Le 3 février 2008, Ibni Oumar Mahamat Saleh, professeur de mathématiques à l’université de N’Djamena, était enlevé à son domicile par l’armée tchadienne. Je le rappelle depuis chaque année, puisqu’il est toujours officiellement « disparu ». Je transmets aussi le moyen de contribuer au financement du prix à son nom, décerné tous les deux ans à de jeunes mathématiciens ou mathématiciennes d’Afrique.
Ibni Oumar Mahamat Saleh
Le 3 février 2008, Ibni Oumar Mahamat Saleh, professeur de mathématiques à l’université de N’Djamena, était enlevé à son domicile par l’armée tchadienne. Ce même jour, une attaque de rebelles armés était sur le point de prendre la capitale et le pouvoir, et a été stoppée in extremis par l’intervention de l’armée française. Depuis, Ibni Oumar Mahamat Saleh a « disparu ». Une commission d’enquête internationale, imposée par la pression française, a conclu qu’il était probablement mort très vite en détention, peut-être assassiné, et que « la preuve parfaite [en] sera vraisemblablement impossible à trouver sans une volonté des plus hautes autorités de l’État ».
Je rappelle chaque année ces faits. Très vite, sa famille ainsi qu’une pétition de plus de 3500 mathématiciens et mathématiciennes (et autres) ont demandé la vérité et la justice. Cela fait seize ans aujourd’hui. Amnesty International, dans une campagne spéciale de lettres, l’ACAT, et des parlementaires français s’y sont joints. Ces demandes attendent toujours réponse.
Vous pouvez trouver des détails :
- sur l’enlèvement et ses suites dans mon billet de 2009,
- sur diverses mobilisations dans mon billet de 2011,
- sur le dépôt d’une plainte en France et l’accentuation du blocage de l’affaire par le rôle géopolitique du Tchad dans mon billet de 2013,
- sur la mise à jour de nouveaux témoignages importants par le journaliste Thomas Dietrich dans mon billet de 2021 (ici son article),
- sur la succession du dictateur tchadien Irdiss Déby, et sur la brève présence en France d’un suspect important trouvé encore par T. Dietrich, dans mon billet de 2021 (voir aussi l’article de T. Dietrich)
Cette année, je remarque que le média allemand Deutsche Welle a fait de l’affaire Ibni un sujet, qu’elle suit régulièrement. C’est ainsi que j’apprends par exemple qu’en 2022 la famille d’Ibni Oumar Mahamat Saleh a profité du dialogue national » mis en place par le fils d’Idriss Déby, et son actuel successeur à la tête du Tchad, Mahamat Idriss Déby, pour demander à nouveau la vérité et la justice : https://www.dw.com/fr/tchad-ibni-oumar-mahamat-saleh-15-ans-justice/a-64596645.
Le prix Ibni Oumar Mahamat Saleh
Par ailleurs, Ibni Oumar Mahamat Saleh avait œuvré à l’enseignement des mathématiques en Afrique et l’établissement de liens avec des universités européennes, notamment celle d’Orléans où il avait passé son doctorat.
En 2009 les trois sociétés savantes françaises de mathématiques, la SMF, la SMAI et la SFdS ont créé un prix à sa mémoire. D’abord annuel, il est devenu biennal en 2017. Il est soutenu par plusieurs grandes institutions mathématiques, et attribué à deux jeunes mathématiciens ou mathématiciennes d’Afrique Centrale ou d’Afrique de l’Ouest.
Le prochain prix sera attribué en 2024. Son financement repose en partie sur des dons. Vous pouvez contribuer, même modestement. Pour tous les détails, voir la page du prix https://www.idpoisson.fr/prix-ibni/ et mon billet de décembre dernier.