Cent ans de relativité, cela se fête !

Actualité
Publié le 14 septembre 2015

1915, le 28 novembre, Albert Einstein présente devant l’Académie des Sciences de Berlin les équations de sa théorie de la relativité générale. Triomphante en 1919 après les observations d’Arthur Eddington, elle ne sera que peu utilisée jusqu’à connaître un renouveau dans les années 60, rencontrant enfin ses deux champs d’application : la cosmologie et l’astrophysique relativiste.

Pour ses 100 bougies, la théorie est bien vigoureuse. Physiciens et mathématiciens vont se retrouver pour fêter ce centenaire.

Novembre 1915, Einstein établit enfin les équations de champ de la relativité générale. Il y travaille depuis presque 10 ans. À partir de 1907, à Berne où il comprend l’importance de l’universalité de la chute libre, puis à Zürich, en particulier avec son ami Marcel Grossmann, et enfin à Berlin.

Au mois de novembre, il donne une série de séminaires devant l’Académie des Sciences de Berlin. Tout d’abord deux versions non abouties les 4 et 11 novembre. Le 18, il présente l’avance du périhélie de Mercure. Finalement, le 28, il expose ses équations,

\[G_{\mu\nu}=\frac{8\pi G}{c^4}T_{\mu\nu},\]

qui permettent de déterminer la géométrie de l’espace-temps si on connait la distribution de la matière. En pratique cet ensemble de 10 équations non-linéaire aux dérivées partielles couplées ne peut pas être résolu dans sa pleine généralité et nous n’en connaissons que quelques solutions exactes.

L’article sera publié le 20 mars 1916 dans Annalen der Physik. Le manuscrit de 46 pages est conservé à l’Université Hébraïque de Jérusalem, à qui Einstein l’a offert à l’occasion de son inauguration en 1925.

Pour la communauté scientifique, ce sera un choc. Reposant sur des mathématiques techniques et encore peu connues, cette théorie remettait en cause tous les concepts newtoniens, dont ceux d’espace et de temps absolus. Triomphante en 1919 après les observations d’Arthur Eddington de la déviation des rayons lumineux par le Soleil, elle ne sera que peu utilisée jusqu’à connaître un renouveau dans les années 60. La théorie fait trois prédictions majeures : l’existence de trous noirs, l’expansion de l’univers et l’existence d’ondes gravitationnelles. Elles sont à l’origine des deux champs d’application de la théorie : l’astrophysique relativiste et la cosmologie. Pour ses 100 bougies, la théorie est bien vigoureuse, passant tous les tests expérimentaux à laquelle elle a été soumise, mais laissant les théoriciens insatisfaits …

L’IHP sera à l’heure de la relativité pendant tout l’automne 2015.

Le trimestre thématique de l’Institut Henri Poincaré (IHP, Paris 5°), organisé par Lars Anderson, Sergiu Klainerman et Philippe LeFloch, portera sur le thème « Mathematical General Relativity ».

Au cours de ce trimestre, se succéderont plusieurs événements :

  • Du 16 au 20 novembre, se tiendra une conférence commémorative General Relativity : A celebration of the 100th anniversary
  • Le 17 novembre, l’IHP présentera au Ciné Le Grand Action (Paris, 5°) un film intitulé « La relativité : une histoire singulière  » réalisé par Quentin Lazzarotto. Ce documentaire, écrit par Jean Eisenstaedt, Quentin Lazzarotto et Jean-Philippe Uzan, retrace les évolutions et métamorphoses de la théorie en suivant le fil de la compréhension des trous noirs. Nous y retrouverons Jocelyn Bell, Thibault Damour, Roger Penrose, Alain Riazuelo, Carlo Rovelli et Cédric Villani.
  • Le samedi 21 novembre, l’IHP recevra le séminaire Poincaré organisé par T. Damour, B. Duplantier et V. Rivasseau dont le thème sera la cosmologie avec pour orateurs Yannick Mellier (IAP), Arnaud Cassan (IAP), Reinhard Genzel (Max Planck Munich), Jean-Loup Puget] (IAS Orsay), Jean-Philippe Uzan (IAP et IHP).
  • Les 19 et 20 décembre, 2 journées de conférences seront organisées en l’honneur d’André Lichnérowicz par Richard Kerner et Yvette Kosmann-Schwarzbach.
  • Pendant toute cette période, la bibliothèque accueillera une exposition autour d’Einstein et de la relativité réalisée sous la direction scientifique de Guillaume Faye (CNRS/Institut d’Astrophysique de Paris) et coordonnée par Alexandra Miric.

En complément de ces manifestations et événements, le cycle grand public « Les mécanos de la Générale – 100 ans de relativité  » vous donne rendez-vous pour 6 conférences à la Bibliothèque Nationale de France (18h30-20h00) :

  • Mardi 6 octobre : Jurgen Renn (Max Planck Institute, Berlin) : La naissance de la Générale
  • Mardi 13 octobre : Jean Eisenstaedt (CNRS/Observatoire de Paris) : La relativité générale, une théorie longtemps incomprise
  • Mardi 10 novembre : Dominique Lambert (Université de Namur) : Une brève histoire de la cosmologie relativiste
  • Mardi 17 novembre : Clifford Will (Université de Floride) : La relativité générale et l’expérience
  • Mardi 1 décembre : Jean-Philippe Uzan (CNRS/IAP-IHP) : Les avancées de la cosmologie relativiste
  • Mardi 8 décembre : Thibault Damour (IHÉS) : Les grandes avancées de la générale. Et après ?

Nous serons heureux de partager tous ces événements avec vous !

Post-scriptum

Je remercie Delphine Demols, Roger Mansuy, et Cédric Villani pour leur relecture et leurs commentaires.

Article édité par Roger Mansuy

ÉCRIT PAR

Jean-Philippe Uzan

Directeur de Recherche - Institut d’Astrophysique de Paris – Université Pierre et Marie Curie Paris- CNRS

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Commentaires

  1. ROUX
    septembre 17, 2015
    9h35

    « La théorie fait trois prédictions majeures : l’existence de trous noirs, l’expansion de l’univers et l’existence d’ondes gravitationnelles »
    Belle trilogie.
    Mais l’existence des trous noirs a été dite bien avant (XVIIIéme siècle).
    L’expansion de l’univers, plutôt le fait qu’il ne peut pas être statique et qu’il est soit en expansion soit en contraction, est dite à tellement très peu près avant les résultats expérimentaux qu’on peut adLemaître 😉 que c’est dit en même temps et non pré-dit.
    Pour ce qui est des ondes gravitationnelles, elles sont pré-dites mais la messe expérimentale n’est toujours pas (ne sera jamais ?) dite…
    Avant, pendant et après.
    La gravitation va par trois : la Trinité Newton, Einstein, Witten est remarquable.
    Newton invente des mathématiques pour faire de la physique.
    Einstein utilise des mathématiques qui viennent d’être inventées pour faire de la physique.
    Witten invente des mathématiques… Et ne fait pas de physique.
    A propos d’Einstein, on ne dit pas assez souvent pourquoi c’est un des plus grands physiciens de tous les temps (Et pourquoi alors Witten n’est actuellement pas un physicien, mais est reconnu comme un très grand mathématicien).
    Et je le redis : du haut de ses théories, Einstein s’est toujours empressé de calculer des expériences à faire.
    Le premier effet qu’Einstein calcule est le ralentissement d’une horloge dans un champ gravitationnel selon son altitude dans ce champ. Et, cet effet n’existe que si la métrique de l’espace indispensable à la relativité générale est bel et bien celle qu’il a découverte (on peut hardiment résumer la relativité générale en écrivant que le poids d’un objet n’est qu’une conséquence de la métrique de l’espace-temps, ce qui n’est en rien du tout ce que pensait Newton : Einstein le sait et c’est bel et bien l’expérience-clé à calculer).
    Le test expérimental (Pound-Rebka) est passé avec succès en 1959, dans un tour de Harvard d’une hauteur de 22m.
    Et c’est génial que les être humain aient pu tester la réalité de la métrique de l’espace-temps à la maison :).
    J’espère que cette suite de conférences que je ne pourrai sans aucun doute pas suivre fera ensuite l’objet d’un livre.
    Bon anniversaire !

  2. Sandrine Sainte-Croix
    décembre 22, 2015
    3h28

    Jean-Philippe Uzan, je tiens à vous préciser que vous avez fait plusieurs erreurs dans votre article sur la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein. Tout d’abord, la dernière des 4 conférences sur cette théorie, qu’Albert Einstein a faites à l’Académie royale des sciences de Prusse de Berlin en 1915, a eu lieu le JEUDI 25 NOVEMBRE 1915 et NON LE 28 NOVEMBRE 1915, comme vous l’avez écrit. Il faut savoir que les conférences à l’Académie royale des sciences de Prusse se déroulaient tous les jeudi. Donc ces 4 conférences sur la théorie de la relativité générale données par Albert Einstein ont eu lieu les jeudi 4, 11, 18 et 25 novembre 1915. Par ailleurs, la dernière conférence du jeudi 25 novembre 1915 est la seule qui a été ouverte au public. Elle a été publiée par l’Académie royale des sciences de Prusse le jeudi suivant, c’est à dire le jeudi 2 décembre 1915. Par la suite, Albert Einstein a retravaillé son exposé, pour finalement en envoyer un manuscrit à Annalen der Physik de 1916, qui a été publié dans le Volume 354, Série 4, n.49, brochure n.7, le JEUDI 11 MAI 1916 ET NON LE 20 MARS 1916. En effet, la date du 20 mars 1916, écrite à la fin de l’article imprimé dans Annalen der Physik n’est que la date de RÉCEPTION (« eingegangen », en allemand, signifie « reçu »). Je l’ai compris de moi-même en parcourant l’article original d’Annalen der Physik et en lisant la table des matières détaillant tous les articles avec les dates de publication (« ausgegangen » signifie « publié ») de chaque brochure (« Heft ») bi-mensuelle. Signé Sandrine Sainte-Croix, passionnée par Albert Einstein, que je considère comme mon père spirituel.