Le nombre 2023 n’a pas de propriété intéressante (à part peut-être être un palindrome en hexadécimal ?), contrairement au premier mois de l’année 2023 qui regorge déjà d’histoires mathématiques passionnantes, relatées dans des articles ou des vidéos qui ne le sont pas moins ! Dans ce numéro de la Revue de Presse, on pourra par exemple redécouvrir le problème des familles d’ensemble stables par union, ou plonger (avec tristesse) dans les entrailles du modèle économique pour les publications scientifiques. Mais ce mois de janvier est avant tout marqué par la lutte contre le projet de réforme du système des retraites. La rubrique À la une nous raconte comment les communautés de l’éducation et de l’enseignement supérieur se mobilisent et quelles sont leurs revendications propres. Bonne lecture à toustes, et pour les nostalgiques des fêtes et de l’hiver, bonne contemplation de cette magnifique photo de cristaux de glace japonais !
À la Une
Mobilisation au sein des communautés de l’éducation et de l’enseignement supérieur contre la réforme des retraites
Alors que les deux premières journées de grèves et de manifestations interprofessionnelle contre la réforme des retraites ont rassemblé plus d’un million de personnes, l’intersyndicale a rassemblé plus de 870 000 signatures sur sa pétition et a appelé à deux nouvelles journées de grèves et de manifestations les 7 et 11 février d’après France Info.
Un dossier avec liens et documents est disponible sur le site de la CGT des établissements d’Enseignement supérieur et de Recherche (CGT FERC Sup), et les universités se mobilisent. Une motion du conseil d’administration de l’université de Poitiers a rappelé que « Toute la communauté universitaire [était] évidemment concernée par cette réforme des retraites : les personnels en tant qu’agents publics, quel que soit leur statut, fonctionnaires ou contractuels, Biatss, enseignants ou enseignants-chercheurs, ainsi que les étudiantes et les étudiants en tant que futurs salariés » avant de conclure : « Le conseil d’administration de l’université de Poitiers appelle le Gouvernement à renoncer à la réforme des retraites actuellement proposée. » À l’université de Bourgogne, un mail du président a informé le personnel que « les journées de mobilisation nationale ne donneront pas lieu à contrôle d’assiduité pour les étudiants y participant », et « [qu’]il sera demandé aux équipes pédagogiques de ne pas organiser de contrôles continus ou terminaux ces jours-ci ».
À l’université de Strasbourg, France 3 Régions a rapporté l’évacuation par les CRS d’une assemblée générale le 20 janvier: « des députés demandent des explications, le président dénonce une « intrusion sauvage » ».
Du côté des premier et second degrés, les syndicats ont annoncé 70% et 65% de grévistes respectivement, alors que le ministère ne reconnait que 42% et 34% de grévistes. L’occasion pour Le Café Pédagogique de revenir sur ces différences de comptage dans un entretien avec un chercheur associé au Centre de Recherche sur les Liens Sociaux (Cerlis). La Croix est revenue sur « l’éternel grand écart entre les syndicats et la police » (vous vous souvenez peut-être des débats provoqués par le comptage semi-automatique du cabinet Occurence, voir cet article des Décodeurs du Monde, ou ce billet de blog Mediapart).
Vidéo du gouvernement envoyée aux fonctionnaires
Le gouvernement se retrouve en difficulté avec sa réforme comme le note Le Monde🔒 dans un article où il est rapporté que « L’Élysée a réclamé en urgence de plancher sur des mesures pour éteindre les trois fronts ouverts – les femmes, les jeunes, les seniors ». C’est dans ce contexte tendu que Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, a choisi d’envoyer aux fonctionnaires, via la direction générale des Finances publiques (DGFIP)
et sur leur adresse électronique personnelle, un mail avec une vidéo de six minutes défendant la réforme. Les syndicats ainsi que des agents ont dénoncé la méthode et ont saisi la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL). La plupart des journaux ont repris l’information, comme Le Monde🔒, Libération🔒, Ouest-France, ou encore 20minutes.
Femmes, retraite et choix de parcours
Comme évoqué plus haut, l’un des problèmes que causerait cette réforme est que « Les femmes [seront] davantage touchées par le report de l’âge de départ à la retraite, selon l’étude d’impact de la réforme », comme le titre Le Figaro🔒. Cette question nous concerne, dans la communauté mathématique, puisqu’un des facteurs de cet effet est « l’orientation des étudiantes vers les métiers moins bien payés », note Le Monde🔒.
« Dans l’article, Sonia, une femme de 33 ans, témoigne (« non sans amertume», précise la journaliste) : « J’étais bonne en maths, mais dès la 2de, profs et parents m’ont encouragée à devenir infirmière. » Ils affirmaient que j’aurais toujours du boulot et pensaient bien faire. Mon frère, lui, est allé vers l’informatique. » À ce propos, l’association Elles Bougent a lancé un sondage « Et toi, qu’est ce que tu voulais faire plus tard ? » en vue de la journée internationale des filles et femmes en science qui aura lieu le 11 février.
Recherche
La nouvelle année nous apporte une belle récolte d’avancées mathématiques et d’histoires épiques autour de leurs découvertes.
NB: ci-dessous, les articles provenant de Quanta Magazine sont écrits en anglais.
Nous en parlions déjà dans ces lignes en septembre et dans cet article : le fascinant « tore plat », aussi qualifié de « fractale lisse », imaginé par l’équipe de mathématicien·nes française Hévéa, a attiré l’attention de France Info, qui y consacre une courte interview avec le rédacteur en chef du magazine Epsiloon, Hervé Poirier. Le prochain numéro de ce magazine fait découvrir dans la rubrique « En image » cette fractale lisse (sur une double page). L’équipe Hévéa avait réussi en 2012 à montrer de telles surfaces à courbure nulle, puis cinq ans plus tard une autre avec une courbure positive et aujourd’hui avec une courbure négative.
Toutes tarabiscotées soient-elles, les fractales lisses feraient presque pâle figure devant les formes étranges décrites (tant bien que mal, à l’aide d’analogies en petite dimension) par Quanta magazine dans un article rapportant les résultats récents de deux chercheurs de l’université Stony Brook. La question à laquelle ils ont tâché de répondre nous emmène aux confins de l’Univers : quelles sont les formes que peut prendre la surface d’un trou noir, compte tenu des équations complexes qui régissent sa formation ? Dans nos « ennuyeuses » trois dimensions d’espace, il ne peut s’agir que d’une sphère ; en revanche, comme l’affirme ce nouveau résultat, si l’on s’aventure dans des espaces à cinq dimensions ou plus, une infinité de formes et de topologies devient possible. Vertigineux !
Filons à l’autre extrémité du monde physique, dans le royaume quantique où les mathématiques et les géométries exotiques trouvent également une place de choix. Futura met à l’honneur Alain Connes, lauréat de la médaille Fields 1982 et père de la géométrie non-commutative, une branche des mathématiques efficace pour décrire les troublants phénomènes quantiques. L’article effectue un petit retour en arrière sur les débuts de la physique quantique au XXe siècle et renvoie vers d’autres articles plus poussés sur les liens entre mathématiques et physique, ainsi que vers un exposé d’Alain Connes donné lors d’un symposium en octobre dernier.
Les échos de la recherche qui suivent, tous issus d’articles de Quanta Magazine, nous ramènent à des considérations plus terre-à-terre — et démontrent que la solution à un problème ouvert se cache souvent dans des arguments simples sur le mode du « il suffisait d’y penser ».
Tout d’abord, la question classique de la recherche du chemin le plus court entre deux points sur un graphe pondéré, c’est-à-dire un réseau de points reliés entre eux par des chemins auxquels on attribue un certain coût (par exemple la distance entre les points, ou encore l’énergie nécessaire pour la franchir). La solution à ce problème, qui fait appel à des algorithmes affublés du doux qualificatif de « gloutons », est connue depuis longtemps… mais uniquement quand les poids des arêtes du graphe sont tous positifs ! Si l’on autorise des poids négatifs, on ne sait pas faire… jusqu’à la découverte de la solution par trois chercheurs des universités Rutgers et de Copenhague. D’après l’article de Quanta, les arguments utilisés sont d’une grande simplicité, ce qui est passablement étonnant pour un problème qui a résisté si longtemps aux tentatives des informaticien·nes et des mathématicien·nes.
Une autre histoire amusante relatée par Quanta est celle du chercheur Justin Gilmer. Comme le dit l’article, il « n’avait plus fait de maths depuis six ans » — mais conduisait des recherches en apprentissage machine chez Google, ce qui n’en est tout de même pas si loin — mais a réalisé une avancée majeure dans la résolution de la conjecture dite des familles stables par union. Une famille d’ensembles stable par union possède la propriété que l’union de toute paire d’ensembles de la famille est encore un ensemble de la famille. La conjecture stipule alors que dans une telle famille, il existe au moins un élément qui apparaît dans au moins 50% des ensembles de la famille. Étonnamment, aucun résultat ne confirmait ni n’infirmait cette conjecture dans le cas général. En utilisant des idées issues de la théorie de l’information, Justin Gilmer a d’abord démontré une version affaiblie, où l’on remplace 50% par 1%… avant d’améliorer rapidement ce seuil en atteignant 38%, grâce à une collaboration avec des collègues. Courage, les 50% ne sont pas loin !
Enfin, le seuil fatidique de 50% se cache également dans un problème de nature plus ludique : celui des dés dits « non transitifs », que l’on qualifie aussi de « dés pierre-feuille-ciseaux ». Avec ce type de dés, qui défient l’intuition, on observe des situations du style « le dé A bat le dé B, le dé B bat le dé C et le dé C bat le dé A » (où, par battre, on entend « donner un chiffre plus grand avec une probabilité plus grande ») ! Si on sait depuis de nombreuses années que de telles configurations existent, on pensait qu’elles étaient rares, c’est-à-dire que leur probabilité d’apparition en choisissant au hasard les scores sur les faces des dés était très faible. Eh bien, on se trompait, affirme un article collaboratif publié tout récemment : sous certaines hypothèses raisonnables, et si, avec A, B et C choisis au hasard, A bat B et B bat C, il y a exactement 50% de chances que C batte A, c’est-à-dire que les trois dés soient non transitifs. Bigre ! Et pour quatre dés ? En faisant des tests numériques, l’équipe de recherche a observé que cette probabilité s’approchait aussi de 50%, conjecturant alors qu’elle serait exactement égale à cette valeur… avant de démontrer le contraire ! On sait seulement qu’elle serait légèrement supérieure, autour de 52% : le mystère autour des dés non transitifs s’épaissit.
Vie de la recherche
La politique s’invite une fois de plus dans la vie de la recherche ce mois-ci, entre engagement militant des chercheur·euse·es et des institutions et politique de la recherche.
Engagement politique…
Le 9 janvier dernier la SMF relayait la nouvelle de l’arrestation, le 29 décembre 2022, de Mikhaïl Lobanov (page en anglais), maître de conférences en mathématiques à l’université Lomonossov (Moscou) et homme politique russe de gauche. Un tweet du 15 janvier 2023 annonce sa libération le 14 janvier 2022, en précisant toutefois ne pas avoir de « détails sur une éventuelle procédure en cours. La SMF reste attentive à la situation de [ce] collègue ». La communication de la SMF contextualise cette arrestation et recense des liens pour plus de précisions. Un billet sur le blog de Michel Broué notamment, revient plus en détail sur la situation, la violence de l’arrestation et les charges retenues contre Mikhail Lobanov, rappelant au passage les engagements militants du mathématicien. En particulier, le mathématicien avait déjà été arrêté en mars 2020 après son piquet solitaire en soutien au doctorant en mathématiques Azat Miftakhov (page en anglais) accusé de la destruction d’une fenêtre d’un bureau du parti politique « Russie unie », et condamné à six ans de prison en décembre 2020. La SMF, dans un billet de soutien au doctorant publié avant son jugement, explique que le Centre pour les droits humains Memorial considère Azat Miftakhov comme un prisonnier politique.
Le Figaro étudiant[·e] revient ce mois-ci sur la décision prise par de nombreuses universités et instituts de recherche d’interdire ou limiter les déplacements aériens des chercheur·euse·s lorsque ceux-ci peuvent aisément être remplacés par le train. Les exemples européens et internationaux ne manquent pas, le journal choisit de se concentrer sur l’université d’Utrecht aux Pays-Bas qui « n’approuve plus les vols de moins de 700 kilomètres mis à part quelques circonstances très exceptionnelles ». L’article revient sur l’absence de consensus au sein de la communauté universitaire : « Si vous êtes un chercheur en début de carrière et que vous voyagez très peu, je pense qu’il est difficile de faire connaître votre travail », témoigne sur le site de NoFlyClimateSci, Nadir Jeevanjee, chercheur à Princeton », oubliant tout de même de préciser que dans le cas des universités citées, les billets d’avion ne sont pas remboursés seulement lorsqu’une alternative ferroviaire raisonnable (et c’est peut-être là le débat) existe.
…et politique de la recherche
Les revues de presse des mois précédents sont revenues à plusieurs reprises sur les assises des mathématiques qui se sont tenues à Paris du 14 au 16 novembre 2022 (voir notamment les revues de presse de janvier, juillet-août et novembre pour davantage de détails). L’objectif était de « faire l’état des lieux des mathématiques en France, et les préparer aux grands défis de demain. » Le film de ces rencontres est désormais disponible sur le site de l’Insmi (Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions) le détail des prix attribués est également disponible en ligne.
Politique d’évaluation de la recherche
Le site du Hcéres revient sur le calendrier d’évaluation du CNRS qui aura lieu en 2023. Le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres) a été créé en 2013 par la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. Indépendante depuis 2020, cette autorité publique est « chargée d’évaluer l’ensemble des structures de l’enseignement supérieur et de la recherche, ou de valider les procédures d’évaluations conduites par d’autres instances. » Son indépendance et son mode de fonctionnement sont toutefois contestés par certains collectifs de chercheur·euse·s comme Rogueesr et ont déclenché les foudres de l’assemblée des directions de laboratoires (ADL).
Innovation et politique d’investissement
Dans un communiqué, le ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique revient sur le plan France 2030 et annonce un plan d’action articulé autour de trois piliers : le renforcement des structures de recherche au sein des universités, la promotion des start-up issues de la recherche et « le renforcement de la valorisation des travaux issus de la recherche et des programmes de recherche thématiques », sans vraiment expliciter ce que cela signifie. L’investissement est chiffré à 500 millions d’euros sur cinq ans et le communiqué, avec l’accent mis sur les deeptech, ces « jeunes entreprises (start-up) qui proposent des solutions ou des produits disruptifs basés sur une recherche scientifique avancée », permet une transition toute trouvée avec une chronique des Échos🔒 qui revient ce mois-ci sur une étude qui conclut à une chute dans l’indice de disruptivité des publications scientifiques.La chronique titre en effet « Le drame des chercheurs qui trouvent de moins en moins », basant cet énoncé général sur une étude publiée dans Nature (en anglais). Les auteurices : Erin Leahey (professeusse de sociologie), Russel Funk (professeur associé en management (et non en sociologie comme le prétend l’éditorialiste)) et Michael Park (doctorant en management stratégique et entrepreneuriat (et non en économie, comme le prétend l’éditorialiste)) proposent une mesure de la disruptivité des articles et des brevets et concluent que les travaux de recherche sont de moins en moins disruptifs pour cet indicateur. L’indicateur en question est « l’indice CD » (pour consolidation-disruption), il évalue la manière dont un article ou un brevet est cité dans la littérature rédigée par les pairs (l’étude se concentre sur les cinq années suivant la publication) : un article est considéré comme novateur (disruptif) s’il est mentionné dans les publications des pairs parmi peu d’articles antérieurs à sa parution, au contraire, il consolide un domaine de recherche s’il est cité parmi un grand nombre de publications de son domaine, antérieures à sa parution. L’article de Nature propose plusieurs pistes pour expliquer ce phénomène et insiste sur le caractère remarquablement uniforme de cette chute de la disruptivité qui s’observe dans toutes les sciences analysées. Cela nuancerait l’importance d’une évolution naturelle de la recherche (qui en progressant aborde des sujets plus difficiles qui nécessiteraient davantage d’efforts) et reviendrait à chercher des explications du côté de la politique de la recherche, de sa gestion et de son financement. Les auteurices mentionnent par ailleurs la remarquable stabilité du nombre absolu de productions disruptives au cours des années. Et l’éditorialiste d’en déduire « ce qui débouche sur une idée taboue à défaut d’être disruptive : peut-être qu’on trouve de plus en plus de chercheurs qui ne servent à rien », proclamant par là même, sans aucun autre argument que celui de sa propre opinion, l’inutilité de vérifier et d’étayer des théories pour construire une pensée scientifique. Pourtant, l’étude de Nature rend ses conclusions pour du matériel scientifique publié au plus tard en 2010 (ce qui est justifié par le recul que demandent ces mesures), et les auteurices précisent que toutes les explications proposées sont appelées à être éprouvées par d’autres études [1]. Rien ne permet donc a priori de conclure, comme l’éditorialiste le fait, que les travaux de la dernière décennie suivront la même tendance. Ce qui débouche sur une idée qui, à défaut d’être disruptive, devrait œuvrer à la qualité des éditos du journal : les méthodes scientifiques et la rigueur dans la lecture des sources, elles, servent indéniablement encore à quelque chose. Pour une synthèse moins orientée de l’article de Nature les lecteurices anglophones peuvent consulter l’article en ligne d’Axios.
La question du modèle économique pour les publications
Ouvrir la Science (un site du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche) revient sur une étude réalisée par la coopérative Datactivist à la demande du ministère de la Recherche, et qui fait le bilan des coûts induits par les frais de publication d’articles en accès ouvert (également appelés APC pour « article processing charges ») et prédit leur évolution d’ici 2030. En résumé, les coûts d’APC ont été multipliés par trois entre 2013 et 2020 et pourraient encore doubler à l’horizon 2030. Un article du Monde🔒 qui s’est également penché sur l’étude, explique les différents modèles de publication ; aux publications dans des revues dont le financement repose sur l’abonnement des lecteurices s’opposent des modèles alternatifs, « en accès ouvert ». Celles-ci se distinguent en quatre catégories « des revues « gold » (« dorées »), entièrement financées par les APC, […] d’autres « hybrides », qui gardent l’abonnement et rendent gratuits les textes avec APC […] des journaux « diamants », sans APC et soutenus par des États ou des fondations [… et] enfin, il y a le modèle « vert », qui consiste à déposer gratuitement sur des sites dits « d’archive », souvent soutenus là aussi par des fonds publics, des versions avant publication, mais aussi après publication, en respectant certaines règles juridiques. » L’article revient également sur la nécessité de changer le modèle économique, en citant Sylvie Rousset, à la tête de la direction des données ouvertes de la recherche du CNRS : « Ce modèle économique ne sera pas soutenable […] s’il devient dominant chez les éditeurs : à terme, on dépenserait bien plus que les sommes allouées aux abonnements ».
Encourager les carrières féminines
Les clichés ont la vie dure, y compris parmi celles et ceux qui prétendent les dénoncer. Un article de Sud Ouest🔒 revient ici sur l’action de l’association « Elles bougent » pour promouvoir les carrières scientifiques, industrielles et technologiques auprès des collégiennes et lycéennes de toute la France. Dommage que la journaliste commence par des considérations sur la longueur des cheveux de ces dernières… Après un constat sur la désertion des mathématiques par les jeunes filles et l’impact concret que cela a sur le pourcentage de femmes dans les carrières scientifiques, l’article revient notamment sur la deuxième édition de l’opération éponyme de l’association qui déploie quelque 9000 ambassadrices sur tout le territoire, toutes employées dans les filières susmentionnées. Et puisque les start-up sont au goût du jour des ambitions gouvernementales, c’est ici l’occasion de rappeler que les inscriptions sont désormais ouvertes pour l’édition 2023 du challenge Innovatech, organisé par la même association, « un concours 100% féminin en faveur de l’entrepreneuriat et de l’innovation technologique. » Mais susciter les vocations ne suffira sans doute pas à repeupler les carrières scientifiques, un article du Monde🔒 revient sur l’expérience de la grossesse pour les jeunes chercheuses, un parcours de la combattante et explique « les perspectives de carrière dans la recherche sont toujours aussi réduites pour les femmes : aussi nombreuses en doctorat que les hommes, elles ne sont plus que 29 % à devenir professeures des universités. » Et Annabelle Allouch, sociologue spécialiste de l’enseignement supérieur et interrogée par le quotidien, d’ajouter : « [la grossesse est] un des versants, un angle mort, des inégalités de genre structurelles dans la recherche. Il s’agit d’un espace fondé par les hommes et pour les hommes. La grossesse y est un impensé, une expérience difficilement compatible avec la course à la mobilité académique et à la publication. »
Applications
Ce mois-ci les maths se déclinent dans des domaines variés, comme pour nous rappeler une nouvelle fois qu’elles sont partout !
En bref
Les maths pour communiquer avec un astronaute… ou son voisin de classe ! Un article de Quanta décrit comment peut-on utiliser le code de Reed-Solomon pour échanger discrètement un mot pendant un cours. C’est l’occasion de rappeler qu’il permet de transmettre des informations depuis la Lune, sans que des erreurs n’impactent le contenu.Les maths peuvent modéliser les interactions entre espèces. Le quotidien espagnol El Pais, dans sa rubrique Café y teoremas, a décidé de s’attaquer aux équations de Lotka-Volterra qu’il décrit en même temps qu’il dresse leur historique.
Les maths pour lutter contre la triche. Dans un article consacré aux techniques contre la triche aux échecs, Science & Vie explique comment les probabilités peuvent être appliquées. Avec des méthodes bayésiennes, l’informaticien Kenneth Regan analyse la probabilité d’une suite de mouvements. Si le joueur ne fait que des coups très improbables qui ressemblent à ce qu’un programme aurait joué, alors il y a des chances que le maître soit malhonnête.
Les maths pour faire de meilleurs ricochets. Dans un article, le HuffPost avec AFP rapporte les travaux du mathématicien Ryan Palmer, de l’université de Bristol. Ce dernier a montré que les grosses pierres incurvées rebondissent plus haut tandis que les plus fines se lancent plus facilement : à vous de choisir votre camp.
Intelligence artificielle
“Pourquoi CHATGPT fascine-t-elle tant ?” était la question du 22 décembre de l’émission La Question du Jour sur France Culture. “Pourquoi tout le monde en parle ?”, décrypte Thierry Poibeau, chercheur au laboratoire LATTICE et travaillant sur le traitement du langage naturel, dans The Conversation. Et c’est vrai qu’au vu de la présence médiatique de l’agent conversationnel, on peut s’interroger. Le Monde, notamment, lui a consacré un dossier spécial. Dans une série d’articles aux angles précis, les journalistes décortiquent les grandes questions entourant l’agent conversationnel. D’où vient-il ? Quelles sont les données qui ont permis son entraînement ? Comment en sera impacté le marché de l’emploi, notamment pour les traducteurs ? Qui sont les auteurs des textes générés ? L’Académie des Sciences a, elle aussi, produit un communiqué pour décrypter de façon simple et claire le fonctionnement du chatbot. Un sujet en particulier a fait couler beaucoup d’encre : la triche grâce à ChatGTP. Libération, dans sa rubrique CheckNews, rapporte un cas de triche à l’université de Lyon. Les étudiants n’ont pas berné leur professeur qui a reconnu des copies construites de la même façon. Si quelques solutions existent pour identifier si un texte a été généré automatiquement, les experts interrogés par Libération avouent que ChatGTP a de l’avance. Alors sur France Inter, on annonce la riposte des professeurs : faire plancher les étudiants sur des sujets peu présents dans le corpus d’apprentissage ou privilégier le devoir sur table. Certains imaginent aussi que c’est l’heure de faire évoluer les évaluations comme cela s’était passé avec Wikipédia, rapporte Le Monde. Et le journalisme n’a qu’à bien se tenir, comme présage Laurent Besacier, professeur à l’Université de Grenoble Alpes et spécialisé dans l’IA, sur France Culture : “J’ignore si ce modèle remplacera à terme les journalistes, mais ça peut permettre aux journalistes de presse écrite d’avoir une meilleure productivité.” Rassurez-vous en tous cas, ChatGTP n’est pas prêt de remplacer les petites mains de cette revue de presse !
Bien que l’agent conversationnel ait occupé une grande part de l’espace médiatique, d’autres modèles d’intelligence artificielle ont été décortiqués. Ce mois-ci, Le Monde s’est attaqué au délicat sujet de l’intelligence artificielle en médecine. La journaliste a enquêté : au-delà des belles promesses des algorithmes, où en est-on concrètement ? Si elle peut être d’une aide précieuse – comme le souligne cet autre article du Monde – surtout si utilisée comme une aide au diagnostic, il ne faut pas occulter les biais des données ou l’inégale répartition de ces outils entre établissements.
Autre sujet d’inquiétude souvent repris dans l’actualité récente : la génération d’images et son danger pour les métiers de l’illustration. Dans une vidéo Libération rappelle l’impact de ces modèles sur le quotidien des artistes. Entre leurs œuvres utilisées pour constituer un corpus d’apprentissage et leur remplacement.
“Une intelligence peut en cacher une autre.” Dans son éditorial du n°543 de Pour La Science, François Lassagne soulève la question de l’intelligence de ces réseaux de neurones qui nous bluffent notamment en jouant à des jeux qui a priori requièrent des compétences humaines. Or peut-être que derrière le comportement intelligent se cachent finalement des lois mathématiques, comme le souligne le mathématicien Guillaume Lajoie.
Enseignement
Des réformes et des changements
En ce début d’année 2023, les réformes et changements dans l’enseignement se poursuivent. Comme nous pouvons le lire dans Le Point : « Depuis l’été dernier, Emmanuel Macron tente de dessiner « l’école du futur » en France ». Nous avons vu ce que cela a donné il y a 2 ans avec la tristement célèbre réforme Blanquer du lycée général. Il est donc normal d’avoir des doutes à propos de cette école du futur. Dans l’article cité précédemment, la plupart des points majeurs sont abordés, et des changements sont annoncés à tous les niveaux : au collège, dans les filières professionnelles et même au niveau des enseignant·es avec une révision du salaire pour les jeunes recruté·es. Nous allons détailler ici quelques points de ces différentes réformes.Commençons avec le lycée et deux nouvelles qui ne ressemblent pas vraiment à de bonnes résolutions de début d’année… Tout d’abord cet article de vousnousils nous présente l’une des mesures annoncées par Pap Ndiaye : un « module de réconciliation avec les mathématiques ». Après la mise en place d’une heure et demie de mathématiques obligatoires en classe de 1ère, ce module qui serait mis en place en 2nde dès la rentrée 2023 a pour objectif de « réconcilier tous les élèves avec les mathématiques et promouvoir l’excellence ». Plutôt contradictoire avec la précédente réforme du lycée qui visait justement à faire disparaître les filières scientifiques qui étaient jugées « trop élitistes ». Mais ce ne serait pas la première fois que le gouvernement nous surprend en ce sens ! Il suffit de lire les réactions sur Twitter relayées par cet article pour se rendre compte qu’encore une fois ces annonces sont à côté de la plaque…
En parlant de changement contradictoire, un autre article de vousnousils relaie une question intéressante de Denis Roth, membre de l’Association des Professeurs de Mathématiques de l’Enseignement Public (APMEP) : « Pour le grand oral du bac 2023, le candidat ne pourra plus écrire au tableau. Comment alors présenter une forme ou équation mathématique ? » Difficile en effet, d’autant plus que cela était possible lors des deux précédentes sessions. Encore une annonce à peine croyable.
Du côté du collège
Concentrons-nous maintenant sur les annonces qui concernent les collèges. Comme le dit Pap Ndiaye dans cet article du Parisien : « Le collège est la priorité ». Dans ce même article, nous pouvons découvrir une liste non exhaustive des réformes voulues par l’Éducation nationale : hausse de salaire pour les remplacements de courte durée ou encore dispositif « devoirs faits » rendu obligatoire.Une annonce en particulier fait couler beaucoup d’encre : celle de la création d’une heure hebdomadaire de renforcement en français et en maths en 6ème. Relayée par exemple dans Le Point, cette nouveauté a pour objectif de corriger les « difficultés majeures dans les savoirs fondamentaux » afin de permettre « un agrafage meilleur entre le primaire et le secondaire ». L’idée a l’air bonne sur le fond pour effectuer une remise à nouveau dès l’entrée dans le secondaire.
Cependant la forme qu’elle pourrait prendre est quant à elle très discutable. En effet, il s’agirait de faire intervenir « des professeurs des écoles, qui viennent de l’école élémentaire ». Sachant que ces derniers ont des emplois du temps très chargés et que l’enseignement entre le primaire et le secondaire est bien différent, il est tout à fait légitime de questionner ce possible changement. Comme nous pouvons le lire dans le Journal du Dimanche, les syndicats dénoncent cette solution comme étant « totalement inadaptée ». Ils jugent aussi que les annonces du ministre sont insuffisantes comme l’atteste cet article du Monde.
Pour enfoncer le clou, cette heure supplémentaire devrait être obtenue en supprimant une heure d’enseignement technologique, ce qui fâche les enseignants de la matière comme le relaie Claire Lommé sur son blog : « Nous soulignons l’hypocrisie du discours qui consiste à dire que supprimer l’enseignement technologique permettra de renforcer les fondamentaux. […] Nos méthodes d’apprentissage, propres aux disciplines expérimentales, développent l’esprit critique, stimulent la créativité et contribuent à la lutte contre le décrochage scolaire… »
Notons que cette idée provient d’une expérimentation dénommée « classes tremplins » qui a lieu depuis la rentrée 2022 dans six collèges d’Amiens. Celle-ci est présentée dans cet article de Libération qui la qualifie de « réforme mention passable ». Ceci n’est pas très rassurant, mais avec les désormais habituels retournements de situation du gouvernement, nous pouvons nous attendre à tout !
Enseignement des mathématiques en France
Dans cette partie, nous avons décidé de mettre en avant deux vidéos que nous vous conseillons vivement. La première concerne une table ronde qui a eu lieu le mercredi 18 janvier et rediffusée sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale. Celle-ci se concentre sur l’enseignement en mathématiques et en sciences et parmi les protagonistes notables nous retrouvons entre autres : Mélanie Guenais (Collectif Maths et Sciences), Étienne Ghys (secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences), Didier Roux (président de la fondation La main à la pâte) et Marc-André Selosse (président de BioGée).La seconde vidéo est un séminaire (en ligne) SéDiMath, animé par Pierre Arnoux (IML Marseille) et portant sur l’enseignement scientifique en France depuis trente ans : une frénésie de réformes, jamais évaluées ; une politique de formation et de recrutement totalement chaotique. On peut aussi accéder au diaporama et aux commentaires. L’événement avait été annoncé par l’association Les mathématiques vagabondes sur instagram. Inauguré en décembre par un exposé de Guillaume Hollard (Les femmes et les mathématiques. L’apport de l’évaluation des politiques publiques.), ce séminaire est consacré à la diffusion des mathématiques.
Pierre Arnoux, scrute depuis bien longtemps la politique éducative de la France, particulièrement en sciences et en mathématiques. Il a rassemblé au fil des ans des informations chiffrées très parlantes, issues pour l’essentiel des publications du ministère de l’Éducation nationale et de son service de statistiques : la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) dont il a souligné la grande qualité du travail. Il s’est appuyé sur ces données pour dresser un tableau saisissant de l’évolution de la formation scientifique. Son exposé est un réquisitoire implacable contre les politiques éducatives qui ont conduit à la catastrophe que presque plus personne ne nie et qui s’aggrave sans cesse. Les inégalités de plus en plus criantes (origine sociale, genre) sautent aux yeux. En écoutant Pierre Arnoux, on s’interroge sur la responsabilité de la communauté mathématique vis-à-vis de cette dégradation. L’écrasante majorité de ses membres s’accorde sur ce constat de faillite, mais est longtemps restée passive. Une mobilisation commence cependant à voir le jour, notamment grâce à l’action du collectif Maths et Sciences. Elle nous donne une (petite) lueur d’espoir. L’exposé de Pierre Arnoux constitue en tout cas une référence extrêmement précieuse pour celles et ceux qui ne se résignent pas.
Un peu de maths pour assaisonner votre licence ?
Ce mois-ci, certains articles nous ont montré que l’on peut faire des maths en dehors des traditionnels parcours scientifiques que nous connaissons, en suivant des doubles licences.L’une d’entre elles associe les mathématiques et la musique et est mise en avant par un article du Monde. Selon Benoît Navarret, coresponsable de la double licence sciences et musicologie de Sorbonne Université, « ce parcours est né de la frustration des étudiant.e.s, qui à la sortie du lycée, ne souhaitaient pas se séparer de deux disciplines qui leur étaient chères ». Cela peut être surprenant au premier abord, mais ce n’est pas si étonnant de mélanger ces deux matières étant donné que musique et mathématiques sont intimement liées. Comme le mentionne très justement l’article cité plus haut : « La musique est un phénomène acoustique, les relations entre sciences et musiques sont riches et intellectuellement cohérentes ».
D’autre part, on apprend dans cet article du Monde que « partout en France, les doubles licences sont en essor : sollicité par Le Monde, l’Office national d’information sur les enseignements et les professions en recense près de cinq cents. Il y a dix ans, elles se comptaient encore sur les doigts d’une main. » L’article nous présente la double-licence IA (Intelligence Artificielle) et science. Les étudiant·es qui se dirigent vers un tel parcours sont très intéressé·es par les mathématiques et par la vie en entreprise. Il s’agit d’un parcours très sélectif : « Avec 1.600 demandes pour 30 places, cette nouvelle formule […] a déchaîné les passions sur Parcoursup ». Le caractère sélectif de ces formations pose question, au sein de l’université qui, elle, prône la non-sélectivité.
Dans le même registre, Le Monde Informatique titre : « L’Université de Caen coordonne un projet de 5 M€ pour former sur l’IA ». Comme mentionné dans l’article l’objectif principal est « la démocratisation des formations de niveau Master ou ingénieurs existantes relatives à l’IA générale et à la double compétence (IA + X) en explicabilité. Le but est de former 26.000 étudiants spécialistes et non-spécialistes à ces technologies […] ». Rien d’étonnant de voir émerger de telles initiatives étant donné la place que prennent les nouvelles technologies liées à l’IA dans notre quotidien. En outre les entreprises sont naturellement de plus en plus intéressées par de tels profils. Comme le souligne l’article, le projet est « soutenu par de grandes entreprises comme Airbus, Safran, Renault et Actenium. »
Enfin, terminons sur cet article du Figaro étudiant qui nous parle d’autres double-licences : les doubles diplômes avec Science Po. Cela peut sembler paradoxal, mais ces filières sont aujourd’hui moins sélectives que la voie d’entrée « classique » à Science Po Paris. Selon l’article : « les taux d’accès [du double diplôme] en mathématiques […] de l’Université Paris-Cité s’[élève] à 24% ».
Réintéresser les élèves
Comme d’habitude dans cette rubrique, nous terminons par quelques initiatives notables relayées dans certains médias. Par exemple, cet article de franceinfo met à l’honneur les enseignant·es de l’Académie de Lille qui enseignent les mathématiques par le jeu. À l’instar du jeu d’Awalé que nous avons présenté dans la dernière Revue de Presse, les jeux et énigmes sont intiment liés à la logique et donc aux mathématiques. Une pratique qui a fait ses preuves et qui permet aux élèves de faire des maths de façon ludique !En parallèle du très bancal « module de réconciliation » que veut mettre en place l’Éducation nationale, les initiatives extra-scolaires pour réintéresser les élèves aux mathématiques proposent quant à elles de véritables alternatives. Comme nous pouvons le lire dans le Journal du Centre, un laboratoire de mathématiques est en place à Clamecy depuis octobre. Ce n’est pas le premier à voir le jour mais il est intéressant de remarquer que le nombre de tels lieux de partages croît chaque année. Comme le souligne Marc Pautet, coordinateur du laboratoire : « L’objectif est d’améliorer globalement le niveau en maths des élèves et de mieux promouvoir la discipline ».
Enfin du côté de la scène internationale, une cérémonie en l’honneur des élèves primés aux Olympiades 2022 a eu lieu à Hanoï (Vietnam) à la fin du mois de décembre. Cette information donnée dans Le Courrier du Vietnam montre que ce genre de tournoi fonctionne toujours et permet aux élèves de s’intéresser aux maths d’une autre façon !
À l'honneur
L’Académie des sciences a élu deux nouveaux membres dans sa section de mathématiques : Guy David, professeur à l’université Paris-Saclay, et Vincent Lafforgue, directeur de recherche au CNRS (Institut de Mathématiques de Jussieu-Paris Rive Gauche). Ce dernier y rejoindra donc son frère, Laurent, élu en 2003 (et médaillé Fields en 2002). L’information a été donnée dès le 20 décembre par le CNRS sur le site de l’INSMI, mais ne se trouve toujours pas sur le site de l’Académie.
Créé en 2017 par la Société mathématique de France (SMF), le concours SMF junior « vise à promouvoir la recherche en mathématique auprès des étudiants en licence ou en master ». La quatrième édition s’est tenue au début du mois de novembre. Sept problèmes étaient proposés aux candidats. La remise des prix a eu lieu le 21 janvier à l’Institut Henri Poincaré. Le concours a le soutien du labex MILyon, du labex Bézout, de la Fondation Sciences Mathématiques de Paris et de la Fondation Jacques Hadamard.
La chercheuse en physique nucléaire Rajaâ Cherkaoui El Moursli est à l’honneur sur le site marocain La Vie Éco qui décrit son parcours en affirmant qu’elle « défie les lois de la physique », qu’elle « compte aujourd’hui parmi les 200 scientifiques les plus influents du monde » mais que « la réussite et la célébrité ne lui sont pas montées à la tête ».
Toujours au Maghreb, en Algérie cette fois, c’est aussi une femme qui a fait la une de l’actualité en soutenant une thèse de doctorat en probabilités et statistique à l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou. La docteure, Amel Saïdi, est non-voyante, ce qui est assez rare pour être remarqué. Le site Observalgérie l’a très justement mise à l’honneur, de même que le site de son université, qui publie des photos de la soutenance et une vidéo dans laquelle Amel Saïdi s’exprime après la délibération du jury. Notons que la rubrique Éducation et Petite Enfance du site de la Fédération des Aveugles de France est illustrée par des maths au tableau écrites par un jeune astrophysicien malvoyant.
Diffusion
Pour ce premier mois de l’année 2023, la rubrique Diffusion prend soin de vous et vous propose des balades, des conférences, des jeux et un fun fact : il y aura 53 dimanches cette année, et 2023 n’est que la cinquième année du 21e siècle à avoir cette propriété.
Que faire le week-end ?
Pour célébrer cette abondance de dimanches, quoi de mieux qu’une balade toulousaine à la découverte de femmes scientifiques ? Ces déambulations sont proposées par l’association Femmes & Sciences en partenariat avec l’Université Paul Sabatier à Toulouse, université dans laquelle elles se déroulent. Au programme de la visite grandeur nature : une mathématicienne militante féministe, une philosophe antique, la première présidente de l’Académie des Sciences… En tout, ce sont 7 vies de sciences que vous pourrez découvrir en compagnie des militantes de l’association Femmes & Sciences. Pour s’inscrire à cet événement gratuit, rendez-vous sur ce site.
L’Institut Henri Poincaré, situé au cœur du Quartier latin parisien, est un lieu sûrement bien connu des lecteurs et lectrices de cette revue de presse. En 2023 ouvrira la Maison Poincaré, comme nous le rappelle le magazine TimeOut, une extension naturelle de l’institut qui s’installera dans les anciens laboratoires du prix Nobel de physique Jean Perrin, à (littéralement) deux pas du site actuel. En plus d’offrir aux chercheurs et chercheuses de meilleures conditions matérielles et des espaces de rencontres plus ouverts, ce nouveau bâtiment accueillera un espace muséographique ouvert au public. La visite de cet espace de 900m2 s’articulera autour des verbes connecter, modéliser, visualiser, inventer, partager, devenir et respirer. Les respirations en question se feront dans un jardin aménagé qui accueillera un souvenir de Bourbaki et une sculpture géométrique… Toutes les infos sur le site de la future Maison Poincaré !
Si pour vous le mot dimanche est synonyme d’intérieur plutôt que d’extérieur (ce qui est très raisonnable en ce début d’année froid), on vous propose le replay de l’émission Twitch du magazine Sciences & Avenir, dont l’invité était Avner Bar-Hen, récent co-auteur de Dingue de Maths aux éditions EPA.
De 7 à 77 ans
Si nos propositions de dimanches mathématiques ci-dessus ne vous ont toujours pas convaincu, la rubrique Diffusion joue son dernier atout : des jeux ! Et encore mieux, des jeux mathématiques ! Tout d’abord à destination des petits, le site Être Parents propose une initiation familiale à la mathémagie, concept inventé par le mathématicien espagnol Fernando Blasco. Un exemple de tour simple : l’enfant pense à un nombre, ajoute 3, multiplie par 2, soustraie 8, divise par 2, ajoute 1… et retombe sur le même chiffre ! Magie ou mathématiques ? Peut-être les deux.
Pour les plus grands maintenant, un puzzle illustrant le concept mathématique d’holonomie : le Continental Drift. Ce cousin éloigné du Rubik’s Cube et petit frère du Taquin se compose d’une Terre découpée tel un ballon de foot, chaque hexagone étant mobile. Le but du jeu est simple : retrouver la position initiale (où tous les continents sont à leur place, d’où le nom) à partir d’une position mélangée. L’holonomie apparaît si une pièce effectue une boucle complète autour de l’objet : bien qu’elle soit revenue à son point de départ, elle aura effectué une rotation ! Cela n’a pas d’équivalent pour le Taquin, et montre l’intérêt de ce jouet mathématique. Son créateur, Henry Segerman, est mathématicien à l’université d’Oklahoma State et présente le Continental Drift dans cette vidéo. On conseille aussi l’article récent (en anglais) du New York Times, qui présente d’autres inventions géniales de Segerman.
Parutions
En librairie
En janvier l’une des plus grandes librairies indépendantes de l’Hexagone, Eyrolles, consacrait une vitrine entière de sa librairie du boulevard Saint-Germain à des ouvrages de mathématiques et à un seul éditeur, Calvage et Mounet (C&M), spécialisé dans les mathématiques du supérieur. En sous-sol, un immense rayon mettait aussi en exergue les publications de C&M. C’est assez rare pour être noté et plus d’un passant a dû être surpris de voir côte à côte, bien en vue, des titres comme l’Algèbre éclectique, le Carnet de Voyage en Algébrie, l’Introduction aux graphes aléatoires, les Nouvelles histoires hédonistes de groupes et de géométries ou encore Le calcul des tresses du regretté Patrick Dehornoy. Ce dernier aurait certainement apprécié de voir les mathématiques ainsi mises en valeur ! La plupart des ouvrages présentés sont récents. Ils sont sortis à une période fortement perturbée par la crise sanitaire. C’est donc un coup de projecteur bienvenu pour un éditeur qui cible un public assez spécifique de connaisseurs, mais dont la qualité des productions mérite d’être beaucoup plus connue. Chaque titre constitue une référence dans son domaine et prend toute sa place dans les bibliothèques de mathématiques. Ajoutons que plusieurs nouveautés sont attendues dès le début février comme La sommation des séries, d’Euler à Ramanujan ou Transformations de Radon. Cinq leçons de géométrie intégrale. D’autres viendront les prochains mois.
Entrons maintenant dans un tout autre domaine, celui de la diffusion. Dans son émission Autour de la question diffusée sur RFI, Caroline Lachowsky s’interroge sur la géométrie du ballon rond. Quelle géométrie du ballon rond et pourquoi ça change tout ? Comment construire un ballon aussi rond que possible ? Pourquoi la balistique, le frottement ou l’écoulement d’air sont essentiels pour marquer des buts ? Pour répondre à toutes ces questions (et bien d’autres), elle reçoit pendant cinquante minutes le « génial mathématicien Étienne Ghys ». Son dernier livre, La petite histoire du ballon de foot, vient juste d’arriver dans les librairies. Un ouvrage qui entraine ses lecteurs dans une captivante promenade à travers vingt siècles de questionnements, de découvertes, de progrès en mathématiques et en sciences. Il y est question de mathématiques, de physique, mais « ce n’est pas un livre de physique, ni un livre de math » précise Étienne Ghys. Celui-ci était présent également quelques jours plus tard sur les plateaux de France Culture, dans un « vendredi grand portrait » de l’émission La Science, CQFD pour expliquer durant une heure, en compagnie de Natacha Triou « quel lien unit Platon, Archimède, Gustave Eiffel et un ballon de football ». Cette dernière interroge également Étienne Ghys sur sa passion du partage, de la diffusion des sciences (elle rappelle qu’il a reçu en 2022 la médaille de la médiation scientifique du CNRS). Il souligne toute la différence entre l’enseignement et la diffusion. Son but n’est pas de « faire apprendre des mathématiques, de démontrer des théorèmes » c’est de parler à tout un chacun de la beauté des mathématiques, de leur présence, parfois inattendue, dans des questions qui ne taraudent pas que les scientifiques. Natacha Triou souligne les talents de conteur d’Étienne Ghys et revient sur son denier ouvrage, La petite histoire des flocons de neige, qui lui a valu le prix Le goût des sciences, dans la catégorie Prix du livre scientifique, décerné par l’Académie des sciences en juin 2022. Après avoir écouté ces deux émissions et lu le dernier livre d’Étienne Ghys, vous ne devriez plus regarder un ballon de foot comme un simple accessoire de jeu… Les amateurs de foot se réjouiront, les curieux aussi !
Boris, 1985 de l’autrice franco-suisse Douna Loup est aussi paru au début de cette année. Boris Weisfeiler, né en Union soviétique, exilé aux États-Unis en 1975 (il a été naturalisé en 1981), était professeur de mathématiques à la Pennsylvania State University. En plus des mathématiques, il avait la passion des randonnées solitaires dans les contrées les plus sauvages. C’est lors d’une de ces expéditions, au Chili, qu’il disparait mystérieusement en 1985 dans une région proche de la sinistre Colonia Dignidad (voir à ce sujet ce récent documentaire d’Arte). Depuis, aucune piste sérieuse ne permet d’avancer la moindre explication. Douna Loup est la petite-nièce de Boris Weisfeiler. « Raconter sa vie, son parcours, c’est une façon de lui rendre hommage » écrit-elle. La sortie de ce livre n’est pas passée inaperçue des médias francophones. Le Temps, Le Monde, entre autres, en parlent. Près de quarante ans après les faits, jamais élucidés, sa petite-nièce, l’écrivaine Douna Loup, exhume dans un texte intime ce « fantôme » de la dictature de Pinochet, un parmi des milliers d’autres écrit Franceinfo Culture. RTS titre de son côté Douna Loup sur les traces d’un fantôme familial.
Einstein est certainement le scientifique le plus souvent cité. Et pourtant il n’y a pas qu’Einstein qui a fait avancer la science nous rappelle Camille Van Belle. Elle était reçue à RFI qui s’interrogeait : Pourquoi tant d’oublié(e)s de la science ? Elle répond dans sa bande dessinée Les oubliés de la science préfacée par Nadine Halberstadt (qui a présidé Femmes & Sciences de 2018 à 2021). Sortie à la fin de l’année dernière, c’est une BD « dédiée » à toutes celles et tous ceux qui ont été injustement évincé.es ou oublié.es par l’histoire des sciences. Vous en découvrirez quarante-huit, mais bien sûr ils sont beaucoup plus nombreux ! Ce sont majoritairement des femmes, mais pas que écrit Nadine Halberstadt dans sa préface. Elle insiste sur le fait que les livres scolaires comportent très peu d’exemples de femmes scientifiques et ajoute que cela influe sur la façon dont les jeunes filles se projettent dans leur avenir.
Nous avions parlé du livre de la journaliste Sylvie Dodeller, Sophie Germain, la femme cachée des maths, paru la première fois en 2020 (voir ici l’article de CultureMath). Il vient d’être réédité en poche, ce qui devrait lui donner un nouvel élan. En tout cas il tombe à point écrit Historia à l’heure où le gouvernement cherche à inciter les filles à étudier les mathématiques et à valoriser les modèles féminins. Ajoutons que l’ouvrage (peu connu), Je suis Sophie Germain d’Anne Boyé et Christine Charretton convient bien aussi aux scolaires comme l’expliquait Claire Lommé dans son blog. Tout comme la BD Les audaces de Sophie Germain d’Elena Tartaglini, Adriana Fillipini et Annalisa Ferrari.
Et pour celles et ceux qui aimeraient compléter cette approche en parlant d’une autre mathématicienne, « peu connue en dehors de l’espace culturel anglo-saxon », signalons que la revue Au Fil des Maths invite ses lecteurs à (re)découvrir le destin hors du commun de la mathématicienne britannique Charlotte Angas Scott. Une page de l’histoire des mathématiques contée par Roger Mansuy qui avait déjà parlé d’elle (voir ici) à l’occasion du congrès ICM.
En kiosque
Epsiloon, vous trouverez une interview du philosophe Philip Kitcher qui défend le point de vue (qui pourra en surprendre plus d’un) que les mathématiques sont une discipline expérimentale : En fait, les maths, c’est empirique. Cette idée n’est pas récente et c’est une question qui a déjà été débattue. John Von Neumann, par exemple, pensait (voir ce texte) que « leur développement est très lié à celui des sciences de la nature ».
Comme nous le disons plus haut, la rubrique « En image » montre sur une double page une fractale lisse avec un bref commentaire explicatif du mathématicien Vincent Borrelli (de l’Institut Camille Jordan).Le rendez-vous mensuel de Jean-Paul Delahaye dans le magazine Pour la Science offre à chaque fois des « promenades mathématiques » aussi variées que passionnantes. En février il propose à ses lecteurs un Florilège de records en mathématiques. Vous y apprendrez, par exemple que la preuve du théorème indiquant la liste des groupes finis simples et montrant qu’il n’y en a pas d’autres est dispersée dans plus de 5000 articles dont la longueur totale est d’environ 15000 pages. Et que, sans surprise, les deux records de calcul les plus populaires parmi les mathématiciens sont le calcul des décimales de pi et le calcul du plus grand nombre premier et là les records sont impressionnants… Sa conclusion ? Battre des records en mathématiques et plus généralement en science est amusant et difficile, mais rarement très sérieux !.
Le numéro de janvier-février du magazine Tangente présente, avec les vœux de la revue, deux dossiers principaux aussi passionnants que différents, Georg Cantor et les sangaku, ces tablettes japonaises votives que l’on trouve à l’entrée de certains temples et qui recèlent parfois d’élégantes énigmes géométriques, où les cercles jouent un rôle important. Pour beaucoup, ce dernier dossier sera une première rencontre avec un monde rarement évoqué chez nous. Si cet opus revient par ailleurs sur les trente-cinq ans de la revue, la rédaction invite à nouveau les lecteurs à rejoindre l’aventure Tangente pour enrichir l’équipe rédactionnelle, trouver de nouveaux publics et renouveler les membres actifs du Club Tangente…
Histoire
Le quatre centième anniversaire de la naissance de Blaise Pascal sera célébré le 19 juin 2023. Comme de juste, de nombreux événements ont été prévus à cette occasion. France 3 Auvergne-Rhône-Alpes détaille les festivités organisées à Clermont-Ferrand, la ville qui a vu naître cette « figure incontournable de la pensée, de l’intelligence, et de la culture française et internationale » selon les mots du maire, Olivier Bianchi. Elles ont commencé dès le 13 janvier, avec une conférence donnée à l’université Clermont-Auvergne (UCA) par Cédric Villani, qui a répondu à cette occasion aux questions de La Montagne. La conférence avait été annoncée sur le site de l’UCA mais nous n’avons pas trouvé trace d’une éventuelle capture vidéo. La Montagne a aussi interrogé Laurence Plazenet, professeure de littérature française à l’UCA et directrice du Centre international Blaise Pascal. Prochains événements à Clermont : un colloque « Pascal résistant et prophète », du 23 au 25 mars à la maison de la Culture ; Un village « Arts et Sciences » (afin de rassembler « toutes les familles, tous les âges »), du 31 mai au 4 juin, place de la Victoire ; la mise en circulation d’un timbre à l’effigie de Pascal le jour même de l’anniversaire ; enfin, la première semaine de décembre, « Blaise Pascal sera au rendez-vous d’une pièce de théâtre […] d’Éric Rohmer, « Le trio en mi bémol », évoquant des notions centrales de la pensée de Pascal, comme sa réflexion sur le pari ». Le magazine Science et Avenir parle, lui, de « la sagesse d’un mathématicien précoce, généreux et avisé ».
L’anecdote a été souvent racontée. À l’automne 2017, Srinivasa Ramanujan, mathématicien prodige dont le grand théoricien des nombres Godfrey Hardy a détecté le génie, est hospitalisé en Angleterre, où Hardy l’a invité à venir depuis l’Inde trois ans auparavant. Le maître du Trinity College de Cambridge rend visite à son jeune disciple et lui dit en arrivant qu’il a pris un taxi dont le numéro, 1729, ne lui semble pas être un nombre « intéressant ». « Au contraire ! », répond Ramanujan. « C’est un nombre extrêmement intéressant. C’est le plus petit nombre décomposable en somme de deux cubes de deux manières différentes. 1729 est égal à 93 + 103 mais également à 13 + 123. C’est par ce récit édifiant que commence l’article de Futura Science qui raconte la formidable (mais hélas bien trop courte) histoire de Ramanujan. Autodidacte, passionné, voire obsédé, par les mathématiques dès son plus jeune âge, fonctionnant entièrement à l’instinct et à l’intuition (contrairement à son mentor), il a laissé dans de petits carnets de notes des milliers de formules dont quelques-unes étaient fausses, quelques autres étaient déjà connues, mais dont la plupart étaient pertinentes et originales, et ont parfois donné lieu à des avancées théoriques majeures en théorie des nombres. Il aura fallu près d’un siècle pour explorer toutes ces notes. Malheureusement, la santé de Ramanujan était très mauvaise et il est mort en 1920, à seulement 32 ans. Hardy estimait que si le don de Ramanujan avait été reconnu plus tôt, il serait devenu un des plus grands mathématiciens de tous les temps.
Au cimetière du Père-Lachaise, le buste du mathématicien Joseph Fourier avait disparu depuis longtemps. Il devrait retrouver sa place au début de cette année. C’est L’Yonne Républicaine🔒 qui l’annonce, rappelant au passage que Fourier était auxerrois.
Jürgen Schmidhuber (voir aussi sa page Wikipedia en anglais) est considéré par beaucoup comme un des pères, voire LE père, de l’intelligence artificielle (IA) et de l’apprentissage profond ou Deep Learning (DL). Il publie sur son blog du site de l’institut suisse IDSIA (Istituto Dalle Molle di studi sull’intelligenza artificiale) un article monumental (en anglais) dont l’ambition est de présenter l’Histoire de l’apprentissage automatique ou Machine Learning (ML), de l’IA, du DL et des réseaux de neurones. Il la situe dans un contexte allant tout simplement « du Big Bang jusqu’à un moment où l’univers aura atteint plusieurs fois l’âge qu’il a aujourd’hui »… On ne peut qu’être impressionné·es par un texte qui, mis au format d’un livre imprimé, couvrirait près d’une centaine de pages, dont au moins la moitié consacrée à des références constituées de 565 entrées ! Et l’auteur nous informe qu’il s’agit là du brouillon d’un des chapitres de son ouvrage à paraître sur à l’IA… Personne ne nous croirait si nous prétendions avoir lu intégralement ce pavé. Nous nous contenterons de dire que les 22 sections de l’article sont pour la plupart consacrées à des dates clés de l’histoire de ces disciplines. La première est 1676, avec les résultats de Leibniz sur la dérivation des fonctions composées, que Jürgen Schmidhuber considère comme cruciaux pour l’étude des réseaux de neurones. Viennent ensuite, autour de 1800, Legendre et Gauss, à qui l’on doit le premier modèle linéaire de réseau de neurones. Mais évidemment, c’est au vingtième siècle, jalonné par 18 étapes marquantes, que tout s’accélère. Avouons enfin que la présentation du texte par son auteur nous a laissés penser que sa principale qualité n’est pas la modestie… Dans sa déclaration de non-responsabilité (disclaimer), il anticipe les critiques qui, pointant un éventuel conflit d’intérêts, estimeraient qu’une Histoire de l’apprentissage profond ne devrait pas être écrite par quelqu’un qui en a été un acteur important. Pour réfuter cet argument, Schmidhuber n’hésite pas à écrire qu’il « en sait plus que les autres » sur cette histoire » et que, s’il cite abondamment les travaux de sa propre équipe, c’est parce que les réseaux de neurones les plus cités sont basés sur ces travaux. Il a d’ailleurs écrit un article pour se féliciter de ce constat. Il s’en remet donc au jugement des futurs historiens de l’IA !
Arts
En février on retrouvera au théâtre du campus universitaire de Grenoble une pièce consacrée au mathématicien et intellectuel Laurent Schwartz et intitulée « Un mathématicien aux prises avec son siècle ». La pièce est gratuite, et c’est relayé par le Dauphiné.
À Bayonne et à Hendaye, c’est de la musique inspirée « de la simplicité esthétique des mathématiques, de la physique et du code » que l’on pourra aller écouter au mois d’avril. Visit Bayonne fait l’annonce de ce spectacle d’« immersions électro acoustiques » avec l’Ensemble 0 et Éric Lenormand en deux actes.
Enfin, partout et nulle part à la fois, les mathématiques s’invitent désormais dans les arts visuels via l’apprentissage machine et la génération d’images par de l’intelligence artificielle comme évoqué plus haut dans la rubrique Applications. Le magasine Quanta consacre un article à DALL·E 2 (Dalí deux donc), une intelligence artificielle capable de générer des images correspondant à une description donnée par l’utilisateur, avec des exemples de phrases et d’images associées.
Pour finir
La chaine Youtube WIRED propose une initiation au concept d’infini en mathématiques. Le format est original : la mathématicienne Emily Riehl de l’université Johns Hopkins « explique » l’infini d’abord à une enfant, puis à une adolescente, à un étudiant en licence, à un doctorant, et pour finir à Adriana Salerno, théoricienne des nombres. Les explications sont évidemment adaptées au niveau de l’interlocuteur·rice, et tout le monde peut donc y trouver son compte !
Post-scriptum
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Article édité par L’équipe Actualités.