce à quoi se consacre la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure). Ce nom évoque d’emblée les « affaires » plus ou moins occultes, les agents secrets, les espions et autres barbouzes, et pas tellement la création culturelle et artistique ! Pourtant, la DGSE a déjà inspiré une série télévisée à grand succès (Le bureau des légendes). Et à l’occasion de son quarantième anniversaire (célébré le 2 avril), la voilà qui se lance dans la bande dessinée ! Elle parraine en effet la publication de Qui a cassé Enigma ?, coédité par le ministère des Armées et Nouveau Monde éditions. Un article du Point nous parle du travail du dessinateur Lelio Bonnacorso et du scénariste Fabien Tillon. Celui-ci s’est inspiré d’un livre de Dermot Turing paru il y a 3 ans chez le même éditeur. Dermot est le neveu d’Alan Turing, qui, aidé par d’autres mathématiciens (notamment le polonais Marian Rejewski) est parvenu à craquer le code secret d’Enigma, la machine utilisée par les Allemands pour leurs communications cryptées pendant la Deuxième Guerre mondiale.
L’anthologie de la calculabilité, qui vient de paraître aux éditions Cassini, est une œuvre monumentale, résultat d’un travail de plus d’une dizaine d’années, orchestré par Jean Mosconi et Michel Bourdeau. On y trouve les traductions en français de 24 textes fondateurs de la théorie de la calculabilité (le terme utilisé en France a longtemps été récursivité, mais calculabilité s’est imposée depuis), accompagnées de notes introductives détaillées, rédigées par d’éminents spécialistes. Quelques-uns des noms des auteurs choisis suffisent à donner une idée de l’importance du recueil : Hilbert, Gödel, Herbrand, Church, Kleene, Turing, Markov, Kolmogorov... Cet ouvrage savant bénéficie de surcroît d’une introduction impressionnante rédigée par Serge Grigorieff.
Histoire
Depuis plus de 100 ans, les premières traces de géométrie appliquée dormaient dans un musée d’Istanbul. Sur une tablette d’argile vieille de plus de 3 000 ans, un document cadastral détaille les caractéristiques, notamment géométriques, d’une parcelle vendue. Un mathématicien de l’UNSW (University of New South Wales, Sydney) vient d’en comprendre le contenu : une variété de triplets pythagoriciens. Ils éclairent les historiens sur l’apparition des mathématiques.
En effet, un millénaire avant la naissance de Pythagore, la trigonométrie était déjà utilisée par les Babylonien·nes pour délimiter des frontières de façon précise. Et c’est à lire sur le blog Houssenia Writing.
Restons dans ce lointain passé puisque le quotidien espagnol El Pais (en espagnol) rappelle à ses lecteur·rices comment les mathématiques étaient considérées dans la Grèce Antique. Loin de son enseignement actuel, la discipline était au croisement entre arts, philosophie et mythologie. Le côté pratique passait après la beauté des mathématiques. En leur sein, les nombres représentaient des symboles (comme la féminité ou la famille) ou constituaient une source de réflexion. À titre d’exemple, les philosophes se questionnaient quant à la représentation du zéro : la brique élémentaire du monde ou le tout ?
Les vagues s’échouent sur les plages, intriguant depuis des siècles les mathématicien·nes. El Pais (en espagnol) plonge son lectorat dans l’histoire de la modélisation des vagues. Mais pas n’importe lesquelles : les préférées des surfeur·ses, celles en forme de tubes. Comprendre leur formation a obligé les scientifiques à se pencher sur les équations d’Euler et se questionner sur les conditions initiales (gravité, tension superficielle ou les deux). Il aura fallu attendre 1957 pour que la mystère soit percé : G. D. Crapper a montré que les vagues des surfeurs existent quand il y a seulement de la tension superficielle.
Enfin, le quotidien espagnol (en espagnol) se souvient de la généralisation en dimension $n$ du théorème de Pick par le mathématicien Eugène Ehrhart (en anglais). Ce théorème établissant une relation entre un polygone sur une grille et son aire, il est applicable en deux dimensions. Pourtant en 1960, Eugène Ehrhart réussit à extrapoler ce résultat aux dimensions quatre et plus.
Arts et Maths
Cela faisait cinquante ans que Gaudi n’avait pas été mis à l’honneur de cette façon. Jusqu’au 17 juillet, le musée d’Orsay propose une exposition consacrée à l’architecte catalan.
Dans les colonnes de l’Obs, Michaël de Saint Cheron rappelle la présence des sciences dans le travail de l’artiste. Notamment sa faculté à se jouer des sciences dans ses œuvres, à l’instar de la Sagrada Familia, qui a demandé à l’artiste de mêler forces physiques, mathématiques et art. « La nature n’est pas mathématique » : c’était une des idées fortes de Gaudi et c’est le titre qui a été donné à cette magnifique exposition.
Depuis juin 2021, la Cité des sciences et de l’industrie accueille des artistes qui allient l’art avec les sciences et l’industrie. Pour cette nouvelle résidence, Grégory Chatonsky et son œuvre Disnovation sont à découvrir entre le 22 mars et le 9 octobre 2022. Cet artiste français exploite dans ses œuvres l’intelligence artificielle. Il crée une dystopie à la croisée de l’innovation et du déclin de l’humanité.
Pour finir
« En envoyant ses forces armées déshonorer la Russie sur le champ de bataille, Vladimir Poutine ne lançait pas seulement une offensive contre l’Ukraine, il assénait aussi un coup terrible à son propre pays, condamné pour de longues années à l’isolement et au déclin. » Ainsi débute un article que publie Cédric Villani sur Lesfrancais.press, site généraliste destiné aux Français de l’étranger. Le député mathématicien y prédit un « écroulement de la Russie […], pas seulement économique, mais aussi culturel et social ». Il dit que ses collègue russes « sont aujourd’hui plus démoralisés et pessimistes qu’ils ne l’étaient même pendant la dictature soviétique », et prédit « un carnage scientifique ».
Pour rendre hommage à la science russe, « qui a soulevé les montagnes à partir du milieu du 19e siècle, et qui a suscité l’admiration stupéfaite du monde entier au 20e siècle », il a eu la bonne idée de proposer à ses lecteurs sa bibliothèque idéale des mathématiques russes : une sélection de sept ouvrages qu’il affectionne particulièrement. On y trouve les noms de mathématiciens très célèbres : Sofia Kovalevskaya (on regrette tout de même que la photo censée représenter l’autrice de Une nihiliste soit en réalité celle de... Marie Curie !), Grigori Perelman, Nikolai Luzin, Pavel Florensky, Yakov Sinaï, Edward Frenkel. Villani rend un hommage appuyé à chacun d’eux et déplore que « cette glorieuse histoire [soit] en train de s’achever, peut-être, dans la confusion et le chaos, dans la guerre de Poutine ». Il dit la honte que représente pour la Russie la mort de Yulia Zdanowska, mathématicienne ukrainienne de 21 ans, tuée le 8 mars 2022 à Kharkiv par une bombe russe. Il conclut ainsi : « la communauté mathématique russe pleurera toutes les larmes du monde en pensant à l’humiliation que lui inflige son fossoyeur Vladimir Poutine ».
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Pour citer cet article :
L’équipe Actualités — «Revue de presse avril 2022» — Images des Mathématiques, CNRS, 2022
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