Kia Ora !

Tribune libre
Version espagnole
Publié le 26 décembre 2014

La Nouvelle Zélande … Pays du Long nuage blanc et des maths !

Nous voici enfin en Nouvelle Zélande, le plus jeune pays du monde !

Le passage à la douane s’est bien passé. Mieux, j’ai eu une conversation des plus étonnantes avec un douanier. Sur le document d’immigration, j’avais indiqué «Professeur» comme métier.

Vous êtes prof ! Prof de quoi ?

De maths.

Ah ! Vous connaissez le philosophe et mathématicien français Blaise Pascal alors ?

Euh, oui, bien sûr.

C’est à propos du pari de Pascal. Y a-t-il un moyen de calculer des probabilités pour savoir quel Dieu est le plus probable en fonction de ce que la religion impose ?

Pardon ?

En fonction de ce qu’on doit faire, de si on est puni pour telle ou telle raison. Peut-on savoir quel est le Dieu le plus probable ?

Eh bien, vous voyez, on n’a qu’une seule Terre. Les probabilités se basent sur des phénomènes mesurables pour lesquelles on peut mener plusieurs expériences indépendantes. Si on pouvait observer plusieurs Terre et comment les Dieux y sont présents, peut-être qu’on pourrait commencer à envisager de calculer des probabilités. En attendant cela, on est dans la plus pure spéculation.

Ah. Alors on ne peut pas. La science ne peut pas servir à cela ?

Vous savez, la science apporte surtout le doute. Ce n’est pas un pourvoyeur de certitudes.

Après un grand sourire, il nous a indiqué la file 1 et nous a renouvelé la bienvenue en Nouvelle Zélande. «Kia Ora» (Salut/Bonjour/Bonne santé en Maori).

Post-scriptum

J’aurais certainement pu trouver une meilleure réponse, mais philosopher (en anglais) m’a paru hors de portée, surtout après 36h de voyage, plutôt éprouvantes ! (Air New Zealand est une compagnie très accueillante, mais on ne peut pas en dire autant de Air France-KLM … Quant au comportement collectif des chinois à Honk Kong, il faut très certainement du temps pour s’y habituer, ce qui fait que 6h d’escale n’y suffisent pas, pour une première fois.)

ÉCRIT PAR

François Sauvageot

Professeur - Lycée Alain-René Lesage - Académie de Rennes

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Commentaires

  1. Étienne Ghys
    décembre 31, 2014
    13h51

    Cher François,

    Je te souhaite une bonne année puisque, au moment où je t’écris, minuit est déjà passé en Nouvelle Zélande.

    Deux remarques par rapport à ton billet.

    « Les probabilités se basent sur des phénomènes mesurables pour lesquelles on peut mener plusieurs expériences indépendantes.
    Si on pouvait observer plusieurs Terre etc. »

    Certes, mais alors que penses-tu de l’usage du vocabulaire probabiliste dans les rapports du GIEC ?

    Je cite :

    « the following terms have been used to indicate the assessed likelihood
    of an outcome or a result : virtually certain 99–100% probability, very likely 90–100%, likely 66–100%, about
    as likely as not 33–66%, unlikely 0–33%, very unlikely 0–10%, exceptionally unlikely 0–1%. Additional terms
    (extremely likely : 95–100%, more likely than not >50–100%, and extremely unlikely 0–5%) may also be used
    when appropriate. Assessed likelihood is typeset in italics, e.g., very likely (see Chapter 1 and Box TS.1 for
    more details). »

    L’autre remarque concerne la philosophie puisque tu y fais allusion. Je suis un grand amateur du podcast
    « Philosophy bites » et il se trouve que j’ai entendu récemment un philosophe, Stephen Law, discuter
    du problème de Dieu d’un point de vue probabiliste, est-Il un « evil god » ou un « good god » ?. Intéressant

    http://philosophybites.com/2007/06/stephen_law_on_.html

    Cela dit, sa conclusion est :

    « We can probably do without gods at all. »

    A ceux qui comprennent l’anglais (d’Oxford et de Cambridge), je recommande chaleureusement ce podcast

    http://philosophybites.com

    Amitiés,

    Etienne

  2. François Sauvageot
    janvier 3, 2015
    7h32

    Cher Étienne,

    Merci pour les vœux ! A minuit heure française, j’étais en effet à Matamata en plein été … Matamata est plus connu parce que c’est aussi Hobbiton, en Terre du Milieu. Je pourrais tenter « garo idhrim eden veren ! » mais les puristes de Tolkien n’y verront pas du Sindarin. Alors je me contenterai de te souhaiter une bonne année !

    Tu poses une question difficile, mais je crois qu’on ne peut pas y répondre de façon générale. Quand on fait des séries temporelles, on peut tout à fait fabriquer des modèles et, selon ces modèles, évaluer des risques. Bien entendu, il faut accepter le modèle et ce n’est pas sans … risque.

    Mais il y a aussi des situations où les modèles sont soit sans objet, soit terriblement controversés. Dans ces cas-là, il est certain que les calculs n’apportent rien, voire sont fallacieux.

    Dans les rapports du GIEC, je ne suis pas toujours certain de comprendre les modèles utilisés implicitement. Mais je suis assez loin de penser que, pour autant, ces calculs sont fallacieux. OK, c’est un peu botter en touche que de répondre cela (normal, au pays du Rugby !), mais je pense que la réponse est en fait en dehors du champ strict de la science. Tout le monde ne peut pas lire un rapport scientifique écrit par et pour des scientifiques. Il faut donc aussi écrire des rapports que des politiques (par exemple) puissent lire et cela a un coût (en terme de précision du vocabulaire ou d’intelligibilité).

    Je m’intéresse de près à la façon de communiquer des résultats probabilistes ou statistiques, et de construire des situations qui permettent de partager la science derrière sans pour autant en partager le vocabulaire. Je dois avouer que j’avance lentement et que je vois beaucoup de résistances un peu partout.

    Un autre point est que le monde anglo-saxon (par exemple) ne se représente pas le hasard de la même façon que les français(es). Il ne faut donc pas juger trop hâtivement ce genre de phrases. Et mon avis est qu’il faut lire les travaux scientifiques, s’en faire une opinion à un niveau scientifique et ne pas s’attacher strictement à la formulation des rapports. Ce que tu as certainement fait plus que moi …

    Amitiés,

    François.