Juin 2024

Publié le 1 juillet 2024

Ce mois de juin 2024 a été riche en événements pas toujours réjouissants, et à l’heure où nous rédigeons cette revue de presse, les premières estimations des votes au premier tour des élections legislatives, qui ont occupé (à juste titre) une grande partie du devant de la scène éditoriale des dernières semaines, font très froid dans le dos malgré la chaleur estivale. Nous ne pouvions faire l’impasse sur ces informations, auxquelles nous consacrons notre Une du mois.

À leurs côtés, on retrouve toujours la réforme qui occupe le haut du pavé depuis plusieurs mois, à savoir celle du collège et ses fameux groupes de niveau-besoin (pour les deux du fond qui reviendraient par exemple d’un séjour de six mois sur la station spatiale internationale), et qui fait majoritairement consensus contre elle. Ce mois-ci, elle doit cependant partager la vedette de la rubrique Enseignement avec les épreuves de mathématiques du baccalauréat, enfin revenues en fin d’année scolaire, dont la (prétendue ou non) difficulté fait couler beaucoup d’encre et de salive.  Nous vous dévoilons tout ceci en détail (et entre autres choses) dans la rubrique Enseignement.

La moisson éditoriale de ce premier mois d’été comporte cependant aussi nombre de raisons de se réjouir, comme vous aurez le plaisir de le découvrir au fil de votre lecture des différentes rubriques de cette nouvelle édition de la revue de presse. Nous vous rappelons que la prochaine édition paraîtra le 1er septembre, pour un retour sur l’activité éditoriale des mois de juillet et août, car tout comme vous, notre équipe a besoin de reprendre des forces après une année riche en changements.

Nous vous souhaitons donc à toutes et à tous un très bel été, en compagnie d’Images des mathématiques par exemple, et nous espérons vous retrouver à la rentrée pour une nouvelle année à explorer la face médiatique du monde des mathématiques en votre compagnie !

À la une

Elections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 : on en parle (beaucoup, et à raison)

Alors que le premier tour des élections législatives s’est tenu en ce dernier jour du mois, les premières estimations de vote confortent la légitimité de celles et ceux rongé·es (comme nous) par l’inquiétude grandissante d’une arrivée au pouvoir possible de l’extrême droite, qui pourrait obtenir une majorité absolue à l’Assemblée Nationale selon cette toute dernière infographie publiée par France Info en ce soir du 30 Juin. Même si l’on peut continuer à espérer un retournement de situation au second tour en faveur du NFP (seul rempart effectif contre les politiques d’extrême droite qui nous pointent au nez, quoi qu’en disent par exemple certains membres du parti présidentiel actuel, et indépendamment de l’estime ou du mépris que l’on peut avoir pour le dirigeant actuel de la LFI, qui n’est qu’une des composantes du NFP, au cas où il faudrait encore le rappeler…), certain·es prennent à juste titre les devants, notamment dans les milieux éducatifs et scientifiques.

La fusion des extrêmes, une idée qui ne marche pas en politique : ne vous méprenez pas sur les propos tenus dans certains médias !

On apprend par exemple, dans cet article publié le 21 juin par France Info, que 700 cadres de l’Éducation nationale (chef·fes d’établissement et membres des inspections pédagogique, d’académie, générale) ont lancé une pétition (accessible à cette adresse) annonçant leur positionnement relativement à l’évolution à craindre des valeurs portées par l’école en cas d’accession au pouvoir des partis d’extrême droite. Intitulée « Fonctionnaires d’État, nous n’obéirons pas« , elle rappelle notamment que servir l’Etat n’est pas toujours servir le gouvernement : “Parce que nous servons l’Etat, nous déclarons dès aujourd’hui qu’aucun d’entre nous n’appliquera de mesures qui contreviendraient aux valeurs de la République”.

Leurs collègues de la recherche scientifique et médicale française tentent aussi d’occuper le terrain médiatique autant que possible. Plus de 1000 d’entre elles et eux ont lancé un « appel solennel » dans une tribune parue le 23 juin (et mise à jour le 26) dans le journal Le Monde 🔒, où ils et elles nous rappellent qu' »une science qui ne circule pas est une science morte » et que, pour découvrir et innover, un « brassage de chercheurs et d’étudiants de toutes origines, de toutes religions, de toutes opinions » est essentiel. Une diversité qui va clairement à l’encontre des préférences ardemment défendues par les partisan·es de l’extrême droite…

La CP-CNU (Commission Permanente du Conseil National des Universités) rappelle quant à elle, dans un communiqué du 26 juin faisant suite à la première assemblée pleinière de son mandat, le 12 juin dernier, les « valeurs républicaines sur lesquelles se fonde l’Université française à savoir l’universalisme, les mêmes droits pour tou(te)s les étudiant(e)s et la diffusion libre des connaissances » et que, n’en déplaise à certain·es, « l’Université est un lieu de recherche et de formation, de coopérations internationales et de débats scientifiques, où les enseignant(e)s, les chercheur(se)s et les enseignant(e)s-chercheur(se)s jouissent d’une « pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression » ayant une valeur constitutionnelle (article L. 952-2 du code de l’éducation) ».

Quelques jours plus tôt, le Réseau des INSPE (Instituts Nationaux Supérieurs du Professorat et de l’Education) publiait un communiqué dans lequel sont rappelées deux des missions fondamentales de l’Ecole qui sont d’« apprendre à vivre ensemble et apprendre à apprendre ensemble ». Une prise de position claire et concise, en grande partie résumée par la phrase suivante, dont la pertinence est indubitable : « Tout en étant conscients de sa fragilité, nous croyons en la capacité de l’École à créer une communauté nationale. Ses missions ont besoin d’être rappelées et, aujourd’hui, défendues. »

Nos sociétés savantes (SMF et SMAI) expriment quant à elle leur « profonde inquiétude face à l’arrivée de l’extrême droite aux portes du pouvoir en France« , dans un communiqué joint du 27 juin qui enfonce un peu plus le clou en se basant sur les choix effectués dans un passé plutôt proche par les élu·es RN déjà en place (tant au niveau national qu’au niveau européen). Cela peut être résumé comme suit : « Au vu des votes du RN lors de la précédente mandature, sous un gouvernement d’extrême droite des atteintes aux droits des femmes et des personnes LGBTQIA+, à la liberté syndicale, à la protection sociale seraient à prévoir. La défense de l’environnement serait abandonnée. Lieux de la pensée libre et critique, les universités, déjà affaiblies par un sous-financement chronique, seraient assurément parmi les premières cibles. »

N’oubliez pas que chaque voix a une réelle importance et que déposer votre bulletin de vote dans l’urne le 7 juillet prochain peut vraiment faire la différence sur la politique scientifique et éducative (sans compter les autres domaines, au moins aussi importants, n’est-ce pas ?) que mènera la France dans les prochaines années. L’abstention n’est malheureusement pas une option viable, cette fois-ci : notre avenir à toutes et à tous est entre vos mains, alors votez et faites voter les abstentionnistes de votre entourage, s’il vous plaît !

Vie de la recherche

Quand les mathématiques deviennent plus facilement accessibles : science ouverte et publications « Open access »

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En 2016, l’Assemblée Nationale adoptait le projet de loi pour une République Numérique 1, qui stipulait notamment que « les scientifiques des établissements français peuvent déposer le contenu de leurs articles (manuscrit auteur accepté) dans une archive ouverte immédiatement après leur publication si l’éditeur n’impose pas d’embargo, et s’il en impose un, celui-ci ne peut excéder 6 mois en “sciences dures” et 12 mois en SHS. Ce droit vaut même après avoir accordé des droits exclusifs à l’éditeur. » Huit ans après, Karim Ramdani réalise un état des lieux concernant plus spécifiquement les publications mathématiques : disponible en accès libre (bien sûr) depuis la fin du mois de mai (et mis à jour le 13 juin dernier), et une fois n’est pas coutume, on y découvre avec plaisir que les mathématicien·nes français·es sont à la pointe de l’ouverture. Nous vous laissons le plaisir de découvrir le reste du contenu de cet article court et facile à lire, et signalerons juste que l’on y apprend par exemple que pour l’année 2022, « à un taux d’ouverture global de 65% correspondait un taux de près de 80% en Mathématiques contre 51% en Sciences sociales. »

Le 12 juin dernier, un après-midi Science ouverte – EPIGA s’est tenu sur le campus Jussieu de Sorbonne Université. Clôturée par la remise du prix Demailly pour la science ouverte, dont on vous reparle dans la rubrique « A l’honneur », cette demi-journée a permis d’entrevoir différents aspects du modèle de publications en accès ouverts, ainsi que les limites du modèle actuel de « publish or perish » (soit donc « publier ou mourir » dans notre langue, ce qui est moins poétique), dans lequel tend à se couler la recherche scientifique contemporaine, privilégiant parfois la quantité à la qualité. A noter que cet événement était organisé dans le cadre de la conférence EPIGA 2024, première du nom, à destination de chercheuses et chercheurs en géométrie algébrique.

Un état des lieux du monde de la recherche scientifique française : où sont les femmes ?
L’édition 2024 de l’Etat de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (connu sous le doux nom d’EESRI 17, car 17ème du nom) est parue le 18 juin dernier. Cette brochure, qui comporte pas moins de 54 chapitres (portant chacun sur un thème précis) et 7 annexes, présente les dernières données de synthèse disponibles à l’aide de graphiques, tableaux et commentaires complets et plutôt compréhensibles pour les non expert·es dont nous faisons humblement partie. Nous n’avons pu résister à l’attrait du chapitre numéro 13 (malheur!), sobrement intitulé « La parité dans l’enseignement supérieur« . Précipitez-vous en bas de la page, qui reprend les données majeures des 6 dernières années, et votre premier constat sera sans appel : ce qui ressemble presqu’à un copier-coller d’une édition à l’autre nous apprend que si la proportion de jeunes femmes diplômées de l’enseignement supérieur ne cesse d’augmenter (on passe de « la moitié » à « Plus de la moitié (57%) » en 5 ans) et reste supérieur de 10 points à la proportion de jeunes hommes diplômés de l’enseignement supérieur, force est de constater que : « Toutefois, elles sont très minoritaires dans les filières de formations scientifiques » (ce qui ne semble pas aller en s’améliorant depuis une dizaine d’années, si l’on se réfère aux trois jolis graphiques de ce document) et que « Trois ans après leur sortie de l’enseignement supérieur, leur taux d’emploi stable est plus faible que celui des hommes, et leurs conditions d’emploi moins favorables. » Tout va bien dans le meilleur des mondes, n’est-ce pas ?

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Même son de cloche du côté de l’Académie des Sciences : dans un rapport publié le 18 juin dernier et intitulé « Sciences : où sont les femmes ? », cette institution s’inquiète de la large sous-représentation des femmes dans les filières scientifiques, et notamment dans notre discipline. Comme l’écrit explicitement la rédaction de France Info dans cet article du 18 juin se basant sur les conclusions de ce rapport (ou du communiqué de presse correspondant, plus rapide à lire), « les domaines de la physique, la chimie ou les mathématiques restent encore dominés par les hommes. » Après avoir mesuré cette sous-représentation et identifié quelques causes à l’origine de cette situation, l’Académie propose quelques pistes pour tenter de changer les choses : si ces idées ne sont pas vraiment nouvelles pour celles et ceux qui s’intéressent vraiment à cette problématique paritaire (ce qui ne semble pas être le cas de la plupart des personnes à l’origine des commentaires de l’article de France Info sus-mentionné), et dont une partie se réunira à Marseille les 1er et 2 juillet prochains à l’occasion des 7ème journées parité, on peut espérer que le fait qu’elles soient diffusées par ce nouveau canal leur permettra d’atteindre certaines oreilles qui leur étaient inaccessibles ou insensibles jusqu’ici.

Et aussi, ce mois-ci...

  • Les sociétés savantes mathématiques (SMF, SMAI et SFdS) s’associent pour s’opposer au passage injustifié de nombreux laboratoires de mathématiques en ZRR (Zone à Régime Restrictif) : accédez grâce à ce lien à la lettre qu’elles ont envoyée à toutes les directions d’unités du territoire pour expliquer leurs motivations et les conséquences désastreuses qu’aurait une modification aussi radicale des statuts de nos unités de recherche.
  • A l’occasion du 60ème anniversaire de l’établissement de relations diplomatiques entre la France et la Chine, un accord portant sur la remise en place d’une classe sino-française de formation de mathématiciens de haut niveau a été signé à l’université de Wuhan (Chine) : plus de détails à retrouver dans cet article du site French China
  • « Qu’est-ce que tu cherches ? » C’est le nom du podcast lancé ce mois-ci par le CNRS pour permettre à ses chercheurs et chercheuses d’expliquer leurs sujets de recherche et de raconter leur quotidien. Plus d’informations à retrouver dans cet article qui regroupe les deux premiers épisodes, et vous permet si vous le souhaitez de vous abonner pour ne rater aucune des prochaines sorties.

Recherche et applications

Reconnaitre des formes sans les voir : un défi relevé par des chercheurs de l’ESPCI

Dans un article paru dans l’édition du 29 mai du journal Le Monde 🔒, David Larousserie nous explique comment une équipe de physiciens parisiens de l’Institut Langevin et du laboratoire Gulliver (tous deux hébergés à l’ESPCI) ont utilisé des formules mathématiques du XIXè siècle pour aider un robot à « voir » son environnement sans utiliser aucun appareil de mesure moderne de type caméra, radar ou GPS. Rien de magique dans tout ceci, mais simplement un changement de paradigme judicieusement résumé comme suit par Olivier Dauchot, directeur du laboratoire Gulliver : « Leur idée est judicieuse. Ils montrent qu’on est pas obligé de voir une forme pour la reconnaître. » Dit ainsi, cela paraît évident à toute personne ayant côtoyé des individus malvoyants ou non-voyants, ou l’étant elle-même, ou encore à tout·e enseignant·e d’école maternelle ayant utilisé le jeu de Kim pour enseigner les caractéristiques des polygones usuels à ses élèves de petite, moyenne ou grande section.
La mettre en oeuvre de manière automatisée est cependant un challenge d’un autre niveau, relevé par Samuel Hidalgo-Caballero (alors doctorant dans l’équipe, et à l’origine de la remarque ayant lancé le processus), Mathieu Labousse et leurs collaborateurs, en étendant au cas non convexe deux formules (respectivement dues à Augustin-Louis Cauchy et Morgan Crofton) reliant l’aire d’une surface convexe à la longueur de ses cordes et/ou à son périmètre. A partir de cette formule étonnamment simple, les chercheurs ont pu programmer de manière à la fois frugale et astucieuse un robot très rudimentaire mais néanmoins capable de reconnaître une forme donnée en moins de dix minutes et sans recours à des ressources matérielles ou calculatoires importantes. De quoi ouvrir de nouvelles perspectives de recherche pour les tâches de reconnaissance en milieu obscur ou miniature, par exemple ! Pour celles et ceux d’entre vous qui lisent couramment le japonais, un article paru le 29 mai sur le site d’information Nipponese présente aussi cette avancée scientifique potentiellement riche en applications.

Quand les maths ont rendez-vous avec la géographie

Dans le trente-deuxième épisode de la série récurrente « Le regard du Cartographe », sur le site du journal l’Humanité, Nicolas Lambert nous parle de la loi de Newcomb-Benford, que celles et ceux d’entre vous ayant lu « Le théorème du parapluie » de Mickaël Launay connaissent déjà. Il s’agit d’une loi de répartition des chiffres qui semble défier tout bon sens, et qu’il se retrouve pourtant dans nombre de domaines, dont la géographie. Dans un article agréable à lire, l’auteur nous explique l’origine de cette loi et nous invite à la tester dans notre quotidien : n’hésitez pas à vous prendre au jeu ! En outre, une animation (très bien faite) comparant échelles régulière et logarithmique dans le contexte géographique permet de comprendre pourquoi cette loi n’est finalement pas si contre-intuitive que de prime abord. Finalement, comme le dit si bien Nicolas Lambert : « Que conclure ? Que le monde mathématique tout comme le monde géographique est donc parfois contre intuitif. Et c’est bien pourquoi le fameux bon sens ne remplacera jamais la bonne vielle méthode scientifique. »

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Enseignement

Manifestations contre le “choc des savoirs”: et ça continue, encore et encore, c’est que le début, d’accord, d’accord

Thème récurrent dans la Revue de Presse depuis maintenant plusieurs mois, omniprésence dans les médias oblige, le “choc des savoirs” continuer à faire parler de lui ce mois-ci. Comme vous le savez déjà si vous nous lisez régulièrement, le choc majeur de cette réforme est celui des groupes de niveaux (ou “groupes de besoins”, selon que vous soyez team Premier ministre ou team ministre de l’Éducation nationale…). Alors que la fin de l’année scolaire approche à grands pas, nombre de mobilisations se sont tenues ces dernières semaines dans toute la France, à l’instar de celles du samedi 25 mai, qui font suite à l’appel de 8 syndicats enseignants et ont été relayées par de nombreux médias, et de celles du 7 juin.

Manifestations poétiques en vue !

La chaîne d’information en continu France Info consacre ce mois-ci plusieurs articles à ce sujet, ainsi que toute la séance du 25 mai de l’émission l’INAttendu. Durant 26 minutes sont abordés, en compagnie d’invité·es d’expertises variées et images d’archives pertinentes à l’appui, différents points de cette réforme, sous des intitulés explicites  du type « haro sur les groupes de niveau », « des groupes de niveau… pas si nouveaux » ou encore « c’était comment avant, le collège unique ? »
Dans l’édition du 25 mai du Matin week-end d’Europe 1, on apprend plus sobrement que près de 11 500 personnes (enseignant·es, parents d’élèves et élèves) se seraient mobilisées partout en France afin de demander à nouveau l’abandon de ce dispositif très controversé.
Du côté de BFMTV, on met en avant deux des inquiétudes soulevées par les enseignant·es interrogé·es concernant la création de ces groupes de niveau/besoins : d’une part, « l’absence de moyens suffisants pour pouvoir les mettre en place« , et d’autre part, leur essence même, qui revient à « séparer les bons [sic] et les mauvais [sic] alors qu’on a à gagner justement de la diversité et de la richesse de leurs compétences et de leur intelligence à tous« . Ce second point, déjà évoqué à maintes reprises (et à juste titre) dans notre Revue de Presse, est repris par ailleurs par cet article d’Actu.fr. Ce dernier, daté du 31 mai 2024, rappelle que lors d’une manifestation récente dans un collège du Val d’Oise, les élèves eux-mêmes dénonçaient cette mesure, à l’aide de pancartes sur lesquelles on pouvait par exemple lire « Ici, on ne trie pas les élèves », « pas d’égalité sans mixité » ou encore « choc des savoirs, voleurs d’espoir ».

Malgré des mois de tension, la mobilisation ne faiblit pas contre le « choc des savoirs »

Même le Figaro va dans ce sens, avec cette tribune publiée le 24 mai dernier : intitulée « Les “groupes de besoins” ou la mort annoncée du professorat », Ophélie Roque (écrivaine et professeur de français) rappelle que « Ce collège «nouvelle génération» sonne donc la fin des classes hétérogènes pour les mathématiques et le français. Or c’est justement cette notion d’hétérogénéité qui permettait à l’enseignant de tenter de hausser les acquis des élèves les plus fragiles en s’appuyant sur la locomotive formée par le peloton des «meilleurs» ».

Avec toutes ces actions, la communauté éducative et enseignante de France espère pouvoir faire bouger pour de bon le gouvernement sur ce dossier, d’autant plus que les inquiétudes croissent à mesure que le mois de septembre 2024, échéance annoncée pour la mise en place de ces groupes tant décriés, se rapproche… Sachant que la circulaire de rentrée, parue au B.O. du 27 juin et décortiquée de manière intéressante dans cet article du Café pédagogique, semble mettre la cohésion à toutes les sauces, y compris celles allant l’encontre de ce qui a été proclamé au cours des derniers mois, on est en droit de craindre franchement le goût qu’aura la prochaine rentrée scolaire…

L’épreuve de mathématiques au baccalauréat

L’autre actualité bouillonnante de ce mois de juin concerne, comme chaque année, les épreuves du baccalauréat qui se sont tenues tout récemment, contrairement à l’année dernière, où les épreuves de spécialité avaient eu lieu dans le courant du mois de mars : une belle preuve que quand il le veut (rarement, malheureusement), notre gouvernement actuel est capable de reconnaître ses erreurs et de revenir judicieusement sur ses décisions.

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Cependant, l’épreuve de mathématique a une fois de plus fait parler d’elle : cette fois, il est question de sa prétendue difficulté, comme nous pouvons le lire au travers de diverses réactions d’élèves et d’enseignant·es reprises dans cet article du Figaro étudiant. Selon les dires d’un élève, le sujet de cette année serait une « injustice » comparé à celui de l’année dernière, ce que l’on peut interpréter comme une nouvelle preuve du manque de pertinence du positionnement de l’épreuve en 2023, et des dégâts que cela crée à court et moyen termes. Du côté des enseignant·es, un professeur agrégé de mathématiques (Rémi Chautard, contributeur régulier du Figaro étudiant) pose son diagnostic comme suit : « Je pense que ce soir, des élèves vont pleurer. Il y a des questions auxquelles les élèves français n’étaient plus habitués. Parfois piégeuses, en calcul, en raisonnement mais aussi assez fines, surtout à la fin« . Il s’attend donc à ce que « les notes ne seront pas les mêmes que l’an dernier« , ce qui n’est a priori guère surprenant si l’on prend en compte l’ajout d’un trimestre supplémentaire de cours avant l’épreuve, mais considère que « c’est bien de remettre un peu d’exigence au bac », et nous ne le contredirons pas sur ce point. Il conclut en constatant une « vraie différence de niveau » entre le sujet proposé en métropole et ceux donnés dans les centres étrangers : comme il ne précise pas en quel sens se pose cette différence, nous vous laissons en décider grâce à cet article du Figaro étudiant qui consigne les différents sujets posés cette année. A vos crayons !

Parité

Malheureusement sans surprise, la nouvelle note d’analyse publiée ce 18 juin par le Collectif Maths&Sciences concernant l’évolution globale des effectifs en sciences depuis la réforme 2019 confirme la chute des effectifs scientifiques,  particulièrement marquée lorsque l’on prend en compte les mathématiques, ainsi que la perte d’une polyvalence scientifique nécessaire et une « aggravation inédite des inégalités liées au genre en sciences« . Tout le contraire de ce qu’affirmait donc récemment l’ancien ministre de l’Education Nationale (en pleine campagne promotionnelle, vraisemblablement) et ses acolytes à l’origine de cette réforme, appuyés en ce sens par une tribune parue dans l’édition du 5 juin de l’Express. Celle-ci a d’ailleurs provoqué (à juste titre !) une levée de boucliers de la part de la Société Informatique de France, qui démonte méthodiquement dans ce document du 13 juin les à-peu-près et autres raccourcis mensongers déployés dans ce papier qui flirte avec les limites de l’éthique journalistique, puis quelques jours plus tard de sa consoeur mathématique.

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Cela ne fait que souligner à quel point il est important d’insister sur le fait que le déséquilibre des représentations de genre en mathématiques n’a rien à voir avec de prétendues compétences ou appétences innées, même s’il trouve déjà sa source à l’école primaire, comme le pointe cet article du Monde daté du 26 juin dernier, qui s’appuie sur le rapport de l’Académie des Sciences que nous avons mentionné ci-avant (dans la rubrique « Vie de la Recherche »). Rappelons-le donc encore une fois haut et fort : « Non, les filles n’ont pas moins de capacité en mathématiques » ! Ce cri du coeur est aussi le titre d’une enquête bien structurée menée par la journaliste scientifique Charlotte Mauger, publiée le 25 juin dernier sur le magazine en ligne l’Etudiant.

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Pour terminer cette rubrique sur une note plus positive, nous vous présentons le projet Post’Her, à l’initiative du groupe de grandes écoles ISAE-Supaero, qui a été mis en place cette année dans deux classes du collège Louis Pasteur (Lavelanet) par Laetitia Bonnet (enseignante de mathématiques) et Cécile Houssaille (enseignante d’arts plastiques), à qui La Dépêche consacre un article dans son édition du 17 juin dernier. Chacune des classes impliquées a produit un article Wikipédia et une affiche mettant en valeur une femme scientifique : le premier sera soumis à validation pour être publié sur la célèbre encyclopédie en ligne (qui a actuellement grand besoin de votre soutien et de vos contributions, dans la mesure de vos moyens) tandis que le second sera imprimé au format kakemono pour partir en exposition dans différents établissements de l’académie de Toulouse. Nous ne pouvons pas résister au plaisir de citer les noms des deux scientifiques mises en valeur dans ce projet, puisqu’il s’agit de deux de nos estimées collègues : Gersende Fort (informaticienne) et Ariane Trescases (mathématicienne).

Et aussi, ce mois-ci...

  • Réforme de la formation des enseignants : le ministère prévoit finalement le statut de fonctionnaires pour les étudiants en master 1”, dans Le Monde🔒
  • Pendant ce temps, le Figaro étudiant s’interroge sur qui est Lucas Markarian (a.k.a. Lucas-Maths), enseignant de mathématiques à Marseille manifestement célèbre sur Tik-Tok pour ses prises de position très vocales
  • Retour sur PISA 2022 et la culture scientifique (ou plutôt, son manque chez nos élèves…) : 74 pages publiées ce mois-ci par la DEPP, dont le contenu pique fort mais est d’utilité publique, surtout en ces temps troublés… Document à télécharger sur https://www.education.gouv.fr/media/195526/download
  • “Au lycée, les inégalités entre les spécialités s’installent dans la durée” (et ce n’est malheureusement pas une surprise), à retrouver dans Le Monde🔒
  • Le tableau de bord des indicateurs statistiques de la moisson Parcoursup 2024 est désormais disponible sur le site du gouvernement
  • Les bilingues sont-ils plus forts en maths ?”, quelques éléments de réponse à retrouver dans cet article de The Conversation
  • Multimaths : des ressources pédagogiques gratuites, sans publicité et conformes à la RGPD, présentées dans cet article du café pédagogique et disponibles à cette adresse 
  • Comment l’IA peut venir au secours des méthodes d’apprentissage des maths”, d’après cet article de David Larousserie paru dans Le Monde🔒
  • Apprendre les mathématiques de manière différente, que ce soit au collège Jean-Rostand (à retrouver dans Ouest France🔒), au collège Charcot (à retrouver aussi dans Ouest France), à l’école Julie Daubié (à retrouver… dans Ouest France🔒, bravo !), à Lavelanet (d’après la Dépêche du 11 juin) ou encore sur la plage de Grâves (à retrouver dans Le Télégramme à deux reprises !)
  • Mathématiques et sport pour 125 écoliers à Plémet, à retrouver dans Le Télégramme

À l'honneur

Remise du prix Simon Norton 2024 de l’EMS : félicitations à Nina Gasking !

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Le prix Simon Norton de la diffusion scientifique, décerné pour la première fois cette année par l’European Mathematical Society (EMS), a été attribué à Nina Gasking, médiatrice scientifique à la Maison des Mathématiques et de l’Informatique (ou MMI) de Lyon, et commissaire de l’exposition « Dans ma cuisine« , que l’on pouvait visiter à la MMI jusqu’au 29 juin 2024. Toutes nos félicitations à la lauréate pour son engagement, ainsi qu’à l’équipe de la MMI pour avoir consolidé ce projet remarquable, et à l’équipe en charge de la diffusion à l’EMS pour la création de ce prix judicieux, dont la prochaine édition aura lieu en 2026 : toutes les informations pour postuler (avant le 30 avril 2026) sont disponibles sur cette page. Quant à celles et ceux qui, comme nombre d’entre nous, n’ont pu bénéficier d’une visite de la MMI en temps utile, une toute petite compensation est possible grâce à cet article de l’université de Lyon qui, tout en mettant à l’honneur la lauréate, reprend les axes majeurs ayant structuré les différents ateliers qui composent l’exposition. De quoi nous mettre encore plus l’eau à la bouche, et espérer une mise en mouvement hors des murs de cet événement très alléchant ?

Remise du prix Demailly 2024 : félicitations aux membres du projet ZentralBlatt Open !

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Le prix Demailly 2024 pour la science ouverte a été attribué au projet zbMath Open, qui contribue à faciliter l’accès aux ressources (bibliographiques et logicielles) mathématiques et à simplifier leur archivage, indépendamment du lieu de production ou de consultation des ressources concernées. La remise de ce prix, dont c’est la première édition, a eu lieu le 12 juin dernier, lors de la demi-journée consacrée aux actions de science ouverte dont nous vous avons parlé ci-avant dans la rubrique « Vie de la Recherche ». Christian Bär (éditeur en chef du projet depuis le 1er janvier 2024), Klaus Hulek (éditeur en chef de 2016 à 2023, et à l’origine du passage en Open Access du projet) et Olaf Teschke (directeur de la rédaction depuis 2009) se sont vus remettre le prix au nom de l’équipe du projet, dont la citation est disponible sur la page de présentation des lauréats.

De l’influence d’un·e enseignant·e sur toute une vie : l’histoire de Mme Sinh, première mathématicienne professionnelle du Vietnam

Hoàng Xuân Sinh

Connaissez-vous la Pr.Dr. Hoàng Xuân Sinh, première femme Professeur de mathématiques au Vietnam dont la thèse de doctorat répond à une question d’Alexandre Grothendieck en personne ? L’histoire passionnante et impressionnante de cette ancienne étudiante de l’université de Toulouse devenue algébriste, rentrée au Vietnam pour contribuer au développement des mathématiques dans son pays et ayant rédigé sa thèse dans des conditions très difficiles (ce qui relève de l’euphémisme), est à (re)découvrir grâce à cet article du Courrier du Vietnam paru le 9 juin dernier. On y apprend notamment comment sa rencontre avec Grothendieck lui a permis de trouver un sujet de doctorat passionnant puis, grâce à son soutien et à celui de Hà Thi Quê, présidente fraîchement élue de l’Union des femmes vietnamiennes, de soutenir avec succès sa thèse le 5 Mai 1975 à Paris, « devant une foule de Professeurs, de Docteurs, de scientifiques français et d’intellectuels vietnamiens d’outre-mer ». Selon les mots de la mathématicienne, « Ce fut le jour le plus glorieux et le plus heureux de ma vie. »

Alexandre Grothendieck, en visite au Vietnam, rencontre celle qui allait devenir la première mathématicienne du pays

Cette vie a pourtant été chargée de réalisations remarquables, comme le souligne le professeur Hà Huy Khoai, son compatriote et collègue: « Sa vie est le parcours exemplaire d’une intellectuelle patriote et d’une scientifique talentueuse : elle a quitté une vie confortable en France pour revenir contribuer à l’éducation vietnamienne pendant les années de guerre. Elle est restée déterminée à atteindre les sommets de la science dans des conditions particulièrement difficiles, et a su faire les efforts nécessaires pour surmonter de nombreux défis et créer la première université privée du système éducatif vietnamien. »
Agée désormais de 91 ans, Hoàng Xuân Sinh est toujours très active puisqu’elle « a gardé l’habitude de se lever tôt, de faire de l’exercice, de lire les journaux vietnamiens et français pour comprendre les dernières tendances en matière de formation dans le pays et dans le monde. » Celle qui a cru à tort que “l’enseignement était la plus facile des professions” et que “les mathématiques étaient la discipline la plus facile” force aujourd’hui le respect de par son parcours : à quand un livre ou un film retraçant sa vie ? Certains en ont fait bien moins et ont obtenu cependant les honneurs du grand art, ce ne serait donc que justice que de permettre au plus grand nombre de connaître la vie de cette femme d’exception.

Un jeune trentenaire au Mans : joyeux anniversaire au laboratoire de mathématiques

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Il y a 30 ans, le Laboratoire Manceau de Mathématiques (ou LMM pour les intimes) était fondé à l’université du Mans. A l’occasion de cet anniversaire, Fabrice Gandon, journaliste du Maine Libre, a rencontré Alexandre Brouste, le directeur actuel du laboratoire. Lors d’un échange instructif mais réservé aux abonné·es, le mathématicien manceau explique en quoi consiste la recherche en mathématiques développée au LMM, ainsi que ce qu’est, plus généralement, l’activité de recherche en mathématiques.
Cet événement a par ailleurs été célébré, comme souvent lorsqu’il s’agit d’anniversaires dans la communauté mathématique, par l’organisation d’une conférence regroupant des chercheurs et chercheuses du monde entier dont les travaux sont liés aux thèmes de recherche formant l’ADN du LMM (probabilités, statistiques, étude de risques), puis de deux écoles d’été à destinations des jeunes (et moins jeunes) chercheurs et chercheuses travaillant dans ces domaines. Un événement grand public a eu lieu dans ce cadre, sous la forme d’une table ronde tenue le 24 mai dernier sur le thème de la recherche en mathématiques développée au Mans.

Le printemps, saison où fleurissent les compétitions (inter)nationales de mathématiques

Chaque année, les mois de mai et de juin sont particulièrement importants dans le milieu des mathématiques de compétition, puisqu’ils constituent généralement la période de l’année où s’achèvent de nombreux concours, sur le territoire national ou à l’étranger, et sont l’occasion de distinguer certain·es lauréat·es.
Parmi les nombreux articles dédiés à ces événements, soulignons notamment la réussite de Jules Mastos, mise en valeur par le média Lyon Capitale, qui va représenter la France lors du concours international des jeux mathématiques et logiques. Au niveau des concours internationaux, mentionnons aussi la clôture de l’édition 2024 du TFJM² (Tournoi Français des Jeunes Mathématiciens et Mathématiciennes), lors de la finale qui s’est tenue à l’ENS Paris Saclay du 18 au 20 mai derniers et a réuni des lycéen·nes venu·es de tout le pays. On en parle par exemple dans l’édition du 15 juin de la république des Pyrénées 🔒. A noter que les sujets de cette édition sont désormais accessibles en ligne, tout comme les différentes solutions proposées par les équipes participantes. Nos félicitations à tou·tes les participant·es pour leurs contributions originales, ainsi qu’aux deux équipes lauréates qui participeront en juillet prochain à la première édition de la compétition européenne ETEAM !

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Les remises de prix du traditionnel concours Kangourou, qui fête déjà ses 34 ans, ont quant à elles eu lieu dans différents établissements du pays, comme à l’école Diwan de Saint-Pol-de-Léon (qui a l’honneur d’un article du journal le Télégramme) ou au collège Colbert de Cholet (dont on parle dans l’édition du 6 juin du journal Ouest-France). Il semblerait par ailleurs que la Mayenne soit une terre fertile en jeunes mathématicien·nes puisque, comme le rapporte la même édition du journal Ouest-France, une collégienne de Port-Brillet répondant au nom de Méline Brault s’est hissée à la 64ème place au niveau international dans sa catégorie : toutes nos félicitations à elle pour cette très belle prouesse !

Et aussi, ce mois-ci...

Quelques collègues présents et (peut-être) à venir aussi mis·es à l’honneur ce mois-ci…

  • Eric Blayo, ambassadeur de la Fête de la Science 2024, est mis à l’honneur dans un article paru le 11 juin dernier sur le site EchoSciences de Grenoble. Un entretien passionnant où l’on découvre la vie et l’oeuvre de cet expert en modélisation des océans, ainsi que ses contributions importantes aux activités de diffusion des mathématiques de la région grenobloise (notamment par le biais de l’association La Grange des Maths) et au-delà.
  • Maxime Breden et Guillaume Dubach sont les lauréats de l’édition 2024 des Shiing-Shen Chern Young Faculty Awards : le communiqué de presse de l’Ecole Polytechnique est désormais accessible en ligne.
  • Les 32 lauréates de la 13ème édition des concours Miss Maths et Miss Sciences ont été récompensées lors d’une cérémonie qui s’est déroulée le 24 juin dernier à Dakar, au Sénégal. Plusieurs médias d’Afrique francophone (dont l’Agence Presse Sénégal) ont dédié un article à cette manifestation qui illustre une volonté politique nationale en termes d’accès aux études scientifiques. Moustapha M. Guirassy, ministre sénégalais de l’éducation nationale, a été on ne peut plus explicite  : « La promotion des mathématiques et des sciences surtout chez les filles est donc pour ainsi dire une des voies pour une envergure économique, gage de la souveraineté politique et sociale. » Toutes nos félicitations les plus chaleureuses aux jeunes mathématiciennes et scientifiques récompensées cette année !

… et toujours plus de lauréat·es de compétitions mathématiques (inter)nationales

  • Des élèves du LPO de Kawéni (à Mayotte) se distinguent lors des dernières olympiades de mathématiques, à retrouver dans Le Journal de Mayotte
  • Des lauréat·es du concours annuel de VidéoDiMath en Charente-Maritime, à retrouver dans l’édition du 24 juin du Sud-Ouest, ainsi qu’en Corse, à retrouver dans l’édition du 30 mai de Corse Matin
  • Trois finalistes originaires de Mayenne dans l’édition française du championnat international des jeux mathématiques et logiques, à retrouver dans Ouest-France
  • Une classe de seconde de La souterraine lauréate de l’édition régionale du concours « Mathématiques sans frontières », à retrouver dans l’édition du 1er juin de La Montagne

Une mise à l’honneur insolite avant l’été : le site d’information belge 7sur7 partage avec nous un extrait des auditions de l’émission « America’s Got Talent » diffusées le 25 mai dernier. Celui-ci nous montre comment un petit garçon de 2 ans nommé Devan est devenu la coqueluche du jury et du public par ses compétences… calculatoires ! Additions et tables de multiplications ne semblent avoir aucun secret pour ce petit bonhomme dont la prestation de 3minutes et 14 secondes met le sourire aux lèvres.

Diffusion

Ouverture du musée Fermat : dernière ligne droite !

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S’il ne faut retenir qu’une seule chose de cette rubrique ce mois-ci, c’est l’ouverture imminente du musée Fermat à Beaumont-de-Lomagne (Occitanie) ce 6 juillet 2024. Ce musée, situé dans la maison natale de Pierre de Fermat, permet de découvrir quelques trésors cachés ainsi qu’une partie des contributions de ce juriste mathématicien qui a su marquer son siècle.

Sur le site internet du musée, on peut lire que ce lieu, « entre transmission et innovation« , a pour vocation d’être plus qu’un musée, mais aussi « un lieu de savoir où la philosophie et les missions de l’association Fermat Science se conjuguent pour enrichir l’expérience de chaque visiteur », ce qui promet de beaux échanges scientifiques, où chacun⋅e pourra manipuler, observer, questionner, et découvrir une large panoplie d’outils mathématiques.

Deux beaux projets de la fin mai

Pourquoi toujours séparer sciences et littérature, alors que fourmillent nombre d’exemples d’écrivain·es scientifiques ou de formes littéraires déterminées par des contraintes mathématiques ? Ce ne sont pas Clément Petit et Elsa Cellier, inspecteur et inspectrice pédagogiques régionaux (respectivement en mathématiques et en lettres) qui encourageront cette séparation, bien au contraire ! Comme raconté ce mois-ci dans l’Echo Républicain, c’est grâce à leur initiative qu’est né le projet pédagogique « Ballades mathématiques », dont les objectifs pédagogiques visent à éclairer le lien entre mathématiques et français par la rédaction de nouvelles impliquant des démonstrations mathématiques et des aspects historiques : le but est d’« apprendre l’histoire des mathématiques », de « s’approprier les codes et le vocabulaire du langage de la matière, souvent à l’origine des difficultés pour les élèves », ou encore de « découvrir les règles des écrits narratifs » en compagnie de l’écrivain David Ramolet. « Le Petit Evariste« , journal périodique présentant les travaux mathématiques des élèves de l’académie d’Orléans-Tours, consacre deux pages de sa onzième édition à ce projet ambitieux. Notons que celui-ci permet aussi d’établir une liaison collège-lycée de par les établissements qui en font partie (deux collèges et un lycée) : une initiative qui mérite d’être relayée et, pourquoi pas, développée dans d’autres académies !

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Du côté de Mulhouse, la troisième édition de La Family Math Night Games s’est déroulée le 17 mai dernier sur le site du complexe sportif de la Doller, à Bourtzwiller. Pendant deux heures (de 18h à 20h), de nombreuses familles ont pu profiter d’un moment agréable autour de jeux mathématiques. Cet évènement, relayé par exemple dans l’édition du 23 mai du journal l’Alsace 🔒ou sur le site officiel de l’académie de Strasbourg (en date du 23 juin dernier), a pour objectif annoncé de « transmettre aux familles l’envie de faire des mathématiques en leur proposant une image plus attrayante et de leur montrer que les mathématiques sont accessibles à tous », selon l’association BZ mon bled, qui a contribué à la réussite de cette soirée aux côtés du Labo Maths du collège de Bourtzwiller, l’association Jeun’esse Cité et celle des Cheikhs de Brossolette. Une très belle initiative à qui l’on souhaite une longue vie !

Rallyes mathématiques régionaux : finales en folie

Le début du mois de juin marque généralement la période des finales des rallyes mathématiques organisés à différents niveaux régionaux. Ces événements, dont les premières épreuves se tiennent plus tôt dans l’année, sont l’occasion pour différentes classes de tout le pays de découvrir d’autres aspects des mathématiques, plus ou moins plaisants (car tout le monde n’est pas compétiteur ou compétitrice dans l’âme, soyons honnêtes), et sont aussi à l’origine de belles rencontres pour les classes qui atteindront la phase finale de la compétition.
C’est par exemple le cas dans l’académie de Lyon, présentée dans cet article de l’édition du 10 juin du journal le Progrès 🔒, où la conférence interactive donnée par Cédric Villani aux élèves des douze classes de la région Auvergne-Rhône-Alpes en lice pour cette finale a rencontré un franc succès. Selon Régis Goiffon (l’un des artisans de la diffusion mathématique lyonnaise, et de nos estimés collaborateurs) qui était sur place, les 360 élèves « buvaient littéralement ses paroles et ont posé plein de questions », ce qui est le rêve de tout·e conférencièr·e.

Cédric Villani en conférence devant les finalistes de l’édition 2024 du rallye mathématique de Lyon.

Les autres académies n’étaient pas en reste cette année, que ce soit dans la région Centre (à retrouver dans l’édition du 4 juin de La nouvelle république, ou dans celle du 25 juin🔒), en Aquitaine (à retrouver dans l’édition du 9 juin du site l’Actu.fr) ou encore dans le grand Est (comme rapporté dans l’édition du 1er juin du site jhm). Toutes nos félicitations aux jeunes participant·es et aux classes lauréates de ces événements mathématiques festifs !

Et aussi, ce mois-ci...

  • Une nouvelle vidéo de VidéoDiMath nous propose une introduction accessible à la logique en 30 mn, en partant à la recherche du vrai Loan Le Maguet… Saurez-vous le retrouver ?
  • A Saint-Dié-des-Vosges, les mathématiques rencontrent la musique et les lettres à l’occasion d’une restitution le 7 juin dernier de travaux réalisés durant la semaine internationale des mathématiques : le site d’information en ligne Vosges info nous en apprend plus à ce sujet.
  • La deuxième édition du « Concours Élite Mathématiques »,  pour inciter les élèves filles burkinabées à s’intéresser aux sciences exactes, a réuni une soixantaine de participantes issues d’une trentaine d’établissements différents, selon le journal en ligne Burkina 24
  • On connaît les lauréat·es de l’édition 2024 du concours « Ma thèse en 180 secondes », dont le but est d’expliquer, en 3 minutes et une diapositive, son sujet de thèse à un public de non spécialistes : plus d’informations sont disponibles dans cet article de Sciences et Avenir.
  • L’édition 2024 du Tournoi des Grandes Causses a réuni 160 participant·es, à retrouver dans le Midi Libre 🔒
  • Les recommandations TikTok du Figaro Etudiant pour bien réviser son bac, notamment en mathématiques : c’est à vos risques et périls…

Parutions

En librairie

Alan Turing, héros tragique de l’histoire des mathématiques et de l’informatique

La vie et l’œuvre d’Alan Turing, les injustices dont il a été victime et sa fin tragique, n’ont cessé d’inspirer romancier·es, biographes, réalisateurs de films, ou encore scénaristes de bandes dessinées. Maxence Collin et François Rivière font partie de cette dernière catégorie et, accompagnés d’Aleksi Cavaillez au dessin, ils ont récemment sorti aux éditions Casterman une biographie graphique en noir et blanc sobrement intitulée « Alan Turing ». En 264 pages, ces trois artistes retracent « la vie et les pensées intimes d’un génie des mathématiques » et lui rendent ainsi un bel hommage à l’occasion des 70 ans de sa disparition. Comme on l’apprend dans l’entretien accordé par Maxence Collin au journal Ouest-France, le trio a « voulu rendre hommage à cet homme intelligent et complexe, en difficulté avec lui-même et son époque » avec ce projet qui leur « tenait à cœur depuis près de dix ans » et par lequel il voulait « montrer la complexité de cet homme, avec un mal-être intérieur profond et quelque peu décalé de son temps ».
La RTBF a, à cette occasion, rendu hommage au mathématicien britannique à deux reprises : tout d’abord lors d’un entretien de Christine Pinchard avec les trois artistes à l’origine de ce projet, présenté comme un « roman graphique dense et sensible » qui retrace « l’histoire d’une injustice flagrante envers un homme qui a contribué à sauver les siens ». Quelques jours plus tard, à l’occasion de l’anniversaire de sa mort (le 7 juin), les deux scénaristes étaient accueillis pour une édition spéciale Alan Turing de l’émission Entrez sans frapper (mise en ligne le 18 juin dernier sur sa plate-forme de podcasts).

Pour celles et ceux qui seraient plutôt à la recherche d’un ouvrage périscolaire que d’une lecture estivale passionnante, le second opus de Guillaume Voisin, intitulé « 35 problèmes mathématiques pour explorer la vie courante » et paru en fin d’année dernière aux éditions Ellipses, a les honneurs de l’édition du 26 juin dernier du journal Ouest-France. Ce recueil est considéré par l’auteur manceau comme « la suite logique de son premier : des fiches de révisions mathématiques », et a pour but annoncé de « vraiment [d’]intéresser le lecteur avec tout une explication autour du problème, changer un peu des problèmes de maths traditionnels ». Le site de l’éditeur annonce quant à lui que ce livre cible non seulement les lycéen·nes et les élèves du supérieur, mais aussi les « amateurs de mathématiques curieux d’en explorer les champs d’application en s’exerçant ».

À paraître

L’information toute fraîche de cette fin de mois est l’annonce, par les éditions Cassini, de la sortie prochaine (prévue pour le début du mois de juillet) d’une version française de « Shape« , l’ouvrage de Jordan Ellenberg paru outre-Atlantique il y a trois ans, dans une traduction de Françoise Bouillot. Intitulé « Formes. La géométrie cachée de l’information, de la biologie, de la démocratie et de tout le reste », il a déjà reçu le Prix Cosmos 2024, qui récompense deux des « meilleurs livres de diffusion scientifique publiés en français, prioritairement dans les domaines de la physique, de l’astronomie et des mathématiques, ou dans les sciences fondamentales au sens large, tels que jugées par un comité d’experts et des lycéens respectivement« .

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La cérémonie de remise des prix s’est déroulée le 10 juin dernier, à l’Institut de France, et la liste des finalistes de chacune des deux catégories (Prix Cosmos et Prix Cosmos des lycéen·nes) pourrait être vue comme une suggestion possible de lectures estivales pour la saison 2024, non ? En attendant, toutes nos félicitations à Jordan Ellenberg et à Françoise Bouillot pour cette belle récompense, et un grand merci aux éditions Cassini de nous régaler de ce nouvel opus du mathématicien américain, dont nous vous reparlerons très certainement à la rentrée ! Rappelons à toutes fins utiles (surtout en ces temps troublés) que cette maison d’édition avait déjà publié une version française (due là encore à Françoise Bouillot) du précédent ouvrage de cet auteur, intitulé « L’art de ne pas dire n’importe quoi. Ce que le bon sens doit aux mathématiques » chez nous, et « How not to be wrong. The power of mathematical thinking » en version originale.

En kiosque

Des galets…

En ce mois de juin, le magazine Pour la Science nous propose, au détour d’une une mettant l’archéologie en valeur, de se pencher sur la forme des galets grâce à un article de Théodore Hill et Kent E. Morrison. Sobrement intitulé « L’insoluble équation de la forme des galets« 🔒, cet écrit mêle intimement mathématiques et physique pour tenter de résoudre les équations rendant compte de la géométrie des galets de nos plages, afin de mieux « éclairer l’histoire des rives et rivières, sur Terre… comme sur Mars ! » Cette adaptation d’un article des deux auteurs paru il y a un an dans l’American Scientist (juin 2023), enrichie d’un encart d’une page (rédigé par François Savatier) consacré à la fausse simplicité des galets, nous permet de mieux comprendre pourquoi le problème de la forme des galets, d’apparence simple et maintes fois  étudié au fil des siècles, « recèle, pour les mathématiciens et les physiciens, un abîme de complexité » et reste encore largement ouvert.

Les mathématiques sont, comme chaque mois, au cœur de la rubrique tenue dans ce même magazine par Jean-Paul Delahaye. Au programme de l’édition du mois de juin, le jeu de Set!, bien connu des mathématicien·nes pour sa trompeuse simplicité, et quelques problèmes combinatoires (très) difficiles qui y sont associés. On y découvre notamment comment des méthodes issues des modèles massifs de langage, au coeur des IA génératives, ont récemment permis de progresser de manière significative et intéressante sur ces questions. Selon l’auteur de la rubrique, « La technique utilisée s’appliquera sans doute à d’autres sujets et conjectures difficiles, ce qui fera peut-être de ce type d’IA de précieux assistants mathématiques d’un nouveau genre« . Nous ne vous en dirons pas plus sur le contenu de cet article🔒, afin de ne pas vous gâcher le plaisir de découvrir, sur un exemple précis, comment la recherche en IA progresse actuellement.

Dans la rubrique « Même pas maths! » du numéro 418 du magazine Science&Vie Junior (paru le 12 juin dernier), la journaliste Charlotte Mauger nous propose d’essayer de jouer aussi longtemps que possible à une variante du jeu de la bataille, connue sous le nom de Beggar-my-Neighbor, et où le but est de dépouiller son adversaire de ses cartes (et non de se débarrasser des siennes). Bien que John Conway en personne qualifiait cette question « d’anti-problème de Hilbert », par opposition aux grandes questions listées par ce mathématicien allemand du début du 20è siècle, et que la réponse à cette question ne semble pas être une contribution essentielle aux mathématiques, les mathématiciens se sont longtemps interrogés sur l’existence d’une distribution initiale des cartes qui conduirait à une partie sans fin.
Grâce à Brayden Casella, tout jeune chercheur indépendant du New Hampshire, on connaît enfin la réponse… qui est positive ! Dans cette prépublication datée de mars 2024, Casella et ses co-auteurs (au nombre de 7, tout de même) expliquent comment construire une distribution initiale qui mène à entrer par exemple dans le cycle suivant, et donc à ne pouvoir terminer la partie :
Joueur 1: —K—Q-KQAJ—–AAJ–J–
Joueur 2: ———-Q—-KQ-J—–KA
Si cette description vous paraît obscure, il ne vous reste qu’à aller lire l’article de notre collègue pour comprendre comment passer l’éternité à jouer une même partie de cartes, et à apprendre à relativiser la longueur de vos parties habituelles de jeu de bataille…

Pour finir, nous ne pouvions pas omettre le numéro 418 (paru en juin) du magazine Tangente : entre son dossier sur les paradoxes, dont l’objectif annoncé est de vous faire réfléchir, et celui sur les mille et unes vies de Benoît Mandelbrot, à qui l’on doit notamment la notion fondamentale de fractale, votre été sera riche en découvertes si vous y plongez le nez !

En ligne

Le dernier numéro d’EMS Magazine, qui est le trimestriel officiel de la Société Mathématique Européenne (ou European Mathematical Society), est paru le 25 juin. Parmi de nombreuses contributions, il propose notamment un article (en anglais) de Sylvie Benzoni-Gavage (dont nous vous avions présenté le dernier ouvrage dans la revue de presse du mois de mai) qui présente, en 6 pages très complètes, ce que sont les missions de la Maison Poincaré : à mettre impérativement entre toutes les mains ! On y trouvera par ailleurs un entretien très intéressant de la mathématicienne Elisabetta Strickland, mené par Ulf Persson et titré « A woman in a man’s world »: tout un programme.

Histoire des mathématiques

Sophie Germain

Ce mois-ci voit Sophie Germain (mathématicienne, physicienne et philosophe) mise à l’honneur par le magazine Ça m’intéresse, ainsi que par l’exposé grand public donné par notre collaboratrice Jenny Boucard lors de la quatrième édition des Lectures Sophie Kowalevski.
Le premier nous apprend, dans un article intitulé « Les mathématiques au féminin : réflexions autour de Sophie Germain (1776-1831) », qu’on lui doit notamment la loi mathématique de la vibration des surfaces élastiques, dont l’une des nombreuses applications n’est autre que… la construction de la Tour Eiffel ! Dans le second, il s’agissait « d’étudier la question des femmes en mathématiques à travers le prisme de Sophie Germain en présentant son itinéraire de femme mathématicienne au début du XIXe siècle et de montrer comment son personnage a été mobilisé au tournant du XXe siècle dans les discussions sur la nature des femmes et leur place dans la société, » selon le résumé qui en est proposé par l’oratrice. On peut par ailleurs retrouver le contenu de l’exposé (et bien plus) dans l’article publié en 2020 par Jenny Boucard dans l’ouvrage « Against all odds.Women’s Ways to Mathematical Research Since 1800 ».

Srinivasa Ramanujan

Si votre mémoire est plutôt auditive que visuelle, vous serez doublement (voire triplement) servi ce mois-ci : d’un côté, Futura nous propose un quart d’heure de podcast immersif pour découvrir l’histoire hors du commun (et c’est un euphémisme) de Srinivasa Ramanujan, prodige indien dont les fulgurances laissent encore perplexes les mathématicien·nes contemporain·es.

Alexandre Grothendieck

De l’autre, France culture nous fournit matière à réflexion avec deux émissions consacrées à Alexandre Grothendieck, autre mathématicien à l’histoire hors du commun et aux contributions mathématiques exceptionnelles : la première, d’un format de 30 minutes, est l’édition du 28 juin du magazine « L’Invité(e) des matins », animée par Guillaume Erner (aux manettes de feu le podcast Superfail, que nous vous recommandons volontiers pour accompagner votre été) qui recevait notamment la mathématicienne et romancière américaine francophone Leïla Schneps pour discuter des engagements politiques de cet infatigable militant écologiste et anti-militariste. Pour la seconde, qui conviendra aux amateurs et amatrices de format long, il ne s’agit pas de moins de cinq épisodes d’une heure, constituant la Grande Traversée 2024 de la radio : intitulée « Alexandre Grothendieck, légende rebelle des mathématiques » et réalisée par Marie Durrieu, elle sera diffusée sur les ondes du 5 au 9 août prochains, mais est déjà disponible à l’écoute en ligne : de quoi la déguster par petits morceaux tout au long de l’été !

Pour terminer cette rubrique de manière plus légère, mentionnons ici que Lodj a publié ce mois-ci une infographie à la fois claire et concise, bien qu’assez complète, retraçant l’évolution de l’Intelligence Artificielle de 1943 à 2023, tandis que le magazine Slate revient sur l’origine du test de Student, l’une des plus grandes innovations statistiques des mathématiques modernes, qui est due à… la brasserie Guinness ! Saviez-vous par exemple que, contrairement à ce que l’on pourrait penser de prime abord, ce n’est pas à un Mr ou une Mme Student qu’est dû le nom de ce test ? Pour comprendre d’où viennent les mathématiques et la terminologie sous-jacentes, n’hésitez pas à déguster (ou à engloutir, selon le stade de la soif que vous avez atteint) cet article dont la lecture ne vous occupera guère plus de quelques minutes.

 

Maths et Arts

Mathématiques et musique, une histoire qui dure

En ce mois de juin, qui célèbre la musique sous toutes ses formes au soir du 21, deux occasions nous sont données de profiter des liens entre cet art et les mathématiques. Commençons par la résidence du compositeur Thomas Menuet au sein de l’Institut de Recherche Mathématique de Rennes, qui prend fin en ce 30 juin 2024 et donne lieu à un dossier assez complet et accessible sur le site de la Maison des Mathématiques de l’Ouest (MMO), ainsi qu’à une brochure de 20 pages présentant les objectifs (visés, puis atteints) de cette résidence originale. Ce séjour de 18 mois parmi les mathématicien·nes de l’IRMAR a en effet donné lieu à de nombreux échanges avec le musicien, que celui-ci a mis à profit pour produire 10 énigmes mathématico-musicales et 4 oeuvres musicales : si vous vous sentez capables de relever le défi, vous pouvez déjà retrouver quatre des énigmes créées par Thomas Menuet sur cette page. De quoi occuper agréablement votre été ?

Prêt·es à relever les dix défis mathémusique de Thomas Menuet ?

Si vous souhaitez une activité plus reposante pour vos neurones, le nouveau projet éditorial de l’INSMI (institut du CNRS en charge des mathématiques et de leurs interactions) est fait pour vous. Intitulé « Maths & Musique », il propose une série d’articles visant à présenter de manière accessible les recherches liant mathématiques et musique qui sont actuellement menées dans les différents laboratoires de l’institution. Si vous avez peut-être déjà entendu parler des gammes pythagoriciennes ou de la manière dont on peut entendre (ou non) la forme d’un tambour, vous serez probablement plus surpris de découvrir comment la musique peut inspirer des travaux de topologie algébrique ou de théorie des pavages. Pour en savoir plus, vous pouvez déjà lire le premier article de la série, écrit par Moreno Andreatta, directeur de recherche à l’Institut Mathématique de Recherche Avancée (Strasbourg), dont la conférence-concert Math’n’pop vaut le détour pour petit·es et grandes ! En attendant de pouvoir peut-être profiter de sa prochaine tournée, nous pouvons patienter grâce aux vidéos mises en ligne par le mathémusicien sur sa chaîne YouTube : auriez-vous deviné tou·tes seul·es que certaines compositions présentées ici sont réalisées de manière purement algorithmique, à l’aide d’une compréhension géométrique de certaines structures ? De quoi passer un été riche en découvertes musicales et mathématiques !

Quand les mathématiques inspirent les artistes plastiques

Disparue en 2022 à l’âge canonique de 106 ans, la peintre cubano-américaine Carmen Herrera est désormais considérée comme l’une des grandes figures de l’abstraction géométrique. Le Centre Pompidou, dont la fondation a permis de donner une visibilité nouvelle au travail de cette artiste , publie en cette fin de mois un entretien passionnant avec le peintre Tony Bechara, qui oeuvre à la réhabilitation du caractère pionnier du travail et de l’intuition géométrique de celle qui a été à la fois sa voisine, amie et collègue pendant près d’un demi-siècle. Selon lui, le processus artistique de Carmen Herrera lui était très spécifique : « Son approche de la géométrie a toujours été quelque peu excentrique : la façon dont deux formes se touchent ou semblent se toucher est vraiment unique. Il y a aussi une forme d’originalité dans son utilisation des couleurs, qu’elle a toujours choisies vives, quelque peu agressives, avec des cadmiums, des verts, des oranges…C’était excentrique comparé aux artistes de la jeune génération, arrivés un peu plus tard à New York et qui eux sont vite devenus célèbres : les minimalistes. Ils étaient très précis sur le plan géométrique et leurs couleurs étaient pour la plupart atténuées, avec principalement du gris, du noir et du blanc. Dans le cas de Carmen, je pense que sa palette était très cubaine – je déteste utiliser ce type de cliché, mais ça l’était vraiment ! Cela dit, il est important de noter que son travail ne porte pas sur la couleur même, mais sur le dialogue, le contraste qui se crée lorsque vous juxtaposez une couleur à côté d’une autre. » Il semblerait que son passé d’architecte ait aussi influencé celle qui répétait souvent : « Je n’ai jamais rencontré une ligne droite que je n’ai pas aimée. » Nous ne vous dévoilons pas plus le contenu de cet article qui nous permet de faire connaissance avec les composantes mathématiques et picturales du travail d’une artiste avant-gardiste et « obstinée » restée trop longtemps dans l’ombre. Et si vous voulez, à votre tour, vous essayer au style Herrera, pourquoi ne pas suivre ce pas-à-pas (en anglais) proposé par la mission Wide Rainbow ?

Jouez-là comme Herrera !

Plus près de nous, l’exposition « Générations intuitives – quand les artistes s’inspirent des mathématiques » peut être visitée jusqu’au 23 juillet prochain au sous-sol de la Maison Poincaré. Si vous n’avez pas encore eu l’occasion de visiter ce site dédié à la diffusion des mathématiques et à leurs liens avec la société, c’est le moment de planifier une escapade parisienne (avant le début des Jeux Olympiques, de préférence) pour aller admirer les oeuvres d’un collectif d’artistes sélectionnées par la Maison Poincaré et la Galerie Wagner. Différents styles sont représentés, et les concepts mathématiques sous-tendant les oeuvres proposées sont assez variés, allant de la géométrie à l’arithmétique, à la topologie ou encore à la théorie des noeuds. Tant que vous serez sur place, ne manquez pas l’exposition « Infra-Terre, Incursion chromatique » : cette présentation d’une sélection d’oeuvres de Caroline Besse, artiste-peintre en résidence au sein de l’Institut des sciences de la terre de Paris depuis maintenant deux ans, marque certainement par ses choix chromatiques, mais aussi par les structures mathématiques qui s’en dégagent involontairement. Notez la possibilité de bénéficier, au mois de juillet, d’une visite guidée d’une heure en se présentant à l’un des créneaux horaires indiqués sur le site de l’exposition. Lorsque l’on peut profiter d’activités artistiquement mathématiques, comment ne pas se réjouir ?

L’exposition « Générations intuitives » est accessible jusqu’au 23 juillet : il est encore temps d’y aller !

Et aussi, ce mois-ci...

  • Trois collégiennes de Mamers lauréates du concours « Mathématiques et Arts » organisé par l’Amopa, à retrouver dans cet article … de Ouest-France (édition Le Mans), bien entendu !
  • A partir du Lundi 8 juillet à 17h, la cour minérale de l’université d’Avignon se transforme en scène de théâtre sur laquelle se produira un nouveau binôme arts/sciences, dans le cadre du projet initié par la compagnie les Sens des mots. Le Lundi, on pourra découvrir le texte de l’écrivain et dramaturge Samuel Gallet, « Une prophétie [Arithmétique par intervalles] », écrit à la suite de sa rencontre avec Nathalie Revol, chargée de recherche en informatique à l’INRIA.  Les autres jours de la semaine seront l’occasion de (re)découvrir quatre autres binômes arts/sciences, en présence des auteurs/autrices et chercheurs/chercheuses impliqués, qui sont présentés sur le site de la compagnie (où vous trouverez aussi toutes les informations pour réserver vos places). Une opportunité rare, à ne pas manquer si vous avez la chance d’être dans les parages du festival  !

Pour finir

  • Nous vous en parlions déjà dans la revue de presse du mois d’avril : la campagne de financement participatif lancée par les éditions Les Tardigrades pour que puisse paraître le nouveau conte mathématique de Marie Lhuissier s’est achevée ce 16 juin… avec succès ! La barre des 100% ayant été franchie, les 104 contributeurs et contributrices ayant permis à ce beau projet de se concrétiser pourront découvrir dans le courant de l’été ce nouvel opus de la série, joliment illlustré par Elis Tamula, ainsi que les contreparties correspondantes. Nous vous en reparlons probablement dans la rubrique Parutions de l’une des éditions automnales de la revue de presse !
  • Savez-vous ce que sont les Quipus ? Point d’odorat en jeu ici, mais un système de codage inca digne des plus grands espions : comme nous l’apprenons dans cet article paru le 28 juin sur le site du National Geographic, il s’agit d’un trousseau de cordelettes à noeuds (d’où l’appellation « Khipu », ou « Quipu » dans nos traductions contemporaines, qui signifie tout simplement « noeud » en quechua) utilisé pour consigner de manière codée des informations estimées importantes pour l’empire. Certains de ces khipus sont en réalité basés sur un chiffrage numérique, dont on ne sait pas toujours ce qu’il signifie à ce jour… Nous ne pouvons que vous recommander de lire l’intégralité de cet article (en libre accès), plein de belles surprises et très agréablement écrit et illustré.

Toute l’équipe de la revue de presse vous souhaite un très bel été, et vous donne rendez-vous en septembre pour de nouvelles aventures éditoriales !

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