MULTIPLIER OU DIVISER ?

Tribune libre
Écrit par Andrés Navas
Version espagnole
Publié le 27 janvier 2022

Deux « problèmes » simples

Tante Sonia a 6 bonbons et décide de les donner à ses deux nièces, Rocío et Marie. Mais chacune d’elles invite d’abord un ami, puis deux autres, et elles leur donnent leurs bonbons. Combien de bonbons correspondent à chacun d’entre eux si les bonbons sont répartis équitablement ?

Un autre jour, tante Sonia a encore 6 bonbons et les donne équitablement à ses deux nièces. Mais en plus, elle leur précise que pour chacun de ces bombons elles en trouveraient deux autres sur leur table de chevet. Combien de bonbons chacune a-t-elle reçus ?

La solution

Très probablement, ceux qui font le calcul pour les deux situations se ramèneront à jouer avec

6/2(1+2)

 

Cependant, pour ceux qui font le calcul pour la première situation, il sera clair que l’expression (1+2) doit diviser le reste (car les bonbons sont divisés), et ils arriveront alors à la valeur 1. D’autre part, ceux qui font le calcul pour la deuxième situation considéreront cette expression comme un facteur multiplicatif (car chaque bonbon en engendre en fait trois), et arriveront à la valeur 9.

La « controverse »

Maintenant, si l’on se prend au calcul de

6/2(1+2)

 

sans clarifier aucun contexte antérieur, alors quelle valeur lui attribuer ? Ce n’est pas complètement clair, car l’écriture est un peu ambiguë. En fait, ceci est devenu une polémique sur les réseaux sociaux il y a quelques années, et elle est même apparue dans d’importants médias de presse, par exemple ici.

Le soulagement

Il faut insister en ce que ceci n’est pas une ’’vraie’’ question mathématique, mais plutôt un problème d’écriture et de communication. Les mathématiques sont liées à un contexte, qui peut être théorique ou pratique, et dans un tel contexte (comme ceux des situations de bonbons que tante Sonia donne) on voit clairement quelle opération doit être effectuée. Sans contexte, on peut tomber dans une ambiguïté dérivée de la notation. Même de différentes calculatrices peuvent donner des résultats différents. Le calcul échoue-t-il alors ? Certainement pas : il n’y a qu’une syntaxe bâclée.Détacher la mathématique de son contexte et la transformer en une série de recettes d’opération nous conduit à ces faux dilemmes, à focaliser cette science sur des aspects techniques qui n’ont rien à voir avec la compréhension du monde. « Les mathématiques ne consistent pas à calculer, mais à comprendre », disait William Thurston (récompensé en 1982 de la Médaille Fields). Et bien, Rocío et Marie comprennent parfaitement ce qu’elles doivent faire dans chacune des situations dans lesquelles on leur donne des bonbons, et elles n’ont pas à se tourmenter avec des discussions plates sur la valeur de l’expression 6/2(1+2).

Arrêtons de tourmenter les gens avec ces pseudo-discussions mathématiques et concentrons-nous plutôt sur la véritable profondeur de cette belle science.

ÉCRIT PAR

Andrés Navas

Professeur - Universidad de Santiago de Chile et à l'Universidad de Chile

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